Livre / Cinéma -Entretien avec Pierre-Julien Marest, l’éditeur de Warhol.Hitchcock

Rencontre avec Pierre-Julien Marest, l’éditeur de Warhol.Hitchcock, traduit et préfacé par Pierre Guglielmina. Le premier livre d’une collection consacrée au cinéma, dont plusieurs titres sont prévus pour 2017.

Warhol.Hitchcock est la traduction française d’un entretien entre Alfred Hitchcock et Andy Warhol qui s’est déroulé à New York, au Park Lane Hotel, en avril 1974. Publié la même année dans « Interview Magazine », la revue du pape du pop art, il n’avait jamais été traduit en français auparavant.

Pourquoi avoir choisi cet entretien et comment avez-vous eu connaissance de ce texte ?
Je suis un fou d’Hitchcock. Il m’a marqué depuis mon enfance. C’est le premier réalisateur de cinéma que j’ai identifié lorsque je voyais ses films à 8 ou 9 ans. Je peux revoir ses films 5, 10 fois sans jamais me lasser. Pour Warhol, ce qui est étonnant, c’est sa timidité, bien surprenante. Ce qui qui m’a amusé et intéressé en découvrant cet entretien, c’est que, par le biais de sa question sur le profil d’Hitchcock, sa signature qui peut être perçue comme son propre logo, on peut établir un lien avec la problématique de Warhol à savoir, qu’est-ce que l’Art ? Quel est son devenir au XXe siècle ?
Sinon, c’est Pierre Guglielmina, le traducteur de plusieurs écrivains anglo-américains (Ellis, Hemingway, Kerouac,…), que je connais depuis dix ans, qui m’a parlé de cette interview.

Etes-vous partis du texte ou de l’enregistrement audio ? Voire des deux ?
On est partis du texte tel qu’il a été publié dans « Interview Magazine » en 1974. Malheureusement, il n’a pas été possible de mettre la main sur les enregistrements de cette conversation, ce qui aurait été le rêve. Avec la transcription de Pat Hackett de l’audio vers l’écrit, on a respecté le… « stream of consciousness », le courant de conscience, de Warhol avec ses signes et annotations diverses qui ponctuent l’interview. On a trouvé amusant de conserver ce… « jeu typographique », si on peut l’appeler comme ça, de Warhol. On a voulu garder l’esprit du texte d’origine. On a ainsi le sentiment d’être en immersion. La première fois que je l’ai lu, j’ai eu l’impression d’être dans la suite avec Hitchcock et Warhol. C’est tout juste si on ne voit pas son reflet dans les fenêtres du Park Lane Hotel qui donnent sur Central Park… C’est tout le talent de Pierre d’avoir traduit le texte dans cet esprit.

Vous aviez déjà une expérience de l’édition…

Oui. J’ai commencé à apprendre le métier chez Claude Tchou, décédé en mars 2010, qui était une figure de l’édition et qui est un peu oublié aujourd’hui. C’était un peu l’Arsène Lupin de l’édition. Un « escroc notoire »… mais qui escroquait avec classe ! J’ai toujours aimé les livres, mais il m’a transmis le goût du beau livre… De savoir passer du temps pour faire le choix du papier, de la maquette… Très rapidement, j’ai monté une première maison d’édition, Les Éditions Clairac. J’ai notamment édité Dark City, le monde perdu du film noir d’Eddie Muller, et en coédition avec Payot-Rivages et le soutien de François Guerif (Directeur de la collection Rivages/Noir), Wanderer et Voyage de Sterling Hayden (Johnny Guitare, L’Ultime Razzia), un acteur que j’adore et un remarquable écrivain.

Aujourd’hui, avec Marest Editeur, vous restez toujours dans le domaine du cinéma…
Voilà. Comme par ailleurs je suis critique pigiste à Télérama, c’est dans le prolongement de mon obsession pour le cinéma (rire) !

