Cinéma / 74e Festival de Cannes (15 et 16 juillet)

Sélection officielle. En compétition

Memoria d’’Apichatpong Weerasethakul

CiaoViva - Cannes 2021 - Memoria
Memoria – Cannes 2021 – © Kick the Machine Films, Burning, Anna Sanders Films, Match Factory Productions, ZDF-Arte et Piano,

Onze ans après Oncle Boonmee et sa Palme d’or, Apichatpong Weerasethakul revient en compétition avec son 1er film tourné en dehors de Thaïlande (en Colombie) et avec des comédiennes connues (Tilda Swinton, Jeanne Balibar).
Écossaise en voyage en Colombie, botaniste spécialiste des orchidées, Jessica (
Tilda Swinton) séjourne à Bogota où réside sa sœur malade. Elle est tourmentée par un bruit qu’elle semble la seule à avoir entendu et qu’elle décrit comme une boule de béton qui tombe dans un puits de métal entouré d’eau…
« Voyage sensoriel », « expérience métaphysique », « quête mystique »… l’univers d’Apichatpong Weerasethakul n’a guère évolué même loin de sa terre natale. Maintenant avec une histoire succincte et de longs plans fixes, en fin de Festival, à un moment où les paupières deviennent de plus en plus lourdes et incontrôlables, il n’est pas certain que beaucoup de spectateurs seront en mesure d’apprécier cette invitation au voyage…
Dans
Oncle Boonmee, parmi les fantômes qui apparaissaient, on avait cru reconnaître un (ou des) cousin(s) de Chewbacca. Dans Memoria, on a bien vu un vaisseau spatial ! A ce rythme, dans 11 ans, on peut imaginer qu’Apichatpong Weerasethakul sera aux commandes d’une nouvelle franchise Star Wars.
Avec Tilda Swinton, Elkin Díaz, Jeanne Balibar. Colombie, Thaïlande, Royaume-Uni, Mexique, France. Drame -2021 – Durée 2h16.

France de Bruno Dumont

CiaoViva - Cannes 2021 - France
France – Bruno Dumont – Crédit photo : 3B

France de Meurs (Léa Seydoux) est la journaliste vedette d’I, une chaîne d’infos en continu. Présentatrice du JT, elle est aussi productrice et animatrice de l’émission Un Regard sur le monde. Si elle organise des débats sur le plateau, elle n’hésite pas non plus à partir sur le terrain, dans les zones de guerre ou en mer « avec » des migrants, pour mettre en boîte (et en scène) des reportages qui la mettent en valeur. Pour Lou (Blanche Gardin), son assistante, c’est du bonheur : chacune de ses interventions fait le buzz sur les réseaux sociaux ! France de Meurs est la star adulée des Français !
Depuis quelques années, avec Ma Loute et ses deux séries (P’tit Quinquin, en 2014, et Coincoin et les Z’inhumains, 2018), Bruno Dumont a eu recours, avec plus ou moins de réussite, à l’humour dans son cinéma. Il poursuit en partie sur cette voie et, cette fois, fait appel à des comédiens de renom. Dans sa première partie, le film est une comédie satirique sur le traitement de l’information par les chaînes en continu et sur les milieux (de la France d’en-haut) qui gravitent autour. Ça démarre plutôt bien par cette truculente conférence de presse avec Emmanuel Macron. Puis, le film bascule vers le mélodrame. Soit. Cependant, peu à peu, dans les deux parties, le projet est plombé par la caricature, la surcharge et les exagérations (comme l’accident de voiture). Sur plus de deux heures de projection c’est pesant.
En fait, dans le fond,
France n’est peut-être qu’une simple réflexion satirique sur le statut de Star d’aujourd’hui. Une star de cinéma également star de la mode.
Avec Léa Seydoux, Benjamin Biolay, Blanche Gardin. « Comédie » – France, Italie, Allemagne, Belgique – 2020 – 2h14. Sortie : 25 août.

