Le cinéaste revisite le grand classique de Walt Disney. Images de synthèse, prises de vues réelles, nouveaux personnages. La magie reste intacte. En intégrant Dumbo dans son Univers, Tim Burton garde l’esprit du récit et le prolonge par une réflexion sur l’industrie du spectacle. Du grand Burton …

Personne n’ a oublié le petit éléphant aux grandes oreilles du DUMBO ( 1941) de Walt Disney devenu un Classique et grand succès mondial. Multi -diffusé sur le petit écran , son impact sur les enfants d’hier s’est poursuivi sur ceux d’aujourd’hui . Tim Burton qui a gardé son âme d’enfant et sa fascination du merveilleux, en est resté un, avec ses films et les personnages de monstres poétiques et attachants qui les habitent . Il ne pouvait que céder au plaisir d’apporter sa version modernisée du petit éléphant qui saura surmonter son handicap, celui que la nature lui a attribué, suscitant quolibets et rejet . Il sera séparé de sa mère, mais les enfants du cirque et de la balle indignés , Milie et son frère, décideront de le protéger. Et surtout de lui apprendre à faire de son handicap, une opportunité qui lui permettra de faire taire tous ces mauvais esprits étriqués qui le condamnent . Et si s es oreilles aussi grandes que des ailes pouvaient lui permettre de voler ?. Il deviendrait alors un phénomène que tout le monde voudra voir !. Le bestiaire du cirque n’est-t-il pas fait de ces personnages singuliers : femme à barbe et autres « freaks » que l’on donne en spectacle ?. Et un éléphanteau volant pourrait devenir une Star attirant la foule …et demander à ce qu’on lui ramène près de lui Madame Junbo, sa mère génitrice . Voilà le « deal » que Millie ( Niko Parker ) et son frère , Joe (Finley Hobbins ) vont mettre en marche, acharnement et entraînement intensif à la clé – aidés par une petite plume d’ange – afin de faire prendre son envol au pachyderme ailé !. La machine va se mettre en marche , et le succès va même la faire dériver. l’univers de Tim Burton , mettant lui en branle et en miroir, son regard scrutateur sur la frénésie mercantile du monde du spectacle qui va se déchaîner, pour acquérir la « star » qui fera ,décoller, leur monumental « parc d’attractions » et leurs profits !. Le conte, la comédie, le mélodrame et la satire , éléments réunis dans les films du cinéaste se retrouvent ici , une fois encore, au premier plan …

Tim Burton, tout en gardant la trame et l’esprit de l’oeuvre originale à laquelle les nombreuses séquences inspirées font référence ( l’initiation au vol de Dumbo, la séparation avec la mère , la mise marche et en image de ses premiers succès et de la chorégraphie du spectacle …) , auxquelles, Tim Burton intègre des éléments et personnages nouveaux , lui permettant d’ouvrir le récit à la réflexion. Le personnage du père, le contexte de l’après-guerre 14/18, les nouveaux entrepreneurs de spectacle , celui de l’écuyère… entr’autres . Le tout fonctionnant à merveille , offrant à la dimension du récit, la même densité que celle de la destinée de Dumbo , dont , le beau prolongement de la scène finale se fait l’écho. Celui conduisant , pour des fins mercantiles , à la maltraitance animale . De la même manière que la densité prise par les personnages ajoutés renvoie au fonctionnement d’une industrie du spectacle confrontée aux mutations du modernisme et des intérêts qui la gouvernent. La mise en abîme qui se développe au cœur du récit , où le cirque provincial de Max Médici ( Danny De Vito, génial ) et son Dumbo devenu Star , va attiser les convoitises des entrepreneurs sans scrupules ( Vandevere / Michaël Keaton , et skellin / Joseh Gatt ) de spectacles modernes, mus par la démesure spectaculaire, suscitant attrait , et donc profit !. Dès lors la dimension du spectacle à hauteur humaine devenant la proie d’industriels mercantiles qui le dénaturent, devient emblématique et symbolique de ce qu’est devenu l’art et la création artistique d’ aujourd’hui. La mise en abîme est magnifique , sublimée par les avatars que vont connaître les deux prédateurs, confrontés à la révolte des « ouvriers du spectacle » menacés de licenciement et disparition . Tim Burton , nous entraîne alors dans la dimension jubilatoire, offrant à leur détermination de survie ( reconquérir leur gagne-pain) et le désir de libérer de leurs griffes , Dumbo et sa mère , du sort qui leur est réservé . C’est le combat de David contre Goliath qu’il leur offre , en ouvrant leur révolte à la dimension apocalyptique des blockbusters, la mise à sac du parc d’attractions mégalomaniaque. Le clin d’oeil s’habillant , ici , une fois encore de la jubilation du triomphe des rejetés et des exclus , dont il poursuit ici, avec son Dumbo , le récit des destinées…

