Je me souviens que la veille de ton grand sommeil, tu étais en concert au Bal Blonnet, à Paris . « Mais… Le cœur quand ça bat plus c’est pas la pein’ d’aller/ Chercher plus loin faut laisser fair’ et c’est très bien (Avec le temps, Léo Ferré)
Je me souviens que t’es né dans une famille musicienne, en 1956, ton père instituteur est aussi professeur de violon, ta mère est peintre amateur, tandis que ton frère ainé Francis deviendra pianiste de jazz. Le jazz…
Je me souviens qu’on te présente comme un violoniste de jazz mais t’es mille fois plus que ça. Pour Catherine Lara, tu avais » une approche du jazz qui était extrêmement ouverte, et qui donnait aux gens l’envie d’aimer le jazz ». T’étais un artiste qui donnait aux autres le goût aux autres de son art. Quelqu’un qui donne le goût aux autres. Des comme ça, y en a pas lerche…
Je me souviens ton nom aux accents british, vient de ta famille paternelle, originaire de Birmingham et que les groupes de musique Blak Sabath, Spencer Davis Group, Led Zeppelin, Moody Blues, Electra Light Orchestra… viennent de Birmingham. Ca pulse dans le Straffordshire…
Je me souviens que, en 1972, tu obtiens les premiers prix du conservatoire de Calais et de musique contemporaine de la Sacem pour ta composition pour violon préparé.
Je me souviens que uu te fais remarquer se fait remarquer par Stéphane Grapelli qui lui propose de l’accompagner dans ses tournées. Tu es ensuite invité par Dave Brubek et tu commences une carrière solo.
Je me souviens que, en 1985, tu obtiens une Victoire de la musique.
Je me souviens de ton implication pédagogique et que tu publies une méthode d’improvisation – l’un de tes maître-mot- d’intitulée Cordes et âmes (prix Sacem 2002), et que tu crées en 2001 à Dammarie-les-Bains ton école d’improvisation.
Je me souviens que, avec ton épouse Caroline Casadesus, (soprano lyrique, fille du chef d’orchestre Jean Claude Casadesus, petite-fille de l’’actrice Gisèle Casadesus)) tu partages l’affiche pendant quatre années dans le spectacle musical Le Jazz et la Diva, qui se termine par un triomphe à Cannes, au Palais des Festival et des congrès, le 20 juillet 2008.
Je me souviens que, en 2013, tu participes à la semaine du jazz français au Jazzhus Montmartre à Copenhague Le Jazzhus Montmartre est un des hauts-lieu du jazz, club fondé en 1954. Y ont joué Albert Ayler, Chick Choréa, Gil Evans, Herbie Hancock, Abdullah Ibrahim, Gerry Mulligan, Oscar Peterson, Michel Petrucciani, Sonny Rollins…
Je me souviens que tu étais en fraternité avec Richard Martin, le directeur du théâtre Toursky à Marseille, et que tu l’as accompagné dans son Odyssée pour la Méditerranée
Je me souviens que j’étais au Toursky le 5 décembre 2017. Richard Martin y accueillait ses « frangins » : Toi, Levon Minassian (musicien, joueur de duduk, instrument de musique arménien à anche double, comme le hautbois) la chorégraphe Marie Claude Pietragalla.
Je me souviens que cette soirée, c’était un esprit de solidarité pour soutenir ce lieu dont l’âme de poètes disparus règne encore et encore, à l’égard de Richard Martin et de ses amis artistes qui offrent leur talent pour prospérer à la pérennité du lieu.
Je me souviens que c’était avant tout un geste d’amitié, d’amour envers Richard Martin que Marie-Claude Pietragalla, Levon Minassian et Didier Lockwood sont venus apporter lors de cette soirée de soutien, habitués à ce théâtre qui les a accueillis régulièrement lors de leurs spectacles précédents, ils sont venus main dans la main, de manière spontanée et non réfléchie.
Je suis sûr que depuis ce funeste 18 février RichardMartin, ses « frangins », le Toursky, tous ceux-là doivent se sentir bien « soulet » (seul en niçois)
Lorsque l’on te voyait penché sur ton violon, le regard mi-clos et la main guidant la danse folle de l’archet sur les cordes, on aurait te croire seul au monde avec « ta » musique. Quelle erreur c’eût été ! S’il y eut un homme profondément, largement, constamment ouvert aux autres, c’était bien toi. (Emmanuelle Giulieni La croix)
Oui, ton violon doit se sentir bien seul, Didier Lockwood. Une crise cardiaque et… Le cœur quand ça bat plus c’est pas la pein’ d’aller/ Chercher plus loin faut laisser fair’ et c’est très bien
Pour toi, Richard. Pour le Toursky.
Jacques Barbarin