Quel sont les prochains livres à paraître ?
Deux ouvrages sur Hitchcock pour le premier trimestre 2017. Pour la petite histoire, Pierre Guglielmina est aussi le traducteur de Hitchcock par Hitchcock, édité par Flammarion en novembre 2012. Il l’a placé difficilement chez Flammarion. Il a essayé de faire la même chose avec le 2e volet, Hitchcock on Hitchcock 2, mais ils n’étaient pas intéressés, pas plus que d’autres éditeurs. Je me suis alors posé la question de savoir pourquoi ce n’était pas possible et cela a été le point de départ… De fil en aiguille, on s’est dit pourquoi ne pas racheter les droits du Hitchcock par Hitchcock à Flammarion, comme ça, avec Hitchcock on Hitchcock 2, qui n’a jamais été traduit en français, on a les deux ! Là-dessus, Pierre est tombé sur l’interview d’Hitchcock par Warhol dans « Interview Magazine »… Aussi, l’ordre de parution est l’inverse de ce qui était prévu à l’origine.
Pour le premier, qui paraîtra le 17 janvier, le titre sera Ferme les yeux et vois ! d’après un article écrit par Hitchcock et une phrase tirée d’Ulysse de James Joyce. Le second s’intitulera Quoi est qui ? Toujours d’après un texte d’Hitchcock.

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Deux livres sur Hitchcock à paraître au 1er trimestre 2017 (Photos Marest Editeur)

D’autres projets ?
La traduction française de Movie Journal, une anthologie des meilleures critiques du cinéaste d’avant-garde Jonas Mekas. Puis, une fois n’est pas coutume, on sortira du cinéma avec un inédit de Francis Scott Fitzgerald, pour y revenir, avec deux projets sur John Boorman prévus pour mai. Deux autres projets me tiennent particulièrement à cœur. Dans le domaine étranger, un livre consacré au réalisateur Guy Maddin, à partir d’une thèse de Laura Pardonnet et qui comportera une longue introduction sur son cinéma et un entretien de Laura avec Guy Maddin. Le second est dans le domaine français, avec la reprise d’un projet du Syndicat de la critique de cinéma qui n’a jamais abouti, un livre blanc dans lequel tous les critiques de cinéma pourraient s’exprimer à bâtons rompus.Une réflexion est en cours afin de ne pas se limiter à la seule crise de la critique ; est-ce que le critique ne risque pas de devenir un auteur de publi-rédactionnel et d’être supplanté sur les affiches de cinéma par les tweets de jeunes intellectuels qui émettent des pensées en 140 signes ? (rires) L’idée est d’élargir le projet, pour éviter le côté « les critiques parlent aux critiques ». Pour le moment on invite les gens à témoigner. C’est difficile. On ressent une certaine crainte de parler. Comme c’est un métier de passionné, les personnes ont parfois peur de perdre le peu qu’elles ont déjà. Si personne ne parle, c’est une profession qui risque de disparaître. Elle est en danger. La parution est envisagée pour le 1er semestre 2017.
Quant aux projets sur Maddin et Mekas, ils sont prévus pour octobre 2017.

Avez-vous rencontré des difficultés pour acquérir les droits de certains ouvrages ?
Quand on aborde Andy Warhol, on a affaire à The Andy Warhol Foundation. Je ne vais pas vous mentir, c’est difficile. Sinon, pour les livres qui m’intéressent, ils sont représentés par des agences différentes. Ce qui est important, c’est qu’elles soient mises en confiance. Le fait qu’il s’agit d’ouvrages qui ont déjà un certain cachet y contribuent. Et comme je n’entre pas en concurrence avec d’autres éditeurs, il n’y pas de surenchère. Ce se passe plutôt bien.

Warhol.Hitchcock paraîtra le 8 novembre.

Entretien réalisé à Paris, le 20 octobre 2016.

A voir également,
Warhol.Hitchcock
et les sites :
The Andy Warhol Foundation
Jonas Mekas
Guy Maddin
Alfred Hitchcock
Marest Editeur

Philippe Descottes

 

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