Nouvelle journée au Festival de Cannes avec en lice en Compétition les frères Dardenne habitués de la Croisette qui présentaient leur nouveau film La Fille inconnue avec Adèle Haenel en médecin généraliste qui enquête sur la mort d’une jeune fille , et le cinéaste Pilippin Brillante Mendonça avec Ma’ Rosa une boutiquière compromise dans un trafic d’amphétamines . Dans la section Un certain Regard nouvelle jolie moisson quotidienne avec eux films traitant des conflits familiaux : Inversion de l’Iranien Behnam Behzadi et Après la Tempête du cinéaste Japonais Hirokazu Kore Eda . L’événement ce fut aussi la leçon de cinéma de William Friedkin . ( en bas de page les Photocall des films du jour )

La fille inconnue de Jean Pierre et Luc Dardenne( Compétiton )
Après Deux jours et un nuit présenté sur la croisette en 2014 , les frères cinéaste Belges palmés à deux reprises ( Rosetta / 1999 et L’enfant / 2005 ) sont à nouveau en compétition avec un film qui s’inscrit dans la continuité de leur oeuvre dont ils perfectionnent de film en film la recherche styliste et l’introspection psychologique des personnages confrontés a des cas de conscience qui vont changer leur vie . C’est ce qui arrive à Jenny ( Adèle Haenel , formidable ) médecin généraliste qui à la suite d’une harassante journée de travail qui se prolonge bien au delà de l’heure de fermeture entend sonner à la porte de celui-ci mais ne va pas ouvrir . Le lendemain elle apprendra par la police qu’une jeune femme a été retrouvée assassinée à quelques centaines de mètres de son cabinet et lui demande de voir la vidéo de surveillance de l’entrée et de la rue pour chercher à savoir ce qui s’est passé et tenter d’identifier la jeune femme retrouve sans papiers . Perturbée par ce qu’elle apprend Jenny culpabilise et s’en veut de n’avoir pas ouvert , et n’arrive plus à se détacher de cet événement tragique qui la hante ont elle veut comprendre les causes. Elle s’est investie dans l’idée de réparer cette négligence dont elle se sent coupable et se substitue même dans une enquête parallèle à celle de la Police qui l’amène à chercher des indices et de faire des rencontres desquelles un certaine vérité va jaillir . C’est une sort de quête morale qui va dicter ses choix qu’elle s’impose pour tenter de réparer sa négligence , allant jusqu’à investir dans une tombe digne pour cette malheureuse. A cet effet , aussi elle quitte son appartement pour se consacrer à son cabinet ,refusant un poste lucratif qui lui est proposé dans un grand hôpital pour se consacrer à ses clients banlieue de la ville de Seraing , province de Liège. Au delà de cette culpabilisant ressentie mais sereine , Jenny saura-t-elle rester , comme elle l’avait dit à son stagiaire » plus forte que ses émotions » ? . La belle idée du film des frères cinéaste c’est tout au long du parcours de Jenny pour découvrir la vérité , de la voir confronter à la perception de ceux aspects révélateurs de la violence sociale de notre époque dont ils déclinent ici une nouvelle approche . Celles des maux dont les corps se font les révélateurs dans son cabinet ( malaises, crises et douleurs…) de leurs maux . Sa force sera de se servir de cette capacité d’écoute des corps et de ce qu’ils révèlent aussi de la psychologie des individus pour déceler les failles . Dans l’un , comme dans l’autre cas celles-ci se font le miroir de la société et d »une réalité dont ils sont porteurs des maux ( précarité , marginalisation ) et de la violence sociale . force du récit c’est de se placer dans le cadre de « secret médical » dont Jenny ne maque pas de rappeler tout au long de sa recherche sous le signe de celui-ci , afin d’obtenir par celui-ci le « diagnostic de la vérité , objet d »une magnifique scène finale au cours de laquelle le coupable aura lui-même à faire son choix moral et affronter les conséquences de son acte . Le film s’enrichit à cet égard d’une multitudes de personnages qui vont être confrontés à ces choix moraux à affronter comme l’illustre encore la belle scène où la soeur de la victime va se confier à Jenny , de la même manière que le beau personnage de Julien l’assistant de Jenny révèlera la raison pour laquelle il a voulu quitter sa vocation. Avec cette honnêteté qui singularise leur cinéma , les frères Dardenne , nous offrent une fois encore un très beau film…

