La soirée réunissant les amis proches d’une politicienne qui vient d’être nommée porte -parole de l’opposition , est l’occasion pour la cinéaste Anglaise de ciseler une comédie satitique en forme de huis-clos glaçant sur les faux-semblants et la perte des idéaux . Jubilatoire…

La cinéaste Anglaise remarquée au festival de Venise 1992, par son Orlando d’après Virginia Woof qui révéla Tilda Swinton ( et fut un gros succès international ) , a construit depuis – à son rythme d’un film tous les quatre ou cinq ans – une filmographie passionnante qui se nourrit de ses multiples activités . De danseuse et chorégraphe qui l’améne à réaliser le superbe , la Leçon de Tango ( 1997) , mais aussi de compositrice et chanteuse de plusieurs groupes , réalisant de nombreux courts métrage et un long métarge , Yes ( 2005) . Passionnée aussi par les réseaux sociaux elle consacre son film Rage (2010) à un blogueur , et s’intérresse également aux mouvements féministes . Femme de son temps , c’est logiquement donc qu’elle se penche avec son dernier film , The Party , sur cet aspect par le biais de l’engagement politique d’une femme , Janet ( Kristin Scott Thomas ) qui y a consacré sa vie . La soirée festive destinée à célébrer son succès avec des amis proches dont les choix de vie sont révélateurs d’une diversité d’engagements personnels…mais aussi des comportements d’une certaine classe bourgeosie et politique , qu’ils incarnent . Tourné juste après les éléctions cur le « Brexit » , la réaliatrice , l’a voulu « Comme une réflexion sur le discours des partis politiques ; les vérités à géométrie variable selon les tactiques (…) , et une réflexion sur l’impact qu’a la déformation de la vérité sur nos vies personnelles, comme celle de nos vies politiques« ….

En attendant les invités et amis venus célébrer sa victooire , dans la cuisine Janet y prépare les vols-au-vent , tout en répondant aux multiples appels téléphoniques et aux SMS de félicitations . Dans le salon , son mari Bill ( Timothy Spall , Prix d’interprétation à Cannes pour Mr Turner de Mike Leigh ) écoute sa musique favorite ( jazz…) en buvant sa boisson alcoolisée préférée . Tout semble se présenter sous les meilleurs auspices . Les amis attendus arrivent, April l’amie d’enfance de Janet et Gottfried son mari ( Patricia Clarkson et Bruno Ganz ) , puis , Martha la lesbienne sociologue et sa compagne ( Cherry Jones et Emily Morimer ), et Tom ( Cillian Murphy ) sans sa femme Marianne retardée …qui rejoindra la compagnie sans doute.. pour le déssert ou le café . Le groupe d’amis Bourgeois , va pouvoir festoyer dans la belle demeure . On se congratule , on félicite Janet pour sa réussite . Pourtant dans le huis clos de celle -ci , la cinéaste par des indices et dialogues habilement distillés , rapidement y isntalle les éléments de tensions , annonciateurs … des désaccords qui vont s’installer , via le sous-entendus et autres invectives , annonçant le drame qui va se jouer . On se jauge et se guette . Très vite la séquence faisant référence à la propension à la boisson de Bill le mari de Janet , y est fustigée par le refus de « partager » sa bouteille par ses hôtes . Les premiers éléments de conversation qui s’installent font place a des piques qui renvoient les amabilités polies , au second plan . La dérision et l’humour se muent en sarcasmes , et se font l’écho des jalousies ou d’un mépris révélateur . Le vernis des apparences dès lors tombe très vite et une vive tension va finir par s’installer lorsque sous le feu des insinuations , on y fustige les choix de vie personnels , ceux du médecin holistique ( Bruno Ganz ) ou du couple des lesbiennes en attente de maternité ( des triplés ! ) , et Tom , le banquier addict à l’argenr ( et à la drogue ) y est villependié en « looser ». Au delà des « piques » , les vérités qu’elles pointent vont se faire jour, et les masques vont finir par tomber et se muer , en un règlement de comptes dévastateur. Opportunité pour la cinéaste d’y décliner les éléments d’une réflexion sur la morale , l’hypocrisie et la perte des idéaux, et sur le , ou ( les ) couples dans tous leurs états …

Ce jeu de massacre jubilatoire , Sally Potter l’inscrit dans la tradition du cinéma ( le « free cinéma » Anglais des années 1960 ), du théâtre ( Wilde, Pinter …) et de la littérature Britanique . Dont les auteurs , en leur temps , ont porté un regard aigu sur la société , regard dont elle prolonge au présent , l’état des lieux . The Party , se muant en mélo ( drame ) socio-politique . Son rythme soutenu et ses dialogues ciselés en lames tranchantes , finissent par faire tomber les masques .Les liaisons secrêtes longtemps cachées, les trahisons , les rancoeurs et ( ou ) les soumissions , qui en résultent . A l’image de Bill qui s’est sacrifié à l’ambition politique de sa femme . Celle-ci fustigée par ses amis mettant en doute la sincérité de son engagement , révélateur au bout du compte du délitement du systéme de santé dont elle est chargée de mission, en même temps que la porte -parole de l’opposition . Tout ce beau monde se cache derrière les apparences d’une « normalité » et d’un « soutien protecteur de classe » qui lui permet de faire illusion et cacher son veritable visage , ses failles et ses trahisons politiques, morales et sentimentales . Le « coup de fouet en retour » peut dès lors se muer en révélateur , la violence et la monstruosité s’y déchaîner , en même temps que laisser place à la compréhension , ou à la compasssion . Amants , maîtresses et autres trahisons enfins révélés , le délitement qui s’étend impacte les vies personnelles . Le plan final en arrêt sur image , en est l’exemple parfait , laissant intérrogatif sur ce « jeu de massacre » des mots, et ce qui peut les faire basculer d’un côté ou de l’autre .
Le noir et blanc superbe de la photograhie ( d’Alexeï Rodionov) , ajoute par ses constrastes son apport à la noirceur du tableau et du drame qui se joue … servi par des comédiens exceptionnels dont les « nuances » de jeu explorent toutes les fêlures dans l’incarnation des personnages qu’ils servent à merveille . Du grand art …
(Etienne Ballérini)
THE PARTY de Sally Potter – 2017 – Durée : 1h 18.
Avec : Kristin Scott Thomas , Timothy Spall, Patricia Clarkson, Bruno Ganz, Cherry Jones,
Emily Mortimer, Cillian Murphy …
Lien : Bande -Annonce de The Party, de Sally Potter .