Le quotidien d’une jeune médecin pneumologue qui va voir ses convictions vaciller lorsque sa mère est admise dans un service proche du sien dans l’hôpital où il exerce. Premier long métrage du cinéaste où- réalisme et fiction en osmose- tissent une dramaturgie très maîtrisée . Un premier grand film, à voir sans hésiter…

Simon ( Jérémie Renier, parfait) est un médecin consciencieux et aguerri, soucieux de la déontologie, et aux compétences reconnues , sachant maîtriser ses émotions dans les conditions difficiles d’un quotidien qui nécessite, de savoir faire la part des choses. Rigueur et maîtrise des émotions , écoute et explications aux patients permettant de canaliser leurs peurs et craintes dans un contexte de fragilité dû à leurs maladies et (ou ) longueur des soins qui les inquiètent et peuvent avoir des répercussions négatives. Les première séquences du film sont à cet égard significatives dans la description réaliste de certains exemples cités au cœur d’un cadre quotidien ou chacun – à sa place- doit assumer ses responsabilités et avoir la maîtrise du jugement et les réflexes permettant d’intervenir à bon escient en cas d’urgence , ou réaction, d’un patient pouvant avoir des conséquences négatives à son hospitalisation. Le réalisme qui s’attache à décrire le quotidien de cette institution et ces malades pris en charge , nous entraîne aussi dans ses coulisses où l’on décompresse lors des pauses et où le relationnel des personnels s’inscrit dans sa diversité , y compris celle des affinités ou des rapports hiérarchiques . Belles séquences qui vont permettre de prendre la température de l’envers d’un décor où le stress du travail se conjugue en défouloir (repas en commun, pauses -plaisanteries, et autres fêtes improvisées…) ou parfois, en retraits solitaires à l’image de ces couloirs de sous-sol dans lesquels Simon parfois , s’isole en solitaire, ou accompagné de son « pote » infirmier , pour tenter d’évacuer le stress, avec l’aide des volutes de fumées partagées, d’un joint…

La force des ces séquences qui nous immergent dans le cadre d’un univers , l’hôpital , sur lequel les succès de certains films et séries, ont désormais ouvert le regard du public sur un univers, son fonctionnement et ses problématiques liés aux soins d’urgence des blessures , mais aussi , à la maladie et à la mort. mais aussi à leur fonctionnement conditionné par le contexte économique et les difficultés( manque de personnel…) qui y sont liées. Le cinéaste , David Roux , qui vient d’une famille de médecins et les connaît bien, a souhaité dit-il , « expérimenter » une vision plus personnelles sachant que le contexte de fonctionnement cité ci-dessus a été traité notamment par les films de Thomas Lilti ( Hippocrate, Médecin de Campagne…), avec brio. Il s’est dès lors, immergé dans l’univers quotidien de son frère médecin Pneumologue en soins intensifs , pour construire le personnage de Simon au cœur du « réel » duquel, il y inscrit la fiction de l’intime , auquel ce dernier va être confronté. C’est l’hospitalisation de la mère de ce dernier – incarnée par la grande Marthe Keller) à laquelle il va être confronté , qui va bousculer la donne « Alors qu’il faisait ça tous les jours, tout d’un coup, dans cette situation, avec notre mère si mal en point, ce n’était plus pareil. Il y avait là, dans ce choc entre le professionnel et l’intime, quelque chose d’abyssal », explique le cinéaste. Et c’est ce « vécu » là, qui va devenir le cœur émotionnel du récit et du film. Les étapes vécues par le cinéaste avec son frère, deviennent celles d’un constat passionnant, empreint d’une gravité et d’une force incroyable. Minutieusement décrit,l’itinéraire de ce qu’il déclenche , des choix intimes et des combats que Simon- devenu fils avant tout – va prendre ses distances et devoir se livrer en prenant la décision ( un incident l’y aidant)de la « distance » d’un congé , afin de se consacrer à a mère . Prenant, à l’occasion, quelques libertés qu’il se refusait avant , afin de tout mettre en œuvre pour soigner sa mère . Le regard du cinéaste les transcrit , lui , avec la justesse exceptionnelle d’un récit frontal et d’une mise en scène qui l’accompagne , où l’intime du combat s’inscrit . Le professionnalisme de Simon et sa déontologie, confrontés au vécu intime de la maladie de sa mère, qui le déstabilisent . La matière du film et sa dramaturgie , en étant irriguées…

