Sélection officielle – En Compétition

Close de Lukas Dhont (Drame – Belgique – 1h45)
En 2018, Luka Dhont avait remporté la Caméra d’Or du 1er long métrage de fiction avec Girl, présenté à Un Certain Regard (il avait également été distingué par le jury de la FIPRESCI, presse internationale). Il suivait Lara, 15 ans, dans son rêve de devenir danseuse étoile. Avec le soutien de son père, elle se lançait à corps perdu dans cette quête d’absolu. Mais ce corps ne se pliait pas si facilement à la discipline que lui imposait Lara, car elle est née garçon.
Avec Close, le réalisateur s’intéresse à l’amitié quasi fusionnelle qui lie deux préadolescents, Léo (Eden Dambrine) et Rémi (Gustav De Waele). C’est l’été et ils partagent tout ensemble, les virées à vélo, les courses dans la campagne, dorment l’un chez l’autre, échangent des confidences, font mille projets. A la rentrée scolaire, ils intègrent la même classe. Leur complicité amène une camarade à leur demander s’ils forment un couple. La réflexion perturbe Léo qui prend peu à peu ses distances d’avec Rémi. Un autre copain lui fait découvrir le hockey sur glace. Un jour, c’est le drame… Pour Léo, c’est une rupture, la solitude et la fin de l’innocence.
Lukas Dhont explore alors la douleur de ses personnages avec pudeur. Il montre plus qu’il n’explique et les filme au plus près. Afin de capter leurs émotions, il se focalise sur les les corps en mouvement, les visages, les regards, privilégie les non-dits aux dialogues. Le film est porté par Eden Dambrine (Léo), très jeune comédien débutant, qui impressionne par sa maturité dans un rôle complexe.
Un second long métrage bouleversant.
Close de Lukas Dhont, avec Eden Dambrine, Gustav De Waele, Igor Van Dessel, Léa Drucker, Émilie Dequenne, Kevin Janssens (Drame – Belgique – 1h45 – Date de sortie : à déterminer)
Lukas Dhont, Emilie Dequenne, Eden Dambrine (L’Invité /Patrick Simonin – TV5 Monde – 14mn)

Tori et Lokota de Luc et Jean-Pierre Dardenne (Drame – Belgique/France – 1h28)
Depuis La Promesse, leur 3e long métrage, les frères Dardenne, demeurent fidèles à un cinéma social et politique, à l’image de Ken Loach. A respectivement 71 et 68 ans, Jean-Pierre et Luc Dardenne n’ont rien perdu de leur capacité à s’indigner et à dénoncer les injustices de la société européenne. Avec Toki et Lokita, ils se penchent sur le sort et les conditions de vie de deux jeunes migrants venus d’Afrique de l’Ouest, « mineurs étrangers non accompagnés » (ou « mena »).
Lokita, une adolescente réfugiée en Belgique, espère obtenir un titre de séjour. Elle souhaite pouvoir travailler afin d’envoyer de l’argent à sa mère restée au Cameroun. Aux autorités, elle essaie de faire croire maladroitement que Toki, un gamin qu’elle a rencontré sur le bateau de la traversée qui les a conduits en Europe, est son petit frère. Lui a été régularisé, car, né « enfant sorcier », il est menacé de mort au Bénin, son pays, et protégé par les lois sur l’enfance. Ils vivent dans un foyer en attendant une nouvelle réunion de la commission d’attribution. Les difficultés s’accumulent. Lokita est bientôt prise au piège. Un pizzaïolo dealer violent l’exploite pour revendre de la drogue, abuse d’elle et un réseau de passeurs la rançonne. Néanmoins, elle peut compter sur l’attachement de Toki. Le lien fraternel qui les unit, la solidarité, vont les aider à affronter le quotidien. Pour les frères Dardenne : « (…) l’enjeu de notre mise en scène (était) de filmer l’entraide et la tendresse de cette amitié entre nos deux protagonistes, une amitié qui se manifeste et se développe jusqu’à l’extrême, jusqu’à la possibilité du sacrifice de soi pour sauver l’autre ».
Ce n’est pas le première fois que les réalisateurs (qui ont retrouvé Serain et ses environs, non loin de Liège) abordent le thème de l’exploitation et de la précarité des immigrés (La Promesse, Le Silence de Lorna, La Fille inconnue). Ce n’est pas la première fois non plus qu’ils font d’un enfant ou d’un adolescent l’un des principaux protagonistes de leur film, mais ceux-ci étaient toujours avec un adulte (La Promesse, Rosetta, Le Garçon au vélo), cette fois, ils réunissent les deux, et révèlent (comme le furent Jérémie Renier ou Emilie Dequenne) les surprenants Pablo Schils et Joely Mbundu, l’un et l’autre non-professionnels et qui effectuent à cette occasion leurs débuts à l’écran.
S’ils le présentent comme un film d’aventure, pessimiste, voire un film policier (genre qu’ils ont abordé dans Le Silence de Lorna), Tori et Lokita peut également se voir comme un documentaire (les Dardenne ont d’ailleurs commencé par le documentaire) avec une œuvre épurée, sans didactisme ni misérabilisme.
Un film sans surprise (encore que le thème des « mineurs isolés » – ou « enfants des rues » – soit peu traité), mais efficace et qui ne peut laisser insensible, comme très souvent avec les frères Dardenne.
Tori et Lokota de Luc et Jean-Pierre Dardenne avec Pablo Schils, Joely Mbundu, Alban Ukaj (Drame – Belgique/France – 1h28 – Date de sortie : à déterminer).
La Conférence de presse – Festival de Cannes (25 mai 2022 – VF – 37mn)
Jean-Pierre et Luc Dardenne – L’Invité de Patrick Simonin (TV5 Monde – 26 mai 2022 – 13mn).
Site officiel du Festival de Cannes
Le Festival de Cannes sur France.tv
Philippe Descottes