Le trompettiste blanc, Chet Baker , admiré par ses pairs et le public dont l’addiction à la drogue a fracassé la vie et la carrière , tente en 1966 de faire un come- back porté par l’amour d’une comédienne dont il est follement amoureux . Le film décrit son long combat pour tenter de se défaire de ses démons . Sélection Festival de Deauville 2016…

A la fin des années 1940 passionné de musique Chester ( Chet ) qui s’initie à la musique , jouant du trombone qu’il troque ensuite pour une trompette et se produit dans des orchestres de danse . La découverte du jazz et du saxophoniste Lester Young qu’il admire va le conduire à se rapprocher des tendances musicales nouvelles : Be Bop , et les jam- sessions d’alors. Dizzy Gillespie , Dexter Gordon , Woody Herman et surtout Charlie Parker son idole qu’il admire au plus haut point et dans l’orchestre duquel il sera intégré après des essais comme trompettiste pour une tournée . Suivront des collaborations avec Jerry Mulligan , Stan Getz ou encore Lee Konitz et Miles Davis avant de former son propre quartet et enregistrer des disques accompagné de nombreux musiciens et connaître un succès phénoménal avec l’album Chet Bakers sings en 1954 . Propulsé par le succès en idole à l’instar d’un James Dean auquel on le compare par son physique de jeune premier et auquel le cinéma fait les yeux doux. Mais voilà que tout bascule, les filles et les aventures , les soirées trop arrosées , les tentations …et la drogue qui surgit et l’accroche avec ceux qui la distribuent et la fournissent et vous entraînent dans la fange . Sa fragilité ne fait qu’attiser la dépendance que les dealers exploitant, « Chet » sombre et ne devient plus que l’ombre de lui-même …

La première séquence du film inscrit d’emblée son état de déchéance dans lequel il se trouve en Italie , allongé sur un trottoir et dépenaillé comme un clochard . C’est dans cet état qu’un producteur de Cinéma Hollywoodien ( en fait c’était le producteur italien Dino De Laurentis …) vient le chercher pour le sortir de la descente aux enfers . Ce dernier à l’idée de lui rendre hommage et de faire un « biopic » sur le légendaire trompettiste qu’il a été et lui propose de jouer son propre rôle … qui pourrait lui permettre un come-back et le relancer . Le tournage qui commence et Chet qui tombe amoureux de sa partenaire Afro-Américaine , Jane ( Carmen Ejogo , épatante ) , mais le tournage va tourner court. Retrouvé par un dealer et passé à tabac dans un parking Chet se retrouve à l’hôpital en piteux état , la mâchoire fracassée! . Adieu le tournage… mais aussi la musique . Alors Jane qui le voit sombrer dans la dépression et risquer de renouer avec ses démons va se servir de l’amour qui les unit pour le convaincre de s’accrocher et au travers de sa passion pour la musique , lui faire retrouver par le travail le chemin de la résurrection qui pourrait lui faire regagner l’admiration de ses pairs et du public .

C’est ce combat qui constitue le coeur du récit et du film dont Robert Budreau, Born To Be Blue ( Cliquer ici pour voir la bande-annonce ), qui habilement, s’éloigne des codes des Biopics musicaux traditionnels , pour construire un récit et une mise en scène habitée par cette même improvisation qui participait à la créativité musicale du personnage . Refusant la « linéarité du récit et la vérité objective » explique le cinéaste qui rassemble par exemple dans le personnage de Jane les éléments et comportements rassemblés d’autres femmes de la vie de Chet .De la même manière que pour brosser le portrait de Chet , il réunit des éléments contradictoires sur la vie de ce dernier qui se plaisait parfois à « l’arranger », pour les médias . Mais aussi peut-être pour construire sa légende – improvisait à l’image de ses envolées et improvisations musicales – ses déclarations selon ses interlocuteurs . Un choix de récit et de mise en scène assumé par le cinéaste , afin dit-il de « rester fidèle au personnage et à sa musique » . Les plus belles scènes sont celles illustrant le travail acharné pour retrouver cette sensation de liberté et de créativité jaillissant tout à coup, comme une évidence du plus profond de soi pour s’envoler vers les sommets . C’est dans ces instants là que se concrétise sa singularité et son « art » qui le rend reconnaissable , et unique .Cette créativité dont on ne cesse de sonder les raisons de l’inspiration qui font qu’elle est la marque du génie. Et ce génie est-il inné …ou ,parfois, peut-il avoir besoin d’aide pour le faire sortir de soi ? . Chet qui pour faire sourdre les sonorités si caractéristiques et uniques de sa musique avait besoin de puiser au plus profond de lui-même , sonder sa noirceur et ses démons …ou cette mélancolie qui lui faisait distiller les notes et les mots d’une voix frémissante , sensible…envoûtante.

C’ est ce combat momentanément vainqueur que le film décrit , servi par une interprétation remarquable d’Ethan Hawke ( qui à appris pour les besoins du film à jouer de la trompette, et à chanter ) et qui a modelé sa silhouette pour « habiter » encore un peu plus le personnage . C’est d’ailleurs de ce travail de « mimétisme » que le comédien réussit à traduire magnifiquement , les hésitations et les tâtonnements de « Chet » durant les longues heures de son travail afin de dépasser le handicap de la blessure de mâchoire , travail destiné à le conduire à son retour sur scène devant ses pairs . C’est après ce retour vainqueur que ce dernier s’envolera pour l’Europe ( avec des retours aux Usa ) , mais aussi avec ses démons toujours aux trousses qui le rattraperont le 13 Mai 1988 à Amsterdam , où il est victime d’une chute du deuxième étage de la chambre de son hôtel après avoir eu recours à ‘une importante quantité de drogue . Robert Budreau réussit un bien joli film sur ce trompettiste de génie (1) hanté par ses démons …
(Etienne Ballérini)
BORN TO BE BLUE de Robert Budreau – 2016- Durée : 1 h 37 ).
Avec Ethan Hawke , Carmen Ejogo , Calum Keith Rennie , Kédar Brown , Janet-Laine Green , Kevin Hanchard, Tom Nardi …
(1) -En 1987 lors du passage à Paris de Chet Baker , le cinéaste Bernard Fèvre a tourné un portrait musical : Chet’s Romance en hommage au trompettiste .
-En 1988 Bruce Weber réalise , lui , un superbe documentaire Let’s Get lost , bourré
d’images d’archives qu’il faut voir absolument , Le film avait été présenté au Festival
de Venise .
« Bien joli film » pas vraiment peu de musique beaucoup de scène de sexe, platitude navrante, soporifique….
Peut-être faut-il y voir une canonisation bien de notre époque ? « Saint » Chet Baker… Je renvoie à mon billet : https://letrebuchet.wordpress.com/2017/01/12/born-to-be-blue-saint-chet-baker/
J’ai bien aimé aussi, Ethan Hawke excellent, un peu lent certes mais pas soporifique, je crois qu’on sait à l’avance à quoi ressemblera ce film et on y va pour se faire plaisir.