Présenté en Ouverture de la section Un Certain Regard au Festival de Cannes 2015 , le film de la cinéaste Japonaise sort cette semaine sur les écrans. Un superbe récit autour de Trois personnages qui cherchent à oublier leurs douleurs et blessures se secrètes , en se donnant courage pour retrouver goût à la vie , autour des saveurs culinaires . La forme du conte au rendez-vous en forme de leçon de vie empreinte de spiritualité….

La cinéaste Japonaise dont- si vous l’avez vu -vous ne pouvez qu’avoir aimé le superbe Still The Water (2014, sélectionné en compétition au Festival de Cannes , il y avait obtenu le Prix du Jury) , nous offre à nouveau un récit dans lequel on retrouve ses thèmes favoris et notamment celui du rapport de l’homme avec la nature ( superbes scènes de la vieille dame « dialoguant avec les arbres et les oiseaux ) , mais aussi celui des rapports de l’individu avec la société et de sa place dans celle-ci . C’est le cas pour les deux héros de son film , une vielle dame de 76 ans Tokue ( Kirin Kiki ) , qui va tenter de convaincre un vendeur, Sentaro ( Masatochi Nagase ) de desserts traditionnels Japonais ( les Dorayakis ) de l’embaucher, pour l’aider . Aussi têtue que persuasive elle finit par y arriver …en offrant au jeune vendeur des Dorayakis fourrés de la pâte confite de haricots rouges qu’elle a fabriqués elle- même !. Convaincu par la saveur exquise des gâteaux de la veille dame détentrice du secret ancestral de la fabrication… qu’elle refuse bien sûr de lui dévoîler , il se décide à l’embaucher.Et les nouveau desserts traditionnels fabriqués par le « duo » vont faire un tabac, attirant la foule chaque jour ! .

Adapté du roman « An » devenu un grand Succès au japon de Durian Skuegawa, auteur dont elle s’était déjà inspirée pour , l’Esprit des montagnes (2011 ), la cinéaste ouvre son film par cette approche ( superbes séquences , de la fabrication « amoureuse » des haricots confits , commentées par la vielle dame ) tendre et enjouée entre les deux personnages ( lui bougon , elle pleine de vie ) si différents , auxquels va se joindre une jeune étudiante solitaire, Wakana ( Kyara Ushida ) dont la petite boutique est le rendez-vous -refuge agrémenté de la dégustation des ses gâteaux favoris. Autour de ce trois personnages, le fil des destinées se retrouve autour d’affinités et de douleurs secrètes qui vont petit sourdre , en non-dits et en suggestions . Noami Kawase nous donne à voir et à comprendre la lente approche qui va les réunir dans la compréhension et la souffrance , comme le dira par exemple ,Tokue au vendeur » J’ai vu dans vos yeux lors de ma première visite à l’échoppe , toute la douleur rentrée que je gardais aussi dans mon cœur » . Des fardeaux douloureux qui sont difficiles à faire taire et qu’un certain partage peut permettre de mieux supporter le poids , celui par exemple , des formes d’exclusion et de rejet , que le regard des autres rend si difficile …

Ce rejet dont Tokue fut jadis victime, porteuse de la maladie de la lèpre et mise au banc de la société , intégrée dans un institut spécialisé et empêchée de mener à bien sa grossesse. Au cela du constat et de la dénonciation sur le sort jadis réservé aux lépreux au japon , la cinéaste y renvoie le regard de la société d’aujourd’hui, lorsque celui de certains -au vu des mains déformées de Tokue- commencent à faire courir « la rumeur » sur sa maladie , et à demander son renvoi de la boutique … la vielle dame sage qui a réussi à se construire son refuge pour surmonter ses blessures résiste, et va transmettre sa foi et les valeurs ( le théme cher à la cinéaste de la croyance à certaines forces invisibles…) qui lui ont permi de le faire , à ces deux autres blessés de la vie qui s’étaient enfermés ( l’une dans sa solitude et l’autre dans le refuge de l’alcool ) pour leur faire oublier , et le libérer de leurs traumatismes . Le « passage de témoin » , via la recette culinaire étant la belle idée du film « Elle leur permet de s’affranchir et de croire en ce qu’ils sont , cette modeste avancées est décisive pour leur vie future » , dit la cinéaste . Une scène magnifique l’illustre , avec poésie, qui nous montre Takue face à un canari en cage qui semble ( elle l’entend… ) , lui susurrer à l’oreille « libère-moi! »
Les délices de Tokyo est un beau film sensible et émouvant à ne pas manquer …
(Etienne Ballérini )
LES DELICES DE TOKYO de Naomi Kawase -2015-
Avec : Kirin Kiki, Masatochi Nagase , Kyara Uchida…
[…] (2005). « Le premier film d’horreur végétarien de l’histoire du cinéma ». Canal+ à 19h50 Les délices de Tokyo de Naomie Kawase (2016). Arte à 22h45. Snowden d’Oliver Stone (2016). Avec Joseph Gordon […]