Cinéma/ L’APPARITION de Xavier Giannoli.

Une jeune fille affirme avoir vu la vierge. Miracle, ou imposture ?. Un journaliste est sollicité pour un enquête canonique à la recherche de la vérité . Une passionnante plongée dans l’univers de la foi et de la religion, avec ses brebis murées dans leur foi et croyances …

Au retour d’un reportage de guerre d’où il revient traumatisé , son meilleur ami y ayant perdu la vie , Jacques ( Vincent Lindon ) est sous le coup de la sidération des horreurs vécues , que prolonge une perte momentanée d’audition, séquelle due aux bombardements. Pas encore totalement remis de ses blessures psychologiques, le voilà sollicité par une étrange et pressante demande venant des autorités ecclésiastiques. Ces dernières , apparemment très renseignées sur l’intégrité de son travail ont décidé de le contacter, pour lui demander d’apporter un regard extérieur . Perturbés par l’ampleur d’une affaire « d’apparition » dans une petite ville du Sud-Est de la France qui voit affluer des milliers de pèlerins venant se recueillir sur les lieux où , une jeune fille , Anna ( Galatéa Bellugi ) qui affirme avoir vu la Vierge, est devenue l’objet de dévotion et d’adoration. Les autorités publiques ont de plus en plus de mal à faire face à l’afflux de pèlerins et à l’aspect mercantile qui ne manque pas de se développer autour de ce phénomène . La menace de « perturbation de l’ordre public« ,  évoquée. Les relations sont de plus en plus tendues avec le père Borodine ( Patrick D’Assunçao) qui – bénéficiant de la bénédiction des pèlerins galvanisés et adorateurs – tient tête aux autorités civiles et religieuses , afin de protéger « sa » brebis , Anna. La presse et les réseaux sociaux qui s’emparent de l’affaire et les multiples soutiens des fidèles du monde entier . Notre journaliste de la commission d’enquête diligentée par le Vatican , va se retrouver en terrain inconnu pour tenter d’y débusquer , le vrai du faux …

La Commission d’enquête canonique réunie ( Vincent Lindon,, Bruno Georis, ElinaLöwensphorn,)- Crédit Photo :Memento films distribution –

Lui , le «  non pratiquant » , le voilà plongé dans une autre forme d’investigation, à la recherche des preuves concernant la « vision  » de la jeune fille . A cet égard , sont passionnantes les séquences des audiences au Vatican , où on lui explique ce que l’on attend de lui , illustrée par la visite des immenses archives où sont compilées les multiples enquêtes concernant apparitions , miracles ou autres révélations, depuis des siècles . Celles pour lesquelles, il a fallu à l’église , prendre les responsabilités de se prononcer. La difficulté consistant à le faire en cherchant à ne pas ébranler la foi des fidèles , et en même temps de ne pas céder au risque de valider de possibles impostures qui seraient préjudiciables. Les « erreurs » des siècles passés , concernant ces phénomènes ne devant pas se perpétuer , sachant que les possibilités d’investigations modernes sont susceptibles d’y remédier. Le film à ce sujet ouvre justement le débat sur ces questions . A cet égard par exemple la séquence des traces examinées sur un tissu exposé aux fidèles , comme preuve du récit d’Anna , fait écho à l’affaire du « Saint Suaire de Turin », et aux multiples investigations et remises en questions, concernant son authenticité . Il y est fait également référence aux faits authentifiés ( Bernadette Soubirou , etc …) par l’église  , comme aux multiples « impostures » dont sont parfois victimes les croyants abusés . A cet égard le cinéaste évoque le Livre «  les faussaires de Dieu » de Joachim Bouflet qui leur est consacré. «  ces promesses et mensonges que tout le monde croit » , l’oeuvre du cinéaste est construite sur cette interrogation qui traverse les destinées de ses personnages qui y sont confrontés , comme l’illustre celui  de l’escroc du film A L’origine ( 2009 ), embarquant tout le monde dans la construction d’une autoroute , allant nulle part !…

Anna( Galatea Bellugi ) qui affirme avoir vu la vierge ( Crédit Photo: Memento films distribution )

