Un collège privé ,en apparence tranquille, une classe d’élèves surdoués , mais au comportement étrange harcèlent leur professeur. Le second long métrage du cinéaste de irréprochable (2016) aborde , sous la forme du Thriller, le sujet du malaise d’une certaine jeunesse au cœur du système éducatif et de la société. Sombre et terriblement efficace !...

D’emblée la séquence d’ouverture donne le ton avec cette classe d’élèves rivés sur leurs cahiers en plein exercice de composition, sous la surveillance de leur professeur. Soudain le calme apparent est rompu par le geste inattendu du professeur …qui se jette par la fenêtre !. Incompréhension totale des élèves affolés et des enseignants .Une cellule psychologiques est installée. Le professeur remplaçant, Pierre ( Laurent Lafitte ) qui prend la relève prévenu des conditions qui l’ont amené au collège, il y est accueilli avec réticence et méfiance par les élèves. il y voit d’abord les conséquences du « choc » suscité par le suicide de leur professeur, et se montre compréhensif . Jusqu’au moment où les choses prennent une dimension inquiétante. Adapté du roman de Christophe Dufossé (2002 ) dont le cinéaste dit avoir été frappé par l’approche et la description dont l’auteur se faisait l’écho des motivations mystérieuses et irrépressibles qui poussaient les élèves , à une forme de révolte violente , aux accents suicidaires . Celle-ci faisant écho au malaise d’une société en pertes de repères dont leur mal-être et leur hostilité sont révélateurs d’une certaine forme de désenchantement envers un futur, où ils ne voient par s’inscrire leur avenir. C’est celui-ci que la mise en scène , toute en subtilités , installe dans l’esprit du spectateur intrigué par les non-dits et (ou ) les comportements des élèves dont le cinéaste irrigue en crescendo , les séquences où les rapports entre le professeur et ces derniers ne cessent de se tendre en une forme d’harcèlement, en même temps que s’y inscrit , une forme de fascination (ambigue?) curieuse du professeur cherchant à comprendre les raisons, de leur comportement …

Le beau travail sur le suspense où la paranoïa s’installe , y trouve un écho d’autant plus éfficace qu’il est ancré dans le réel . Brassant les thèmes du harcèlement et de la provocation auxquels s’adonnent les élèves , jouant avec les nerfs du professeur ; mais aussi un certain contexte sociétal dont l’exercice d’alerte- attentat, est révélateur d’ un certain climat de peur, complété par un désenchantement envers le futur . Petites phrases assassines et multiples provocations enrobées d’hypocrisie habilement dosées créant le malaise . Le professeur déstabilisé se retrouve souvent en porte- à- faux, lorsqu’il se confie à ses collègues, ces derniers cherchent à minimiser ( par crainte de s’y retrouver eux aussi , soumis?) les incartades de ces surdoués rebelles . Peut-être, d’ailleurs ces derniers manifestent-ils , une forme de suffisance , à l’image de leurs représentants de classe , en donneurs de leçons ,défiant les gamins de autres classes comme les adultes donneurs de leçons . Le professeur agacé de les voir jouer avec ses nerfs va les défier , se muant en détective il va les suivre à distance surveillant leurs sorties et réunions à l’extérieur de leur établissement . Des rendez-vous mystérieux où se succèdent jeux dangereux et pratiques aux accents sectaires filmées par leurs soins ( référence à certains vidéos-choc du genre , postées sur les réseaux sociaux…) . C’est la belle idée du récit qui inscrit la vraie nature du malaise d’une jeunesse qui n’ a plus foi en l’avenir qu’on lui réserve dans un monde dont les images ( catastrophes climatiques et autres violences faites aux animaux , guerres , attentats ,violences urbaines et crimes en séries ou xénophobes , fusillades dans les écoles …) qui sont ( font) leur cauchemar quotidien , et celui d’un monde et de son chaos dans lequel ils ne se retrouvent plus. On vous laisse découvrir l’habile suspense , dans lequel le cinéaste nous plonge jusqu’au final -magnifique- offrant la vraie mesure de leur ressenti …

La force du film est dans le mystère soigneusement entretenu dans lequel le cinéaste nous immerge à coups de rebondissements concoctés par le groupe des Six surdoués, , mais aussi par la précision d’une écriture cinématographique dont la forme ( son , Musique du Groupe Zombie Zombie, montage , ellipses , énigmes restant ouvertes …et une interprétation magistralement dirigée dans laquelle les jeunes comédiens -, sont au diapason des professionnels ) du réalisme dans lequel sa dynamique et son formalisme revendiqué , renforce l’apparente écriture classique dans laquelle elle s’inscrit, avec ses références cinématographiques ( Le village des Damnés de Wolf Rilla – 1960 ) auquel le comportement énigmatique et calme , ici aussi des collégiens, renvoie. Ou encore, à ceux du Ruban Blanc (2009 ) de Michaël Haneke, références assumées par le cinéaste. De la belle ouvrage, Sébastien Marnier ,signe un second long métrage dont le constant mystère qui irrigue le récit est fascinant et anxiogène. A voir …
(Etienne Ballérini)
L’HEURE DE LA SORTIE de Sébastien Marnier – 2019- Durée : 1h 43.
AVEC : Laurent Lafitte , Emmanuelle Bercot, Gringe, Grégory Montel, Pascal Greggory, Luana Bajrami, Victor Bonnel, Véronique Ruggia Sauta , Thomas Scimeca, Adèle Castillon, Matteo Perez, Thomas Guy, Leopoald Buchbaum….
LIEN : Bande-Annonce du film , L’ Heure de la sortie de Sébastien Marnier.
[…] vraie. Le film a été présenté à Cannes, puis à Deauville. Ciné+Club à 20h50 Lundi 29 L’Heure de la sortie de Sébastien Marnier (2018). Les élèves surdoués d’un collège harcèlent le professeur […]