Je me souviens de Srebrenica

Réquiem pour SrebrenicaJe me souviens du festival d’Avignon en 1999.
Je me souviens de cette fin juillet, c’était au gymnase du lycée Aubanel, transformé chaque juillet en salle de spectacle du In.
Je me souviens que sur scène il y avait Anne Bellec, Irina Dalle et Frédérique Ruchaud.
Je me souviens qu’elles étaient un chœur de 3 femmes, trois suppliantes, dans la grande tradition de la tragédie grecque.
Je me souviens que le texte se composait d’extraits de déclarations d’hommes politiques, de militaires, de médecins qui s’entretiennent parfois avec des journalistes, de témoignages de journalistes et de rescapés.
Je me souviens qu’ils parlaient, par la bouche et par le corps de ces 3 femmes, d’une chose horrible qui s’était passé le 11 juillet 1995.
Je me souviens qu’il est très difficile de parler d’une chose horrible.
Je me souviens qu’un homme de théâtre a osé le faire.
Je me souviens que c’est le rôle du théâtre de parler du mal-être du monde, même si ça dérange, surtout si ça dérange.

Srebrenica
Srebrenica

Je me souviens que le 11 juillet 1995, l’enclave de Srebrenica tombait aux mains des forces armées serbes dirigées par le Général Mladic.
Je me souviens que la communauté internationale a laissé faire, et que des responsables ont laissé l’Histoire s’imposer à jamais par négligence, par incapacité, par impuissance.
Je me souviens que deux ans auparavant, le général Morillon, commandant en chef à l’époque de la FORPRONU (Force de protection des Nations Unies) l’avait promis : “Je ne vous abandonnerai jamais.”
Je me souviens qu’environ 42000 personnes sont livrées, sans défense, aux troupes ennemies.
Je me souviens du massacre de 8 372 hommes et adolescents bosniaques.
Je me souviens des voix sobres et de l’attitude digne de comédiennes comptables des misères encourues par les victimes.
Je me souviens que le décor était d’acier, des tubes métalliques lançaient des tintements sinistres.
Je me souviens que l’homme de théâtre qui a effectué ce montage de textes, avec la collaboration de Philippe Gilbert, et l’a mis en scène, est Olivier Py.

Réquiem pour Srebrenica (Affiche)
Réquiem pour Srebrenica (Affiche)

Je me souviens que ce spectacle s’appelait : « Requiem pour Srebrenica ».
Je me souviens que, à la sortie, j’ai voulu dire quelque chose à Olivier Py mais que je n’ai pu achever tellement je pleurais.
Je me souviens qu’on a appelé « Requiem pour Srebrenica » du théâtre documentaire.
Je me souviens que tout théâtre se doit d’être documentaire.

Jacques Barbarin

 

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