Harlem, dans les années 1970, la vie d’un jeune couple noir, va basculer suite à l’arrestation du jeune homme pour un délit qu’il n’a pas commis. Le roman de James Baldwin remarquablement adapté par le réalisateur révélé et oscarisé pour Moonlight (2017) , est un constat bouleversant sur la violence raciste et les préjugés instrumentalisés par la haine institutionnelle. Un film coup de poing ..
lls sont jeune et ils sont beaux, la couleur de leur peau est noire. Ils ont grandi ensemble au cœur de Harlem et au fil du temps la complicité d’enfance s’est déclinée en attirance amoureuse. Son ressenti qui finit par se concrétiser, par des gestes retenus et des moments de partage intense, que la promenade de la séquence d’ouverture du film décrit comme une ballade romantique dans les rues de New-York, puis au cœur de l’ espace naturel qui la prolonge . L’osmose de la nature et de la lumière qui l’irradie sublime ce rendez-vous d’automne où , le concentré de l’instant amoureux, les protège de son cocon . Magnifique séquence où Tish ( Kiky Lane) et Fonny ( Stephan James ) dont le cinéaste , en cet instant décrit la force de l’amour et la complicité qui les lie, celle qui va leur permettre de trouver les forces pour faire face à ce qui , bientôt, va les précipiter dans la tragédie. Le récit conduit par la voix-off de Tish, prenant la dimension d’un voyage dans l’espace-temps où s’entremêlent le souvenirs du passé et les tribulations du présent, est construit comme une puzzle où viennent interférer les éléments du combat que cette dernière et sa famille vont devoir mener, pour faire surgir la vérité. Celle d’un imbroglio juridique révélateur des compromis dans lesquels tout un système se retrouve impliqué afin d’accabler, Fonny . La « solidarité familiale », et le fort lien du couple va devoir faire preuve de ténacité pour tenter de faire éclater la vérité . Le combat de David contre Goliath au cœur des eaux troubles des compromis, du racisme et ses préjugés tenaces :« un noir, qui se retrouve en état d’arrestation est forcément un peu coupable! … ». D’autant que l’acharnement auquel nos amoureux , et tous ceux qui les soutiennent, ne fait qu’attiser encore un peu plus , celui des ségrégationnistes bien décidés, à les faire plier !…

Dans une scène-clé très forte, Daniel ( Brian Tyree Henry) l’ami de Fonny qui est l’unique témoin sur lequel repose l’ alibi prouvant qu’il était en sa compagnie à l’heure où a été commis le délit , définit admirablement les « clés » de ce qui se joue. Au cœur de cette séquence où les deux hommes se confient, ouvrant le débat sur l’engrenage du mécanisme évoqué ci-dessus , dont Daniel exprime , véritablement l’enjeu « ils ont tout fait pour me briser , me terroriser ! » , dit-il ,prévenant son ami de ce qui l’attend en prison . Daniel , arrêté lui aussi dans des conditions plus que discutables et condamné à deux ans de prison , sait que son témoignage en faveur de son ami, sera « récusé », pour cette raison. Le récit , au cours des flashs-backs , dévoile alors , le suspense « terrorisant » des rouages destinés à faire de Fonny, le coupable idéal. Celle des circonstances de son arrestation due au flic raciste décidé à se « payer » un black, jusqu’au faux témoignage auquel la victime manipulée , elle-même appartenant à une autre minorité ( Portoricaine) opprimée, va être poussée . La double oppression abjecte justifiant, ici , certains moyens de domination mis en œuvre par un pouvoir policier et judiciaire se retrouvant défié, par la détermination qui lui est opposée, et veut faire un exemple. Comme en témoigne la scène dans les salons d’une assemblée de personnalités réunies liées au fonctionnement de la justice ,où l on toise d’un regard réprobateur ce jeune avocat blanc , choisi par la famille de Tish, pour défendre leur cause !. De la même manière que , tous les arguments utilisés par les défenseurs des droits civiques, vont se voir opposer la virulence des machinations de certains procureurs et autres magistrats réactionnaires, complices. Bref le combat de la famille de Fonny , qui soulève bien des questions sur le « déni » de justice , va déclencher des réactions virulentes et des répercussions qui le seront tout autant, pour la famille de Tish, subissant toutes les pressions et harcèlements possibles pour entraver son combat…


( Etienne Ballérini )
SI BEALE STREET POUVAIT PARLER de Barry Jenkins – 2019- Durée : 1h59 .
AVEC : Kiki Layne , Stephen James, Regina King , Regina King, Colman Domingo, Teyonnah
Parris, Michaël Beach, Aunjanue Ellis , Ebonie Obsdian, Diego Luna , Dominique Thorn …
LIEN : Bande-Annonce du film: Si Beale Street pouvait parler, de Barry Jenkins
[…] de la mise en scène de la Sélection cannoise Un Certain Regard. Ciné+ Club à 20h55. Jeudi 21 Si Beale Street pouvait parler de Barry Jenkins (2018 – 2h00). Au début des années 1970, dans un quartier populaire de New […]