Cinéma / 75e Festival de Cannes (18 mai)

Sélection Officielle – En compétition.
La Femme de Tchaïkovski
de Kirill Serebrennikov (Drame – Russie,France,Suisse – 2h23)

Cannes 2022 - Madame Tchaikovski - K.Serebrennikov
La Femme de Tchaïkovski – Kirill Serebrennikov – Alyona Mikhailova – Crédit photo : DR

Le sujet du film : Russie, 19ème siècle. Antonina Miliukova, jeune femme aisée et brillante, épouse le compositeur Piotr Tchaïkovski. Mais l’amour qu’elle lui porte tourne à l’obsession alors que la jeune femme est violemment rejetée.
Consumée par ses sentiments, Antonina accepte de tout endurer pour rester auprès de lui.
En 1970, avec La Symphonie pathétique (The Music Lovers), Ken Russell, cinéaste baroque, mélomane (Mahler, Tommy, Lisztomania) et un rien provocateur, aujourd’hui pratiquement oublié, consacrait une biographie à Piotr Ilitch Tchaïkovski. Le biopic évoquait l’homosexualité du compositeur et l’échec de son mariage destiné à la cacher. Ce film avait marqué Kirill Serebrennikov qui s’est également intéressé à l’œuvre de son auteur. En 2012, le scénario que proposait le réalisateur (désormais exilé à Berlin après avoir été assigné à résidence) fut refusé par le ministre de la Culture russe car Tchaïkovski devait être hétérosexuel…
Comme le suggère le titre, le film est
avant tout le portrait de la femme du musicien, Antonina Miliukova (brillamment interprétée par Alyona Mikhailova. C’était Glenda Jackson dans la version de Ken Russell), celui d’une femme aimante qui devient démente, d’une épouse dans le déni.
Malgré des parallèles avec
La Fièvre de Petrov, les délires (de Petrov, ceux de la forme) sont proches de ceux de La Femme de Tchaikovski (la lente folie d’Antonia, les audaces dans la mise en scène), ce nouveau film, plus classique, est aussi plus accessible que le précédent. Peut-être moins exaltant que Leto et La Fièvre de Petrov, mais le travail de mise en scène (plan-séquence, chorégraphies) et sur la photographie (chaleur/froideur en intérieur, composition du cadre en extérieur) confirme tout le talent du cinéaste russe.
La Femme de Tchaïkovski de Kirill Serebrennikov avec Odin Lund Biron, Alyona Mikhailova, Ekaterina Ermishina (Drame – Russie/France/Suisse – 2022 – 143 minutes. Date de sortie : à déterminer)
Extrait de La Femme de Tchaïkovski (Vosta – 1mn16)
La conférence de presse (Festival de Cannes – 19 mai 2022)

Sélection Officielle – Un Certain Regard – Ouverture

Tirailleurs - Cannes 2022 - UCR.(1)
Tirailleurs – Marie-Clémence David © 2022 – Unité – Korokoro – Gaumont – France 3 Cinéma – Mille Soleils – Sypossible Africa

Tirailleurs de Mathieu Vadepied (Drame – France, Sénégal – 1h49)
En 1998, la veille de la remise de sa Légion d’honneur, mourait, dans un petit village du Sénégal, le dernier tirailleur sénégalais de la Première Guerre mondiale (1914-1918). 200.000 tirailleurs “sénégalais” (
mais venus de toute l’Afrique) ont combattu aux côtés des poilus. C’est en lisant un article du Monde relatant cet événement que Mathieu Vadepeid s’est senti investi d’une « mission » : raconter « ce qu’a pu être cette expérience pour des centaines de milliers de soldats enrôlés dans les colonies, afin de participer à une guerre à des milliers de kilomètres de chez eux, contre un ennemi inconnu. » Tirailleurs se situe donc en 1917. Bakary Diallo (Omar Sy), un paysan sénégalais, et son fils de 17 ans, Thierno (Alassane Diong) sont arrachés à leur village et à leur terre natale et enrôlés de force dans l’armée française. Ils sont envoyés en France, au front, près de Verdun.
Lors de la présentation du film, Omar Sy (également coproducteur) a repris cette formule d’un historien « 
on n’a pas la même mémoire, mais on a la même histoire.” Sauf que le cinéma français a mis bien du temps avant de commencer à aborder le passé colonial (en dehors du cinéma colonial, mélange d’exotisme et de propagande) et a longtemps occulté cette mémoire. Tirailleurs fait écho, 16 après à Indigènes de Rachid Bouchareb, présenté en compétition officielle à Cannes, sur des tirailleurs algériens (et marocains) pendant la Seconde Guerre mondiale. Le film de Mathieu Vadepeid repose sur la relation père-fils et l’idée de sacrifice, celui d’un père protecteur pour son fils (Omar Sy – qui parle peul – est parfaitement crédible sans pour autant voler la vedette à Alassane Diong, la révélation). Leurs rapports vont devenir conflictuels voire s’inverser. Bakary va tout tenter pour ramener son fils sain et sauf au village, mais celui-ci s’émancipe et devient un homme. Autre sacrifice, celui des Africains pour « la Patrie (peu) reconnaissante ». La Grande Guerre est bien présente. On voit à peine l’ennemi, mais les obus éclatent, les balles siffles, les ordres de la hiérarchie militaire et du haut-commandement sont toujours aussi stupides (prendre une tranchée ou une colline et la tenir ou, selon, la reprendre et la tenir), les pertes dans les rangs de cette chair à canon qui n’a rien demandé sont innombrables et inutiles mais le réalisateur évite le spectaculaire. Il rend également parfaitement compte du quotidien de ces soldats formés à la va-vite, qui ne comprennent pas toujours le français (et donc les ordres reçus) ni-même entre-eux (certains sont peuls, d’autres wolofs), auxquels on fait des promesses qui ne seront jamais tenues (« Après la bataille vous ne serez plus des indigènes, vous serez des Français »).
Mathieu Vadepied et Omar Sy avait déjà travaillé ensemble sur
Intouchables d’Olivier Nakache et Éric Todelano. Directeur de la photographie, Mathieu Vadepied est ensuite passé à la réalisation d’un 1er long métrage, La Vie en grand (2015), et d’épisodes de la série d’Arte, En thérapie.

Tirailleurs de Mathieu Vadepied, avec Oma Sy, Alassane Diong, Oumar Sey, Jonas Bloquet, Bamar Kane (Drame – France, Sénégal – 1h49 – Date de sortie : à déterminer).

Extrait du film (Gaumont – 1mn08)
Le Festival de Cannes sur France.tv
Philippe Descottes

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