Ma’ Rosa de Brillante Mendonça ( Compétition )
Le Cinéaste Philippin primé à Cannes pour sa mise en scène de Kalatay (2009 ) était également hier à nouveau en compétition avec son nouveau film consacré a son héroïne Rosa du titre du film qui avec son mari tient une boutique dans un quartier pauvre de manille , très fréquentée par les jeunes qui vend une multitude de produits mais fait aussi quelque peu dans l’illégalité qui permet de la rentabiliser en vendant des amphétamines . Si tout le monde connaît et apprécie Ma’ Risa , un jour sur dénonciation anonyme la police fait irruption et arrête le couple qui se retrouve en prison et sommé de « donner » ses fournisseurs de drogue sous peine d’être maintenue en prison et différés en justice . Dès lors le cinéaste nous entraîne dans ce qui fait la spécificité de son cinéma dénonciateur des maux et des compromissions de son pays dont il dénonce les violences , en même temps explore les raisons qui amènent à transgresser les valeurs fondamentales « cette histoire m’interesse car elle plonge dans le coeur dérangeant d’une famille Philippine ordinaire . lorsqu’un membre de votre famille est dans une situation difficile en raison de ses méfaits seriez-vous prêt a tout faire pour lui éviter les difficultés même si cela implique de transgresser les valeurs fondamentales ? . dans une société où la loi du plus fort un fait , la famille devient amorale » , dit le cinéaste . Et c’est ce qui va se passer pour Ma’ Rosa qui appelle à la rescousse ses quatre enfants pour aller demander à ses mais de l’aider à recueillir l’importante somme qui lui permettrait de sortir du commissariat où les policiers corrompus demandent des sommes astronomiques qu’ils empochent pour libérer les auteurs de méfaits . Le cinéaste brosse le double portrait de ces agents de police corrompus qui rackettent à leur bénéfice et profitent d’un laisser faire et impunité , utilisant aussi la violence comme le révele une scène très forte où ils tabassent un suspect qui ne peut leur donner la somme exigée . De la même manière qu’il montre au travers du parcours des quatre enfants de Ma’ Rosa pour trouver la somme demandée pour la libérer , comment ces derniers sont prêts à tout pour arriver à leur fin et donc plonger dans cette transgression citée comme un fléau revers de la médaille de la loi du plus fort !. Le film trouve sa force dans un dispositif de mise en scène en longs plans séquences filmés caméra à l’épaule , qui illustrent les scènes à l’intérieur du commissariat ou dans les maisons des personnages visités par les enfants de Ma’ Rosa. Le dispositif de la mise en place de chaque plan séquences où se déroulent une multitude de situations et de mouvements dans le cadre de l’image , fait l’objet d’une travail assez époustouflant donnant vie , intensité dramatique et réalisme à chacune d’entr’elles . Fiction et réalisme documentaire s’y entrechoquent dans le cadre de vie quotidien . Un travail aussi passionnant que fascinant …

Inversion de Behnam Behzadi
Le cinéaste Iranien dont c’est le quatrième long métrage raconte l’histoire d’une jeune femme Niloofar qui vit seule avec sa mère à Téhéran et qui voit sa famille intervenir dans sa vie et ses choix prétextant de la pollution de l’air dans la ville néfaste pour la mère , s’alliant et contraignant Niloofar à déménager et vivre avec elle à la campagne . Toujours soumise jusque là à se famille , cette fois-ci la jeune femme va s’opposer à leur décision . C’est de cette « inversion » dont elle fait preuve pour exiger le respect de ses choix qui est au coeur du récit , mais s’y fait aussi le reflet d’une double dimension emblématique qui lui permet en miroir d’évoquer le » climat » politique du pays et des tiraillements qui s’y manifestent concernant les thématiques d u poids des traditions , des droits des femmes dans la société et dans la famille , des libertés . enrobée Dès lors toutes les scènes qui s’y inscrivent et relatant les relations qui se sont instaurées entre Niloofar et sa famille et les pressions de toutes sortes qu’elle subit pour s’y plier . Les menaces , les rapports de forces et les humiliations qui parsèment les séquences où tout à tour chacun y va de ses arguments et du poids dans la « tribu » familiale pour la contraindre . C’est une autre sorte de « pollution » que cette dernière