Cinéma / PROMISING YOUNG WOMAN de Emerald Fennell

Une femme traumatisée par la violence et le harcèlement masculin dont elle et une amie ont été les victimes. Avenir et carrière brisés et une rencontre fortuite vont réactiver le trauma du passé qui se muera en irrépressible désir de vengeance. Le premier long métrage, au suspense haletant et surprenant, de la romancière et comédienne, interpelle sur le système patriarcal, les complicités et comportements qui lui permettent de perdurer. Le film a été récompensé par l’Oscar 2021 du Meilleur scénario original. Décapant !

Carey Mulligan (Cassandra) dans PROMISING YOUNG WOMAN de Emerald Fennell-Crédit Photo : a Focus
Features release.

Dans les premières scènes on découvre Cassandra ( Carey Mulligan ) qui, perdue, semble se vautrer dans la déchéance et sur laquelle on s’interroge sur sa « plongée alcoolisée » aux accents racoleurs attisant le désir des mâles en quête de proie facile !. La surprise qu’elle leur réserve, va pourtant donner le ton du récit provocateur à souhait qui multiplie les faux-semblants et surprises pour nous immerger dans cette sorte «  d’état second » de nôtre héroïne pouvant la conduire aux pires dérapages. Ceux dont les prédateurs se serviront , comme alibi pour se déresponsabiliser. La mise en place du mécanisme « prédateur », qui, pourtant va basculer de camp et s’habille dès lors, d’une interrogation interpellant le spectateur…sur les conséquences possibles d’une situation dont Cassandra provoque la mise en abîme et se met en danger . La subtilité de celle-ci qui se pare des habits de la comédie et du thriller , où violence et traumatisme sont au cœur du récit et d’un décryptage très subtil. Celui que la cinéaste a souhaité dépouiller d’un regard misérabiliste pour en faire éclore chez son héroïne la volonté de refaire surface et , au bout du compte être « prête à tout » pour effacer les cicatrices du trauma .La cinéaste revendique d’ailleurs à cet égard, les influences des Frères Coen ( Fargo) et Jonatha Demme ( Prête à tout) auxquels on peut ajouter, la virée de vengeance féminine de Quentin Tarantino ( Boulevard de la mort ). C’est en quelque sorte un cheminement d’exorcisme destiné à permettre à Cassandra se sortir de son « trauma », celui qui lui a fait abandonner ses études de Médecine et une carrière dans laquelle elle souhaitait s’épanouir . Mais le drame vécu a tout fait basculer , avec le suicide de sa meilleure amie. Rongée par le remord, l’opportunité de la recontre d’un « ancien » étudiant Ryan ( Bo Burnham) de médecine , va lui permettre de mettre en place un subtil mécanisme de vengeance comme palliatif possible, libérateur de son désespoir et de sa souffrance …

Désormais, encore plus déterminée à faire éclater cette vérité qui a été enfouie dans l’oubli et les méandres d’une sorte de réflexe sociétal collectif qui finit par releguer la gravité de l’affaire et du crime commis, au rang des « affaires classées ». Affaire pourtant au cœur de laquelle la responsabilité collective est engagée , c’est celle-ci qui est en en effet question et au centre du film. Le « plan » de Cassandra va se muer alors en une « traque » destinée à se venger et punir touts ceux qui , par tous les moyens ont réussi a échapper à la justice et se sont rendus coupables d’un autre crime , comme reflexe d’innocence : le sentiment d’irresponsabilité . Et pose la question: la perte de contôle au cœur d’une fête alcoolisée justifie-t-elle , la plaidoirie de l’irresponsabilité. ?, alors que c’est l’innommable qui s’y est déroulé!. !. C’est cette  » culpabilité » que Cassandra et le récit vont décrypter au cœur des séquences -très fortes -dont la cinéaste habille la détermination de son héroïne. Séquences auxquelles elle insuffle habilement l’inattendu dans le mécanisme du piège qui sera tendu à chacun des coupables . Le face- à -face au cœur duquel les preuves apportées de leur responsabilité est révélé , suivi par la surprise des mécanismes du piège de la Vengeance impitoyable avec laquelle Cassandra va les mettre au tapis, est jubilatoire !. . On ne vous révèlera rien de ses ruses et autres stratagèmes qui vont les mettre KO !. L’inventivité de l’écriture de ces séquences qui renvoient aux cinéastes cités plus haut, fait écho également à celle dont le mystère et la surprise des coups de Théâtre avec lesquels Bong Joon-Ho, nous scotchait à l’écran dans son Parasite !. L’écriture d’Emmeral Fennell, est d’autant plus efficace- ici- qu’elle inscrit son héroïne dans un vécu quotidien ordinaire d’une jeune fille, ou jeune femme ( Cassandra a 30 ans) qui s’y retrouveraient confrontées . A cet égard les références clins-d’oeil de la mise en scène qui y fait écho, en restituent superbement celui-ci par ses séquences  et sa mise en scène , où références vestimentaires et musicales s’inscrivent : «  je voulais décrire comment une femme ordinaire s’y prendrait dans la vraie vie pour se venger .. » , dit-elle.

