Cinéma : EDMOND d’Alexis Michalik .

« Edmond » d’Alexis Michalik , une pâle copie au cinéma du chef d’oeuvre théâtral éponyme.

Supposons un auteur contemporain écrivant un « quelque chose » ayant pour sujet un auteur de théâtre du XIX siècle s’escrimant à écrire en alexandrins, sans succès, et amené – voire condamné- à écrire un succès , à monter , sauf le rôle principal, une troupe composé de bric et de broc, ou peu s’en faut, à écrire ce supposé succès à toute allure et à répéter à peine l’encre de l’acte tout juste écrit sèche. Au fait, combien d’actes ?
Il me semble que ce « quelque chose » ne puisse être que du théâtre, le sujet et sont objet étant indissolublement liés. Et c’est ce qu’a réussi – parce que c’était du théâtre – avec Edmond, d’Alexis Michalik vu au TNN en octobre 2017. Alors, qu’est-ce que cet Edmond  – là ? Bien sûr, l’on pense immédiatement à Edmond Rostand et tout naturellement à Cyrano de Bergerac. Et l’œuvre se présente comme les prolégomènes qui ont amenés à la première, le 28 décembre 1897 au Théâtre de la Porte St Martin : aussi bien l’écriture, les répétitions, et le « contexte » socio- culturel de l’époque.

Emond Rostan (Thomas Soliverès ) et  Léo Volay (Tom Leeb) – Crédit Photo : Gaumont Distribution-

Or Alexis Michalik voulait initialement en faire un film, ce que lui avaient déconseillé des gens de bon conseil et de bon voisinage. Sans doute les mêmes gens de bon conseil et de bon voisinage, qui au vu du succès de la pièce de théâtre lui ont ouvert grandes les portes de ce qu’il désirait faire initialement, un film, pressentant l’odeur de l’argent. Hé oui, par ailleurs, le cinéma est –avant tout- une industrie.
J’allais donc ce mercredi 9 janvier à la première séance voir Edmond. Je n’y ai pas été déçu parce que je savais qu’une œuvre qui ne peut qu’exister que sur une scène ne peut fonctionner au cinéma. Comparaison n’est pas raison, dit la sagesse populaire. Dans ce cas ci, oui, car je compare deux opus écrit et mis en scène par le même auteur.
C’est-à-dire qu’outre ce présupposé ontologique, tout ce qui justement faisait la subtilité de la théâtralisation de cet accouchement d’un chef d’œuvre du théâtre était passé à la trappe. Question décors, ah çà, il ne manquait pas un bouton de guêtre. Mais le Michalik metteur en scène qui savait susciter d’un tour de clé ambiances et lieu cède la place à un bêtement illustratif réalisateur du même nom.

Constant Coquelin ( Olivier Gourmet )- Crédit Photo : Gaumont Distribution-

J’écrivais dans ces colonnes à propos de la pièce : On peut dire de la pièce qu’elle se construit comme une mise en abyme. La force de l’écriture est que, au commencement de chaque séquence, nous hésitons à tenir de savoir dans quelle typologie de récit nous sommes, dans quelle mise en récit –que les journalistes respectueux de la langue française appellent le « story telling » – nous nous situons, comment les structures narratives se mêlent, s’emmêlent.
Encore une fois, loin de moi l’idée de récuser le fait que le cinéma puisse s’emparer du cinéma. Regardons la merveille qu’est le Henry V de Kenneth Branagh, tiré, inspiré de la pièce de Shakespeare : il s’agit là du passage d’un langage à un autre langage.
Las ! Ici point d’affaire. C’est du théâtre et en même temps- comme dirait l’autre – du cinéma, à croire que ce film est réalisé par un tâcheron, et non Michalik lui-même. Un exemple ? J’écrivais, à propos du contexte de l’époque : Ce qui nous vaut un magnifique anachronisme puisque nous entendons les répétitions du Boléro de Ravel, qui, comme nul n’en n’ignore a été composé en 1928. Or, qu’este ce le Boléro sinon une immense répétition d’un même thème aboutissant à la modulation finale, c’est-à-dire la représentation ?.

Marcel Floury (MarcAndreoni)  et Ange Floury ( Simon Abkarian )- Crédit Photo: Gaumont Distribution-

Hélas ! Hélas ! Trois fois hélas ! – comme dirait un autre- le subtil et pertinent metteur en scène cède la place à un triste illustrateur : Le Boléro est juste entendu dans la bande son. Mais pour bien signifier que nous sonnes au cinéma et non au théâtre, le couvent du cinquième acte est devenu un cloître plus du tout théâtral, donc pour bien signifier qu’on est au cinéma et non au théâtre. C’est un peu court, jeune homme.
J’écrivais également : Et encore une fois, ce n’est pas parce que la pièce nous donne à réfléchir qu’elle ne nous donne pas à nous divertir (l’inverse est également vrai). Le donner à réfléchir n’est pas dans cet Edmond film.
On me dira : Vous dites ça parce que vous avez-vous avez vu la pièce, songez à ceux qui découvrent ce film sans avoir vu la pièce ! J’y songe, justement, j’y songe. Je pensais trouver un translation, je ne trouve qu’une inutile adaptation…

Jacques Barbarin.

EDMOND d’ Alexis Michalik – 2018- Durée : 1h 50.
AVEC : Thomas Soliverès, Olivier Gourmet, Mathilde Seigner, Tom Leeb, Lucie Bougenah, Alice De Lenquesaing , Clémentine Célarié, Igor Gotesman, Dominique Pinon, Simon Abkarian,…
LIEN : Bande Annonce du Film , EDMOND d’Alexis Michalik

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