Ici , dans un contexte où c’est la part intime de l’individu est au centre , c’est « un regard à hauteur d’homme » que le cinéaste a choisi d’explorer, faisant la part des certitudes qui vas=cillent et des doutes qui s’ installent dans sa quête ( et recherche ) de la vérité, en question . La confrontation et l’évolution des rapports entre Jacques et Anna , à cet égard est magnifique dans ce qu’elle laisse percevoir , à la fois de leurs fragilités . Elle qui veut le persuader «  je ne suis pas une menteuse ! ». Lui , qui cherche à la comprendre et qui finit par se laisser « envahir » par le doute qui ébranle ses certitudes d’agnostique , face à tous les éléments accumulés  de son enquête . Le récit construit comme un « polar » ne fait qu’amplifier cette perception d’un chaos dans lequel s’inscrit la destinée d’Anna , dont il finira par débusquer les raisons de la souffrance dans la frénésie de laquelle elle se laisse emporter, dont la superbe scène de la fugue , confirmera l’ampleur . Il finira d’ailleurs par en mesurer les répercussions qui l’amèneront à comprendre les enjeux , l’amenant à bousculer son scepticisme . C’est la belle idée du film qui va l’amener , à n’avoir de cesse que de démêler les apparences . C’est , « l’enquête du réel … qui finit par l’ouvrir à une autre dimension » , explique le cinéaste. Et  de percer la complexité de l’âme humaine , le mystère de la foi et le trouble qu’il provoque . C’est aussi une manière d’interpeller le présent et le monde d’aujourd’hui  et  «  interpeller sur le retour du religieux et le dévoiement intégriste , ou encore l’église et ses scandales ( …) on ne répondra pas au sens de nos vies avec des algorithmes , des smartphones , des promesses économiques ou des illusions  politiques » souligne le cinéaste  dans l’entretien du dossier de presse de son film …

Vincnt Lindon et Galatea Bellugi ( au centre ) – Crédit photo : Memento films Distribution )

Il pointe ,   l’exploitation dont certains abusent pour faire croire «  à des hommes et des femmes qui n’ont rien d’illuminé , tout et n’importe quoi » . il évoque  l’exemple d’Anton       ( Anatole Tabman) jouant sur les influences ,  pour gagner notoriété et bâtir fortune . Le journaliste, les regarde avec le recul et sa rigueur  journalistique , sans pourtant les juger . Le constat et là et les interrogations suscitées par celui-ci , conduit ce dernier à ouvrir un autre chapitre consécutif à son travail de fourmi qui lui a permis de décortiquer les éléments de son enquête , faisant fi «  des clichés, des représentations ou débats médiatiques sur le choc des civilisations » . Celle-ci prenant la forme de l’investigation policière et s’inscrivant en  chapitres , jusqu’au dénouement . Mais s’ouvrant au fil de son déroulement , à d’autre perspectives dont le final , le propulse à nouveau , sur le terrain des conflits dont on l’a vu revenir meurtri . Au bout du compte, de manière emblématique  Xavier Giannoli prolonge au travers de son héros , la réflexion que celui-ci nous renvoie de la perception de l’état du monde . Et tout ce qui nous amène a en être déboussolés . La sidération et les certitudes chamboulées de Jacques , sont quelque part, aussi les nôtres :     «  j’ai eu besoin d’aller au contact de quelque chose du chaos du monde moderne pour finir mon film. Je voulais explorer la part intime du sujet mais aussi un champ plus large. Je suis allé tourner dans le plus grand camp de réfugiés du Moyen-Orient, à la frontière syrienne. Ce drame historique interroge ce que nous sommes, nos valeurs, notre histoire, et donc ce que nous sommes prêts à faire pour leur tendre la main », explique encore , le cinéaste .

Son récit développe magnifiquement cette interrogation , porté par une mise en scène ample où les états d’âme et l’intimité des personnages est auscultée au plus près . Mais aussi au cœur des manifestations collectives de foi d’une foule galvanisée , dont il décrit magistralement la frénésie . Au coeur de l’investigation c’est le romanesque qu’il incrit portant , la réflexion sur l’état du monde et des individus qui y perdent pied. Réalisme et envolées spirituelles où s’insinue le mystère , enrobées par la musique signée , Arvo Pärt et George Delerue . Le film est parfaitement servi par deux prestations sublimes toutes en nuances émotionnelles .  Celles :de Vincent Lindon parfait comme toujours , et surtout , de la jeune Galatea Bellugi véritable révélation dont la présence illumine le film . A ne pas manquer …

( Etienne Ballérini)

L’APPARITION de Xavier Giannoli – 2018- Drée : 2 h 17.
Avec : Vincnt Lindon , Galata Bellugi, Patrick D’Assunçao , Anatomle Taubman , Elina Löwensohn .. ..
LIEN : Bande -Annonce du film, L’ Apparition de Xavier Giannoli .

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