Une scène de PROMSING YOUNG WOMAN, de Emerald Fennell. Credit Photo: Merie Weismiller Wallace / Focus Features

Et la déclinaison méticuleuse avec laquelle Cassandra en prépare les étapes est révélatrice de la détermination avec laquelle elle va mettre en place son plan pour tenter de retrouver tous ceux qui , de près ou de loin, se sont montrés complices et on joué un rôle dans le drame passé. C’est au cours de son enquête que , petit à petit, certaines éléments vont surgir et précipiter encore un peu plus ce qui se révèlera être la mise en œuvre orchestrée d’un déni collectif de protection. Habilement La cinéaste dont l’écriture du récit s’est faite avant que le mouvement « Me too » ne prenne l’ampleur que l’on connaît depuis, elle l’ avait imaginé et construit dans ce sens en pointant le poids millénaire du patriarcat et ce qu’il a induit comme réflexes collectifs , dont elle souligne qu’elle souhaitait mettre en lumière :«  la manière dont nous avons tous participé à cette impasse de laquelle nous devons sortir aujourd’hui!» , précise-t-elle . Cette responsabilité collective dont-au cœur de la mise en place de la vengeance de Cassandra et de ses victimes visées – on retrouve les exemples précis de cet héritage comportemental dont ils sont les symboles Vivants .A l’image de tous ces hommes des première séquences qui se proposent d’aider la jeune femme qui s’est enivrée …pour la ramener dans leur nid et en, profiter ! . Ainsi à cette soirée tragique du passé qui a conduit au suicide de sa meilleure amie, chacun sous l’emprise de l’alcool attisant les pulsions, a fini par se persuader et s’en dédouaner avec comme excuse , la «  perte de contrôle » . De la même manière que les autorités du lycée s’en réfèreront au « trouble » de mémoire alcoolisée rendant suspecte la suspicion de viol déclarée lors de la plante ! La cinéaste se réfère également aux réseaux sociaux qui s’en sont feront écho…où , manipulations, et autres jeux suspects se déchaînement en règlements de comptes d’inimitiés et jalousies … dont l’influence se répercutera sur les jurés du procès, et rejoindra ce «  sentiment d’impasse » , évoqué par la cinéaste . De cette impasse qui perpétue la violence sexiste , la cinéaste en brosse un portrait saisissant et décapant , que l’on vous conseille vivement !

PROMISING YOUNG WOMAN de Emerald Fennell – 2021- Durée : 1h 50-

AVEC : Carey Mulligan, Bo Burhman, Alion Brie, Connie Britton, Adam Brody, Jennifer Coolidge, Laverne Cox, Max Greenfield …

LIEN : Bande-Annonce du film PROMISING YOUNG WOMAN– Universal Pictures distribution.

https://www.youtube.com/watch?v=SxYdvg7SyJQ

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