A la découverte de la naissance du cinéma et des premiers films tournés par les frères Lumière inventeurs de génie qui ont révolutionné le monde de l’image et le regard des spectateurs auxquels ils « proposent un regard unique sur la France et le monde qui s’ouvrait au 20 éme Siécle » . C’est un superbe voyage que nous propose Thierry Frémaux l’actuel délégué général du Festival de Cannes . Un vrai régal , il faut s’y précipiter .

Bien sûr les cinéphiles connaissent quelques – uns de ces films des premiers temps du balbutiement du cinéma ( l’arroseur arrosé, et , l’arrivée en gare d’un train à la Ciotat ( voir Lien...) , découverts dans les cinémathèques et dans les ciné-clubs d’hier , ou aujourd’hui parfois à la télévision qui y consacre quelques émissions, comme celle de Canal Satellite ( Retour de Flamme ) , et aussi ,parfois dans les émissions thématiques , sur le service public . Mais le film concocté par Thierry Frémaux et Bertrand Tavernier dont on connaît la passion cinéma des bonshommes et leur travail effectué à l’institut Lumière de Lyon , est unique dans la mesure où il est le résultat d’un immense travail de recherche et de restauration . Concentré sur la période 1895- 1905 au cours de laquelle ont étés tournés et montrés pour la première fois au public la plupart des films qui sont depuis restés invisibles . Et , c’est ce travail qui permet de les redécouvrir aujourd’hui quasiment dans leur état d’origine ( et avec quelle qualité d’image!) , et surtout en respectant la vitesse d’enregistrement et de projection ( 18 images secondes ) de l’époque afin d’éliminer cet aspect « saccadé » de l’image des anciennes restaurations et projections. Dans Lumière ! , l’Aventure commence ( Cliquer ci pour la bande -annonce ), c’est donc une centaines de ces films courts de 50 secondes , durée des bobines permettant l’enregistrement des images et leur projection , qui nous sont proposés par Thierry Frémaux…

Un choix judicieux , accompagné d’un commentaire passionné et parfois enjoué et qui ne manque pas d’attirer l’attention du spectateur sur des détails ( le furtif regard -caméra d’un passant dans une scène de rue , ou celui du gamin responsable du célèbre Arroseur arrosé ar , la gestuelle d’un comédien complice destinée à inciter le spectateur à applaudir aux facéties comiques des hommes de ce concours de saut à dos de cheval …) qui pourraient lui échapper compte tenu de la richesse et de brièveté des séquences . C’est dans ce qui s’inscrit dans certaines saynètes qu’intervient d’ailleurs la nécessité de la mise en place , afin de respecter le « timing » et la dramaturgie souhaitée de ce qui s’y inscrit . C’est ainsi que sont inventés , la mise en scène …et tous les éléments de la grammaire du cinéma . La construction du film en chapitres ( La France qui travaille, la France qui s’amuse , Lyon ville lumière , Paris 1900, enfances , le monde tout proche …) permet de pointer la diversité des films et du travail des frères Lumière par la clarté de la démonstration, destinée à faire retrouver à ces films « le chemin du cinéma et d’aller à la ( re ) découverte du public (..) de rappeler leur importance… » , mais aussi de souligner que tout ce qui fait la spécificité et l’inventivité du cinéma était déjà là : « Au total, près de 1500 films figurent au catalogue Lumière, la plupart méconnus, jetant un formidable regard sur le théâtre de la vie. Louis Lumière et leurs opérateurs inventent : le travelling, le trucage, le gag, le film familial, le film d’épouvante, le film d’entreprise publicitaire, le film comique, le film d’actualité, le documentaire, et même, avec les versions multiples de plusieurs sujets : le remake » , explique Thierry Frémaux dans le dossier de presse …

Alors on apprendra beaucoup de choses y compris même sur le premier film d’images en mouvements dont les photographes du monde entier venus à Lyon pour un séminaire découvriront que désormais la recherche tant attendue de la mise en mouvement de celle-ci a abiuti avec le cinématographe des Frères Lumière, concurrençant désormais leurs images fixes. La sortie des Usines Lumière, filmée par Louis qui est la première réalisation, et fut présentée pour la première fois devant le public un certain soir de Décembre 1895 à Paris. Et le questionnement sur l’emplacement de la caméra , sur le jour de tournage ( ou plusieurs , entre le 15 et le 20 Mars 1895 ) , trois séquences de la même vue avec divergences, nous sont montrées. On mesure au long de la projection de ces films courts combien fut importante l’inventivité de Louis Lumière qui réalisa de nombreux films , mais aussi de l’équipe de ses opérateurs ( Alexandre Promio, Constant Girel ,Félix Mesguich, Maruius Sestier , Charles Moisson , Veyre ..) qui sillonnèrent le monde pour en ramener les images inédites qui marqueront à jamais les esprits et feront œuvre de témoignage historique. Les images animées du monde ancêtres des Documentaires et des actualités d’aujourd’hui voyaient le jour, de la même manière que les « genres cinématographiques », verront leurs premiers balbutiements, avec la naïveté et la poésie de la première fois …

On est sous le charme et l’émerveillement , et , au fil des « pépites » soumises à notre attention accompagnées du commentaire de Thierry Frémaux, on mesure la perfection du travail et le sens de l’inventivité et de créativité tenant compte des conditions et contraintes ( caméra fixe ) techniques imposées , des choix qui sont faits (places de la caméra, cadrage , profondeur de champ, rythme …) par Louis lumière et ses opérateurs apportant des images du monde entier . Comment résister à cette image d’actualité saisissante ( on ne fait pas mieux aujourd’hui) des puits de Pétrole en feu … ou à ce plan magnifique en contre-plongée en Egypte montrant au premier plan la population autochtone et les chameaux , au second l’imposante statue du sphinx et au fond , la non moins imposante Pyramide . Ou de celui sur le bateau dont le cadrage propose aussi trois niveaux de lecture dans le même mouvement . Les images de New-York et de la 5 ème Avenue , celles de Londres et de Big-Ben, de Paris en 1900 et de Lyon bien sûr avec cette étonnante scène d’une inondation , le japon et les combats guerriers rappelant Kurosawa où les personnages filmés en intérieurs cadrés comme chez Ozu . Le Vietnam ( et le travelling- arrière du véhicule suivi par une petite fille au sourire enjôleur) . Superbe voyage dans un monde en mutation et au cœur des populations, scènes de la vie quotidienne ou familiale , scènes d’usine et de travail ,
de vacances et de loisirs ( la baignade en mer… ) , scènes de comédies : l’accident de voiture et celle du Roméo sur l’échelle qui se fera piéger …

Mais on arrête là , on ne va pas tout vous dévoiler …Le surprises vous le verrez sont nombreuses et vous apprendrez que parfois les clichés ( Lumière / Méliès ) peuvent aussi , être démentis . D’ailleurs on vous rassure vous aurez l’occasion de poursuivre le plaisir puisqu’une petite partie des trésors Lumière seulement a été montrée dans celui-ci et qu’il en reste encore beaucoup à découvrir , Thierry Frémaux a promis qu’il y aura un second opus … on en salive déjà…
(Etienne Ballérini)
LUMIERE ! L’Aventure commence . De Thierry Frémaux – 2016- Durée : 1 h 26.
Vues Cinématographiques tournées par Louis Lumière et ses opérateurs
Musique : Camille Saint Saens .
Montage : Thomas Valette et Thierry Frémaux.
Quelle chance de l’avoir vu, il ne passe pas du tout dans ma région !