Et surtout l’habille de sa mise en scène remplie de références et inventive, toujours portée vers l’éloge de la créativité dont la préservation de la dimension artisanale est primordiale dans ce qu’elle transmet comme émotion et valeurs par la simplicité et l’authenticité ne spéculant pas sur la surenchère manipulatrice. C’est le parti-pris d’un cinéma et d’un art, s’appuyant sur la dimension humaine et la solidarité , celle dont il habille ici ses personnages complétant le récit original. Comme celui du père revenu de la guerre handicapé, jadis héros du cirque ( dompteur de chevaux) retrouvant ses enfants confiés à un ami après le décès de leur mère . Père et enfants se reconstruisant grâce à la famille du cirque . Et celui de la Trapéziste, Colette Marchant ( Eva Green , sublime) dont son compagnon ( l’un des prédateurs… ) la veut reine triomphante de son « Dreamland » juchée comme attraction supplémentaire , sur le dos de Dumbo volant. Beau personnage féminin confronté à l’emprise masculine, qui aura faire face et reconquérir sa dignité. Tandis que le « duo » des entrepreneurs du spectacle , compose un « duo » subtil au deux visages de prédateurs dont le cinéma de Tim Burton a souvent fustigé , les pouvoirs maléfiques
Tandis que le « duo » des entrepreneur du spectacle incarne les deux visages de méchants maléfiques où à la surenchère de l’un , fait écho, au reste d’humanité qui subsiste en l’autre . On retrouve également au rendez-vous, les références des maîtres de la littérature et du cinéma qui ont accompagné son enfance et modelé son inspiration créatrice dont le cinéaste aime habiller ses films. On retrouve dans les personnages de prédateurs la duplicité chère à l’auteur de Dr Jeckyl et Mister Hyde, dont le mise en scène de Dumbo s’habille des références cinématographiques. A L’image également du bestiaire de l’univers animalier et des monstres du cirque, renvoyant au Freaks, la monstrueuse Parade de Tod Browning (1932 ) , modèle du genre . Tandis que la chorégraphie ( notamment celle de la parade ) par ses figures géométrique fait écho aux films musicaux de Busby Berkeley . Ici , ce ne sont pas les super -héros qui triomphent et sauvent le personnel et les animaux du cirque en danger. C ‘est la dimension humaine d’un collectif qui s’y colle et qui se bat pour reconquérir sa dignité et son art artisanal respectant tous les acteurs du spectacle qui l’habillent par leurs talents diversifiés, de poésie pour faire rêver petits et grands. Pas besoin de sortir les grandes orgues et tout le barda monumental , pour que la magie opère !. Tim Burton le prouve , en utilisant dans son final les ingrédients et armes des faiseurs… pour les envoyer au tapis , KO. On jubile …
( Etienne Ballérini )
DUMBO de Tim Burton – 2019- Durée : 1h52-
AVEC : Colin Farrell Danny De Vito, Michael Keaton, Eva Green, Alan Arkin, Nico Parker, Finley Hobins , Roshan Set, Joseph Gatt, Sharon Rooney …
LIEN : Bande -Annonce du film , Dumbo de Tim Burton .
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