La sortie en une version restaurée magnifque du chef-d’oeuvre du cinéaste Taïwanais et un événement. Cette fresque somptueuse sur les « lieux de plaisirs » du XIX éme siècle , nous invite à pénétrer les rituels, les rapports de séduction et de forces qui s’y jouent, portés par une mise en scène en plans-séquences, d’une beauté poétique et plastique envoûtante. A voir ou revoir , sans hésiter !…

Adapté du roman -feulleton de Han Ziyun, qui en faisait une descritption détaillée et quasi documentaire des lieux…dont il était, un habitué!. Le maître du cinéma Taïwanais en a respecté l’approche , lui dont ses films témoignent du soin « pointilliste » de son regard, sur les univers que son cinéma explore , où les détails des comportements au cœur d’un cadre , son atmosphère et ses lumières, y sont l’objet d’un ordonancement méticuleux. Tout y est assemblé afin d’offrir au spectateur une approche semblable à celle du tableau d’un peintre dont la découverte, nous immergerait au cœur de celui-ci, pour nous y inviter au voyage des mystères qui s’y révélent. Ceux dont la construction , ici , en plans-s’équences , comme autant de tableaux , nous entraîne dans le tourbillon du plaisir des yeux , semblable à celui procuré par la visité d’un musée . Ici, chaque plan-séquence révélant la découverte d’un nouvel aspect dont les souvenirs rassemblés au cœur de chacun , permet en les rassemblant de restituer la vue d’ensemble d’une époque et de cet univers particulier des « fleurs de shanghaï » ,ces lieux de plaisirs réservés à la haute société et à son élite masculine . C’est au cœur de la chine du XIX siecle et dans la concéssion Britanique de Shanghaï et ses quartiers de plaisirs échappant à l’interdiction , où la « crème » de l’élite se retrouve pour y goûter les plaisirs et autres distractions. C’est tout un art de vivre avec ses rituels qui s’y développent , ouvrant à la liberté des rapports sexuels masculins avec ces courtisanes, pouvant y devenir aussi les épouses légitimes, mais dépendantes , à la fois des clients fortunés qui les choisissent…et de la « patronne » des lieux , régnant en maitresse sur elles et récolte les fruits et l’argent de leur travail ! . C’est donc dans cet univers clos , ses usages et coûtumes, au cœur duquel , les rituels et les jeux de pouvoir et des rivalités se font jour . Révélant dans un décorum somptueux, le vertige vénéneux des rapports de dépendances qui s’y font jour . Le choc du décalage qui s’incrit au cœur de celui-ci , enrobé des volutes des fumées d’opium qui le tempèrent , y inscrivant admirablement, la cruauté qui s’y révéle ….

Celle qui se joue aussi au cœur des rituels qui scandent les séquences , à l’image de celui qui ouvre le récit réunissants les « clients » mascunlins autour d’un dîner, où nourriture , alcool et opium accompagnent les échanges verbaux et les jeux ( de Mah -jong ) en défis à la fois amusés et empreints de rivalités. Rituel, au cours duquel on présente aussi à l’occasion, les nouveaux venus , amis ou neveux et cousins destinés à s’y faire une place . D’autres nombreux rituels en forme de passages obligés y sont également présents , à l’image de celui des « transactions financières » avec les « matrones » des lieux, y sont incluses également dans le marché les femmes objet du désir et de soumission, dont la valeur de leur prestations est aussi , objet, de l’enjeu . De la même manière que l’est, le rituel de séduction auquel le candidat masculin doit se soumettre pour être accepté , en « client » privilégié ! . Parmi ces rituels certains participent à créer les rivalités féminines dont se fera écho, le clan des «favorites » attisant rancoeurs et jalousies . Désobeïssence et rebellion , pouvant conduire les fortes têtes, à un retour à la case départ qui donne à réfléchir et parfois peut conduire à un rejet définitf. De superbes séquences nous enraînent au cœur de ces tractations où l’argent est le nerf de la guerre de la domination et de la servitude . Le cinéaste en fait un portrait auquel , la beauté du décorum dans lequel les enjeux se déroulent , offre un saisissant et tragique reflet-miroir à la cruauté qui s’y révéle , amplifiée par la lenteur hypnotique de l’image qui l’envellope . Déchirants, ces plans de la jeune fille bléssée et désemparée , à qui la « matrone » repoche , son manque d’éfficacité et d’implication…dans les rapports avec les clients. l’engrenage de soumission que s’y joue ,est renforcé par la mise en scène , l’inscrivant dans le cadre luxueux des lieux , des porcelaines et autres objet de valeur que complète, un mobilier qui ne l’est pas moins . Le tout , nimbé dans un éclairage dont les nuances et richesses de couleurs , renvoient par leur ordonnancement un écho saisissant, aux rancoeurs qui s’y font jour. La perception du délitement inexorable, n’en est que plus forte au cœur de cette beauté …

C’est tout l’art de Hou Hsiao- Hsien qui fait merveille ici , y ciselant avec une finesse infinie dans le même cadre , beauté des corps et du décor, poésie des évocations et envolées lyriques . Puis celles, qui , subtilement y font surgir la noirceur du poison destructeur au cœur de la beauté des apprences . Le superbe exemple en est fourni par le récit des amours de Wang ( Superbe, Tony Leung ) le haut focntionnaire et client officiel de la magnifique Rubis ( Michiko Hada) aussi séduisante qu’elle peut se montrer, exigeante et dépensière . Wang qui partage , auusi , son attrait et sa flamme avec Jasmine(Vicky Wei ), la pensionnaire d’une autre « maison des fleurs » , dont il est également amoureux. Il faut dire que leurs charmes respectifs des deux créatures , feraient fondre de désir , bien des prétendants . Et justement… l’un d’entr’eux va faire le forcing et arrivera à ses fins , engendrant l’ire de Wang et ses coléres destructrices de mobilier. Scène étonnante de violence jalouse, se déchainant chez ce haut fonctionnaire respectable et séduisan , perdant contôle. Et d’autant plus futieux, que son rival est un jeune cousin , qu’il a introduit dans les lieux !. La déprime de Wang et sa violence complétée par la dramaturgie qui s’y inscrit admirablemenr , portraitise ces lieux des plaisirs de jadis par sa mise en images époustouflante de beauté et de poésie réunies, procurant un plaisir immense dont on savoure chaque instant de chaque plan, dont la rythmique nous fait basculer vers le voyage d’une contemplation visuelle vous emportant dans son tourbillon qui vous enveloppe, et vous entraîne dans ses arcanes. On vibre , on est scotchés à l’écran. Difficile de résiter ! , comme le relève Bertrand Bonnello : « du point de vue plastique ce film est hallucinant . Son rythme hypnotise.. » . Ce dernier , fan du cinéaste s’est inspiré de cette « beauté plastique » , pour l’insuffler à son : l’Appolonide : souvenirs de la maison close ( 2011 ) dont le beauté formelle de son regard sur le « théâtre » de la prostitution, est dans la lignée et digne du maître …
(Etienne Ballérini)
LES FLEURS DE SHANGHAI de Hou Hisoa-Hsien – 1996 – durée 130 Minutes –
AVEC : Tony Leung, Michéle Reis, Carina Lau, Michiko Hada, Jack Kao, Vicky Wei…
LIEN : Bande -Annonce du Film : LES FLEURS DE SHANGHAI de Hou Hsiao-Hsien – Carlotta Distribution –