Jusqu’au 15 mai, le Musée Masséna et la Ville de Nice proposent l’exposition « Mirkine par Mirkine : photographes de cinéma »

Robert Mitchum et Simone Sylva à Cannes en 1954, le même Robert Mitchum esquissant un pas de danse en costume sur une plage cannoise, Romy Schneider et Alain Delon, à Cannes en 1962, un certain Arnold Schwarzenegger montrant ses muscles sur la Croisette en 1977… Les photographies de tournage de Fanfan la tulipe ou de Et Dieu… créa la femme… Ces images en noir et blanc (et des milliers d’autres) qui demeurent gravées dans nos mémoires et illustrent un pan de l’Histoire du Septième art sont signées Léo et Yves (« Siki ») Mirkine (le père et le fils).
Intimement liés à la Ville de Nice et aux Studios de la Victorine, Léo et Siki Mirkine sont les témoins d’une grande époque du cinéma français.

Né à Kiev, Léo Mirkine est âgé de neuf ans en 1919 lorsqu’il embarque à Odessa avec ses parents qui fuient la Révolution russe à bord du Leopolis, un navire autrichien sous administration italienne. Après avoir transité par Constantinople puis l’Italie, ils arriveront et s’installeront à Nice. Diplômé des Beaux-Arts, il étudie également l’architecture à Paris. Mais il a une passion : la photographie. Il ne tarde pas à se tourner vers le cinéma. Tout d’abord comme assistant décorateur, avant de devenir photographe de plateau en 1932. Cette année-là, au studio de Billancourt, le futur directeur de la photographie Henri Alekan (Les Ailes du désir), un ami d’enfance (ils ont fréquenté le même collège à Nice), vient de débuter comme assistant opérateur. Il lui propose de rejoindre le tournage sur un autre plateau d’Un bœuf sur la langue, de Christian-Jaque qui a besoin d’un photographe. Léo Mirkine démarre sa carrière de photographe de plateau à 22 ans.
« L’œil rivé à l’objectif, chasseur d’un temps en suspension, acrobate précaire sur son fil d’acier pour qui chaque tournage est un nouveau défi. Il faut une parfaite stabilité pour capter l’éphémère avec virtuosité.
Cette virtuosité, Léo en dispose. Son charisme, son coup d’œil précis et singulier, sa façon originale de construire les clichés, sa capacité d’adaptation et par-dessus tout, son attention sincère à l’autre, font de lui un partenaire efficace et apprécié.
Rapidement, son savoir-faire et son aisance naturelle vont lui acquérir la confiance des acteurs, des équipes techniques et des réalisateurs qu’il côtoie. » (Stéphane Mirkine – Mirkine par Mirkine : photographes de cinéma)
En 1940, il ouvre un studio à Nice, « Tout pour le Cinéma et la Photo », alternant les reportages, portraits et incursions sur les plateaux voisins des Studios de la Victorine. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il rejoint la Résistance dès le début. Il facilite l’évasion de pilotes alliés et fait de son studio une boite aux lettres pour les mouvements de résistance, où sont réalisés photos d’identité et faux papiers.

En 1946, sa carrière prend une autre dimension avec le 1er Festival de Cannes (qui aurait du se tenir en 1939). Il va en assurer la couverture jusqu’en 1982 et largement contribuer à l’essor de ce nouveau rendez-vous mondial du cinéma. Comme c’était le cas avant-guerre, les magazines et les revues spécialisées continuent de se disputer ses clichés, mais maintenant ce sont aussi les délégations étrangères et les studios américains, comme Century Fox, Columbia, United Artists ou Warner Bros, qui le sollicitent. Pour la Télévision Française, associé avec Stellio Lorenzi, il tourne chaque jour un reportage qui est diffusé quotidiennement lors du journal télévisé.
Dès 1952, son fils « Siki » le rejoint sur le tournage de Fanfan la Tulipe. À la fin des années 60, le père lui passe le relais. Yves Mirkine a déjà fait ses preuves comme photographe de plateau (Christian-Jaque, Henri Verneuil, Roger Vadim, Jean Cocteau, Costa Gavras, Terence Young, Claude Autant-Lara, André Cayatte) mais il deviendra également l’assistant du réalisateur niçois Georges Lautner.

Les Mirkine, père et fils, ont toujours su garder leur indépendance, effectuant eux-mêmes tout le travail de laboratoire.
Aujourd’hui, c’est Stéphane Mirkine, la fille et petite-fille, qui conserve l’immense collection composée de 220 000 négatifs de ses grand-père et père, soit près de 200 films !

L’exposition Mirkine par Mirkine du Musée Masséna offre l’occasion de découvrir plus de 300 tirages (photographies de plateau, portraits), une reconstitution du Studio Mirkine du 88 rue de France, des œuvres originales et des archives inédites à travers une fresque immortalisant un demi-siècle du cinéma français.
Musée Masséna
65, rue de France – Nice
04 93 91 19 10
Tous les jours sauf le mardi de 11h à 18h
A voir
La filmographie de Léo et Siki Mirkine
Collection Mirkine – Le site officiel
Exposition Mirkine – France 3 (19/20 – Nice – Janvier 2022 – 2mn01)
Léo Mirkine par Stéphane Mirkine (France 3 Provence-Alpes-Côte d’Azur – 2019 – 2mn05)
A lire (et à voir)
Mirkine par Mirkine : photographes de cinéma (Stéphane Mirkine – Beau Livre chez Flammarion – 400 pages – 2022).
Remerciements à Caroline Martinaux, Elodie Lestrade et Jean-Pierre Barbero – Ville de Nice
Crédits photos : © Collection Mirkine – © P.Segrette Ville de Nice
Philippe Descottes