subit de la part de sa famille , mais aussi parfois de l’entourage proche de celle-ci . qui ne manque pas de venir y apporter sa pierre sous les conseils avisés . Mais Cette dernière qui a compris depuis son plis jeune âge comment chacun a su les armes contre elle pour la réduire à la soumission , mais parfois aussi de la spolier en sa faveur . Si l’appui et l’amour maternel lui a valu parfois d’être protégé , il lui a fallu souvent utiliser la ruse pour se protéger et s’en sortir face à une fratrie jalouse et des cousin et autres parents éloignés qui en raison de la vieillesse de la mère posent déjà les jalons . Trop c’est trop, et Nillofar passe à l’attaque et sa politique est désormais de désobéir et de se faire un malin plaisir de contrer les décisions prises en sa défaveur . Elle s’était habituée à subir , désormais ce sont les autres qui devront s’habituer à se choix et décisions provocatrices . Même cet cet homme qui a des vues sur elles mais qui a du mal à se décider en fera un moment les frais avant de se voir ouvrir la voie .. rebelle et battante c’est elle désormais qui aura fera l ses choix de vie…

Après la Tempête de Hirokazy Kore-Edar ( Un Certain Regard )
Après le récent Notre petite soeur ( 2015 ) me cinéaste japonais a présenté hier son nouveau film à cannes s’inscrit dans la continuité d’une oeuvre qui fait la part belle aux rapports familiaux dont vous avez pu suivre les fils distribués dans notre pays et présentés das la passé au Festival de Cannes ( Tel Père , Tel fils ou Nobody Knows ) les qualités et la sensibilité de son regard qui fait la part belle aux sentiments refoulés , aux non dits et a toutes ces réserves qui compliquent les rapports familiaux et finissent par les polluer . » tout le monde ne peut pas devenir ce qu’il voudrait être » , telle est la phrase qui lui est venue à l’idée pour écrire le personnage principal de son film Ryota , qui ne sait pas se décide sur ce qu’il veut être , et doublonne un travail pour une agence de détective et sa passion pour l’écriture qu’il rêve de concrétiser . il y arrivera d’ailleurs avec une première publication qui va avoir du mal a trouver une suite . Car il multiplie les maladresses . en jouant par exemple aux courses son salaire de détective qui ne lui permet pas de payer régulièrement sa pension alimentaire à sa femme dont il est divorcé et qui élève son fils de 11 an qu’il voit rarement . Des hommes comme Ryota le cinéaste estime qu’il y en a beaucoup qui sont incapables de construire le bonheur . brûlant leurs vies et se rendant leur bonheur inaccessible . pourtant notre Ryota aura ici un dernier sursaut décidé à reconquérir sa famille , un typhon lui offrira même l’ opportunité d’un nuit à passer ensemble pour tenter de recoller les morceaux et de repartir . Et finalement redevenir adultes . Alors lorsque Ryota revient vers sa famille c’est vers sa mère , Yoshiko ( Kiki Kirin , géniale !) qu’il se tourne et qui ne le ménage pas , d’ailleurs celle-ci est impayable dans les défis qu’elle lui lance tout le temps ou les provocations et les critiques fusent , à l’image de cette scène de discussion qu’elle termine en lui rétorquant » j’ai dit des choses passionnante et essentielles tu devrais les noter pour ton prochain livre! » . Et puis lorsque sa femme et son fils se joignent , les rancoeurs accumulées qui ressortent et la vieille mère qui tente d’en limiter l’impact avec ces facéties et ses incessantes provocations destinées à détourner les conflits . Et ce fils qui avoue ne pas vouloir ressembler à son père… Au coeur de l’intimité la maison puis se prolongeant dans la promiscuité du refuge de la nuit orageuse, les langues se délient de l’orage des sentiments et finissent par céder et » accepter les changements » , comme une petite musique de réconciliation qui s’installe . Le mouvement qui semblait impossible est en marche …
(Etienne Ballérini)
Les films du Jour 19 Mai 2016 :
–Baccalaureat de Cristi Mungiu ( Compétition)
–Juste la fin du monde de Xavier Dolan ( Compétition)
–Pericle il Nero de Stefano Mordini ( Un Certain Regard )
–Hymyleva Lies de Juho Kouosmanen ( Un Certain Regard )
–Gimme Danger de JimJarmusch ( Hors Compétition)
–La Mort de Louis XIV de Albert Serra
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Le Photocall du Jour 18 Mai 2016 par Philippe Prost :