Les Intranquilles de Joachim Lafosse

CiaoViva - Les Intranquilles - Les Films du Losange 02
Les Intranquilles – Joachim Lafosse – Crédit photo : Les Films du Losange / Stenola Productions

Leila (Leïla Bekhti – La lutte des Classes) et Damien (Damien Bonnard – En liberté !, Les Misérables) forment un couple de bourgeois bohèmes heureux. Elle restaure des meubles anciens, il est peintre et vit de son art. Avec leur fils Amine (Gabriel Merz Chammah, le fils de Lolita Chammah et le petit-fils d’Isabelle Huppert), ils passent leurs vacances à la mer. Leïla s’inquiète de voir Amine revenir seul de la baignade sans son père… Damien passe beaucoup de temps pour préparer un repas… Un peu après, en voiture, ils chantent en duo Idées noires (,,,), le tube de Bernard Lavilliers et Nicoletta
Dans leur maison, Damien  se lève la nuit pour peindre, en vue d’une exposition… Malgré ces quelques indices (et d’autres), le spectateur va mettre un certain temps pour comprendre que quelque chose ne va pas dans la tête de Damien, bien qu’il soit un mari aimant et un bon père. Il souffre de troubles bipolaires (ou psychose maniaco-dépressive). Pour ne pas perdre sa créativité, dit-il, il refuse de prendre ses médicaments. Leila doit être à la fois femme, épouse, mère et infirmière. D’où le pluriel du titre, ils sont intranquilles l’un et l’autre. Un titre qui vient également du livre du peintre Gérard Darouste, L’intranquille : autoportrait d’un fils, d’un peintre, d’un fou, une source d’inspiration de Joachim Lafosse.

Le père du réalisateur a été hospitalisé pour bipolarité. Aussi, le scénario est en partie autobiographique. Mais comme dans de précédents films, le cinéaste belge revient à ses thématiques et explore les méandres et les dérives au cœur des relations familiales, conjugales ou parentales. C’est la relation entre une mère et ses fils dans Nue propriété (2006), les difficultés d’un couple qui conduisent à un infanticide dans À perdre la raison (2012) et dans L’économie du couple ce sont deux époux séparés qui sont obligés de cohabiter sous le même toit. Continuer, son précédent film, repose lui aussi sur une relation mère/fils, cependant, contrairement aux précédents, il ne se déroule plus dans le cadre d’un huis-clos, mais dans de grands espaces.
La réussite du film est due à la mise en scène de Joachim Lafosse, mais elle doit beaucoup également à la qualité de l’interprétation des deux comédiens principaux (à laquelle il convient d’associer le petit Gabriel, étonnant par son naturel), à l’intensité de leur jeu (sans pour autant tirer sur la corde lacrymale), le fruit de leur implication sur le projet. En amont, Damien Bonnard a travaillé avec une analyste et un psychiatrie spécialisé, fait de la boxe et, ancien élève des Beaux-Arts, a repris la peinture avec Piet Raemdonck, pour créer quelques unes des toiles que l’on voit dans le film. Quant à Leïla Bekhti, outre son investissement physique, elle a enrichi son personnage par une relecture du scénario avant le tournage. L’aspect autobiographique en devient presque secondaire

Plus qu’un film sur la bipolarité (Damien pourrait tout aussi bien être atteint d’un cancer ou alcoolique), Les Intranquilles est un film sur l’amour et pose cette question : « jusqu’où peut-on aller par amour ? ». Avec Damien Bonnard, Leïla Bekhti, Gabriel Merz Chammah, Patrick Descamps. Drame – Belgique/France/Luxembourg – 2021 -118 mn)
Voir également :
La bande annonce du film (Les Films du Losange
2021 – 2mn)
La conférence de presse cannoise (Festival de Cannes
17 juillet 2021-40mn50)
Le site officiel du Festival de Cannes

Philippe Descottes

Publicité

3 commentaires

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s