Je me souviens …de Marie-Josée Nat bouleversante dans Amélie ou le temps d’aimer , Elise ou la vraie vie , les Violons du bal des films -phares d’une carrière qui eut son apogée dans les années 1960 /1970 , marquée par des grands rôles et films importants … elle s’est éteinte à l’age de 79 ans des suites « d’une longue maladie ».

Je me souviens qu’elle est née dans sa bonne ville de Bonifacio en corse où elle s’était retirée ces dernières années. Née le 22 Avril 1940 d’une mère bergère Corse et d’une père militaire Algérien d’origine Kabyle . Marie- Josée Benhalassa de son nom s’installera avec sa famille , ensuite à Ajaccio où très très vite elle est bercée par un rêve , celui de devenir actrice et déterminée décidera de partir à la conquête de Paris et de s’y faire un nom . Des débuts de mannequin de haute- couture ,et remarquée via les photos des magazines , elle est approchée pour figurer comme partenaire de Jean- Claude Pascal chanteur- comédien célèbre à l’époque , pour être sa partenaire pour un des magazines de Romans-photos, très lus à l’époque …
Je me souviens que c’est son partenaire qui lui trouvera ce qui deviendra son nom de scène , le « Nat » qui s’ajoutera en pseudonyme à son prénom , en référence aux longues « nattes » noires de ses cheveux . En ce milieu des années 195O , les jeunes prétendantes comédiennes se bousculaient et se faire une place au soleil n’était pas facile , mais elle s’accroche , passera par le célèbre cours Simon pour se préparer au défis qui l’attendent des premiers petits rôles par lesquels il faut faire l’apprentissage , et s’ouvrir les portes aux grands ! . C’est Denys De La Patellière qui lui en offrira l’opportunité , face à Jean Gabin dans Rue des Prairies (1959 )

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Je me souviens que dès lors la machine va se mettre en marche et consacrer son talent naissant qu’ Henri-Georges Clouzot ne manquera pas de mettre en valeur dans La vérité (1969) où face au mythe Brigitte Bardot , elle réussira le défi de la « sœur rivale » qui lui convoite Sami Frey !. Défi Gagné . La carrière de Marie -Josée est lancée , d’autant qu’une rencontre , une liaison et un mariage avec le cinéaste Miche Drach dont elle deviendra la muse inspiratrice , va la propulser à la notoriété …
Je me souviens que les années 1960/ 1970 , furent marquées par de nombreux rôles et films dont certains sont restés dans l’histoire du septième art et dans les mémoires des cinéphiles . Trois d’entr’eux :Amélie ou le temps d’aimer ( 1961) , Elise ou la vraie vie ( 1969 ) , les violons du bal (1973 ) en sont les magnifiques exemples où éclatent à la fois sa sensibilité d’interprète et son talent , ainsi qu’une implication dans des thématiques et des sujets sensibles et forts…
Je me souviens de la sensibilité qui enveloppe le portrait du vécu quotidien d’Amélie ,jeune provinciale orpheline recueillie par son oncle découvrant les difficultés de la vie et en quête d’épanouissement amoureux . Et puis, de cette histoire d’amour ( dans le contexte alors encore proche, de la guerre d’Algérie… ), entre la provinciale montée à Paris , y rencontrant cet ouvrier arabe et militant FLN . Elise ou La vraie vie , sujet « sensible » film courageux fustigeant le racisme, qui suscita une forte polémique . Et puis ,ces Violons du Bal dont les accents font écho autobiographique à l’enfance juive du cinéaste et ses souvenirs , où passé ( Guerre , occupation ) et présent se bousculent. Film bouleversant dans lequel Marie- Josée l’est tout autant, qui remporta alors sous les ovations Cannoises, le prix d’interprétation féminine !…