Dés lors, le spectateur invité à suivre dans l’intimité les bouleversements et épreuves de Simon et sa famille , s’y retrouve d’autant plus impliqué qu’il s’agit d’un « vécu » auquel tout un chacun, un jour ou l’autre, va devoir affronter. La force du film est là , qui bouscule le spectateur sur la perception d’un ressent , qui, forcément l’interpelle sur ce que seraient dans le même cas de figure, ses propres réactions . Sa force est aussi dans ce qu’elle dit de chacun des personnages directement ou indirectement impliqués . Elle est encore dans les interrogations qu’elle soulève,que l’on peut -ou pas- partager , ou encore , dans l’ évasion défouloir ou ces refuges ( intimes?) dans lesquels , on est amenés à se protéger, ou cacher sa douleur . La double symbolique des couloirs du sous -sol , devenant l’espace mental d’un chemin et d’un itinéraire personnel . Tous ces ressentis et itinéraires dont le récit est irrigué sont d’une force et d’une authenticité exceptionnelle . Le portrait de groupe , des personnels soignants et celui de la famille , l’est tout autant par ses petites notations et détails intimes , admirablement traduits par l’ambiance, au réalisme très soigné de la bande sonore les accompagnant signée, Jonathan Fitoussi. A laquelle s’ajoutes quelques chansons partie de la bande musicale de la vie des protagonistes, illustrée entr’autres par le magnifique et bouleversant « Melocoton » de Colette Magny, et les mélodies Yiddish, qui viennent magnifiquement , raviver les souvenirs du passé de la mère . On peut y ajouter, aussi , les beaux portraits de certains personnages, au delà de celui de la mère, faisant le choix de son destin de fin de vie avec une joyeuse et magnifique dignité . Et comme l’est celui du père déboussolé par la perte de l’amour de sa vie , s’indignant de l’injustice : « elle était plus jeune que moi, j’aurais dû partir avant elle ! » . Ou , encore , celui de la sœur de Simon, Julia ( Maud Wyler ) dont le « lien » intime frère/soeur, irrigue le récit de cette solidarité familiale si précieuse en ces circonstances . A laquelle s’ajoute l’indéfectible amitié du « pote » ( Frédéric Epaud ) l’infirmier , et celle , solaire et au fort tempérament d’Agathe ( Zita Hanrot) l’aide -soignante …
David Roux signe et premier long métrage très maîtrisé , fort , attachant et bouleversant . Un grand film , qu’il faut vous précipiter , à aller le voir en salles !…
(Etienne Ballérini)
L’ORDRE DES MEDECINS de David Roux- 2019- Durée : 1 h 33-
AVEC : Jérémie Renier , Marthe Keller, Zita Hanrot, Alain Libolt, Maud Wyler, Frédéric Epaud…
LIEN : Bande- Annonce du Film L’ORDRE DES MEDECINS de David Roux.
[…] 27– L’Ordre des médecins de David Roux (2019 – 1h29).Drame. Simon est un médecin aguerri. L’hôpital, c’est […]
[…] avec Toni Servillo, Alessio Boni, Lorenzo Richelmy, Galatea Ranzi. Ciné+Premier à 18h45 – L’ordre des médecins de David Roux (2017 – 1h30).Simon, 37 ans, médecin aguerri, côtoie la maladie et la mort tous […]
[…] une expérience traumatisante à l’hôpital, Nour (Zita Hanrot, vue dans Fatima et L’ordre des médecins) est embauchée comme infirmière chez Arkalu, l’usine chimique où travaille depuis près de […]