Pour son nouveau long métrage, le réalisateur Belge flamand Felix von Groeningen nous ouvre la porte du Belgica, un bar tenu par deux frères que la vie avait éloignés. Une invitation nocturne à faire la fête et propice à tous les excès où la musique est omniprésente. Mais pour les protagonistes, le réveil peut être difficile.
Felix van Groeningen avait été remarqué sur la Croisette en 2009 avec un film aussi singulier que son titre, La Merditude des choses, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs. En 2012, Alabama Monroe, un drame parental qui avait reçu un très bon accueil critique et public, avait obtenu par la suite le César du Meilleur film étranger et une nomination à l’Oscar du Meilleur film étranger. Autant dire que ce nouveau long métrage suscitait à la fois attente et curiosité. Le réalisateur a été inspiré par un modèle et une histoire existants, le Charlatan, un bar de Gand, dont son père fut le copropriétaire, où il grandit et qui fut repris par deux frères à partir de 2000.

Bienvenue donc au Belgica, un établissement que vient de racheter Jo, épris de musique. Frank, le frère aîné qui ne l’a pas vu depuis longtemps, ne se satisfait plus de son travail dans une concession automobile et d’une vie de famille presque trop bien rangée. Malgré quelques virées nocturnes bien arrosées, il a envie de revivre une partie de sa jeunesse et d’une existence plus « rock’n’roll », en dépit du risque de délaisser sa femme et son enfant. Il décide alors de rejoindre Jo. Les deux frères sont différents l’un de l’autre. Si Jo semble avoir la tête sur les épaules, Frank est nettement mois raisonnable. Pourtant, ils s’associent dans l’entreprise. Ils veulent faire de ce café un endroit festif où la musique est reine, où l’on boit et danse, une arche de Noé ouverte à tous les noctambules sans discrimination.

Comme dans La Merditude… on rencontre des paumés et on boit beaucoup dans Belgica, de la bière, bien entendu, mais aussi d’autres boissons très alcoolisées. Comme dans Alabama Monroe, on retrouve un couple en détresse et la musique tient une place importante. Sous l’impulsion du duo, aidé de quelques amis, les premiers résultats sont encourageants, l’affaire marche bien. Frank voit plus grand. Le bar s’agrandit avec l’acquisition d’un local désaffecté et transformé en espace de concert. La clientèle répond présent et le Belgica, qui fait désormais sienne la formule « drugs, sex and rock’n’roll », devient le lieu incontournable de la vie nocturne gantoise, en même temps qu’un monstre que ses créateurs ne peuvent plus contrôler. Les lendemains de fête sont souvent difficiles. Quand ils se répètent, la pente devient glissante puis dangereuse. Lieu de perdition pour les fêtards, l’établissement risque de l’être aussi pour Jo et Frank.

Les deux frères s’étaient retrouvés, ils sont sur le point de se perdre. Le plus jeune voit s’éloigner la perspective de fonder un foyer, tandis que, par ses excès, l’aîné met le sien de plus en plus en danger. Les relations fraternelles, mais aussi amicales, sont mises à mal. Les tensions s’accentuent, la violence et le manque d’argent apparaissent et le beau projet s’étiole lentement.
Film sur la fraternité, l’amitié et le sens de la vie, Belgica peut aussi être perçu comme le microcosme de toute société confrontée à de profonds changements. Si Tom Vermeir et Stef Aerts sont les deux excellents interprètes, pourtant méconnus, de cette nouvelle œuvre de Felix van Groeningen, la musique en est le troisième personnage. Comme nous l’évoquions précédemment, elle occupe une place prépondérante. Elle est même omniprésente, selon le souhait du cinéaste qui avait «(…) envie de faire un film un peu rock’n’roll ! ». Parfois, on a même l’impression que c’est elle qui dirige la manœuvre, la caméra se contentant de capter les images des musiciens et du public en délire tandis que le réalisateur est parti prendre un rafraîchissement au comptoir. D’où ce sentiment de longueur lors de certaines plages musicales qui pourra être vu comme un défaut du film. Peut-être. Cependant d’ordinaire, dans ce contexte, on regarde pas le temps passer. Aussi, entrez quand même faire un tour au Belgica. Mais soyez sages. Un peu.
Belgica de Felix Van Groeningen (Belgique – 2015 – 2h06). Avec Tom Vermeir, Stef Aerts, Hélène Devos et Charlotte Vandermeersch.
( Philippe Descottes )
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