Je me souviens aussi que lors de ces années là , elle est tête d’affiche de nombreux films auprès des prestigieux partenaires ( Jean Sorel, Robert Hossein, Jean Marais , Jacques Charrier , Jean- Louis Trintignant, Jean-Claude Brialy, Victor Lanoux , Bernadette Laffont, Mireille Darc, jean -Pierre Marielle …) . Sous la houlette de cinéastes qui se bousculent pour l’avoir au générique : Gérard Oury( La menace ) , Alexandre Astruc ( l’éducation sentimentale ), André Cayate ( son dyptique sur La vie conjugale ), Claude Autant Lara ( le journal d’une femme en blanc ) , Ahmed Rachedi ( L’Opium et le bâton ), Michel Boisrond ( Dis-moi que tu m’aimes ) et même l’italien Aldo Lado ( La désobeïssance ) et la hongroise Marta Meszaros ( Une mère , une fille ) …

Je me souviens que Marie – Josée, décidera de prendre du recul et d’arrêter son activité de comédienne après le tournage du beau film fantastique , Litan (1981) de Jean-Pierre Mocky où elle est Nora troublée par un cauchemar qui va l’entraîner dans un tourbillon de folie. Elle continuera cependant à participer a des productions internationales comme le remarquable Train de Vie (1987) de Radu Mihaileanu , ou La nuit du Destin de l’Algérien Abdelkrim Bahloul la même année . Et acceptant aussi des fonctions de membre de Jury à des Festivals ( de Karlovy Vary ou Cabourg ) …
- Je me souviens encore , que, paraléllement au Cinéma , le théâtre a été un des terrains qu’elle a explorés . Elle y jouera sous la direction de Raymond Rouleau : virage dangereux de John Priestley, Médor de Roger Vitrac mis en scène par Maurice jacquemont , Désiré de Sacaha Guitry aux côtés de Bernadette Laffont et mis en scène par Jean- Claude Brialy , Voisin, Voisine de Jérôme Chodorov mis en scène par Pierre Mondy .. ou encore Avec ou sans Arbres de Jérôme Worms , dirigée par Albert-André Lheureux…
au centre : Marie -Josée Nat , scène de Les gens de Mogador – Crédit Photo : Petit- patrimoine.com-
Je me souviens aussi de ses prestations nombreuses sur le petit écran dans les téléfilms ou les séries. Parmi les téléfilms se distinguent notamment ceux prestigieux , signés Marcel Bluwal ( le mariage de figaro ) , Claude Barma (Hélène ou la joie de vivre), Stéllio Lorenzi et Alain Decaux ( Les Rosenberg ne doivent pas mourir ) , Peter Kasovitz ( fausses notes ), Nadine Trintignant ( Colette , une femme libre ) , Francis Girod ( l’oncle de Russie ) . Et parmi les séries ; la plus marquante restera le gros succès public : Les gens de Mogador réalisée par Robert Mazoyer, sans oublier : Terre indigo, Renseignements généraux ou Les marmottes …
Je me souviens qu’en 2004 elle a publié son autobiographie : Je n’ai pas oublié- désormais tu t’appellera Nat ( éditions Plon) . Et que sa carrière a été couronnée par de nombreuses distinctions officielles : Chevalier de l’ordre National de la légion d’honneur , Chevalier de l’ordre national du mérite , et commandeur de L’odre des Arts et des lettres … que complètent les distinctions décernées par la profession : en 1971, le Prix d’interprétation féminine de l’académie du cinéma pour son rôle d’Elise ou la vraie vie , et en 1974, le Prix d’interprétation Féminine au festival de Cannes pour son rôle dans Les violons du Bal .
Je me souviens de cette vie professionnelle bien remplie , qui nous a procuré tant de plaisirs et d’émotions fortes . On vous aimait beaucoup Madame , on aimait votre sourire , votre gentillesse et votre simplicité qui au delà de l’écran se distillait aussi dans les entretiens écrits, radio ou télévisés . Merci madame, le Paradis des comédiens, vous accueillera avec les honneurs que vous méritez . R.I.P .
(Etienne Ballérini )
LIENS : – entretien Michel Drach et Marie -Josée Nat sur le film : Elise ou la vraie Vie ( crédit : Document ina.fr )
–Festival des cannes 1974 : remise du prix d’interprétation féminine à Marie -Josée Nat pour Les Violons du Bal – ( crédit : Document Ina. fr )