Cinéma / VICE VERSA de Pete Docter et Ronaldo Del Carmen.

Plongée au cœur du cerveau d’une petite fille joyeuse de onze ans, qui, suite au déménagement de ses parents devient dépressive et a du mal a se faire à sa nouvelle vie . Le film signé par le réalisateur de Monstres et Compagnie et de Là haut ; bourré d’une créativité qui rejoint celle du Lewis Caroll d’Alice au Pays des Merveilles , nous offre un film en forme de voyage intérieur dans le monde des émotions transformées en personnages décapants. Un vrai régal

l'Affiche du Film.
l’Affiche du Film.

Nous sommes donc dans le Midwest des Etats-Unis où Riley une jeune ado de 11 ans, fan et joueuse de Hockey et plutôt joyeuse dans la vie de tous les jours et s’est faite des amis , a commencé a engranger des souvenirs d ‘une enfance heureuse…jusqu’au jour où elle apprend que ses parents ont décidé de déménager pour s’installer dans une autre région où se trouve la grande ville de San Francisco. Destabilisée et perturbée à l’idée de perdre ses amis et ses repaires, la petite Riley est envahie d’émotions contradictoires, c’est un peu une partie de son enfance qui est en train de s’enfuir . Dès lors tout un chambardement se produit dans la tête de Riley…et c’est au cœur du contrôle du quartier général de ses émotions situé dans son cerveau , que les auteurs du film nous invitent à pénétrer . Une salle où se trouve réuni tout un monde au travail pour tenter de maîtriser la machine et éviter qu’elle ne dysfonctionne, et soit envahie par la dépression. C’est la belle et superbe idée du film qui ose l’introspection « psychanalytique » de l’inconscient ( dont le cinéaste avait déjà exploré les « peurs » enfantines dans Monstres et compagnie ) , où les personnages les plus débridés prennent – ici- vie pour nous raconter l’aventure d’un voyage au cœur des émotions d’une identité en train de faire sa métamorphose .

Aux manette de la salle des commandes des émotions
Aux manette de la salle des commandes des émotions

Pete Docter explique « l’adolescence est un sacré truc ! .La bulle de l’innocence de l’enfance explose et vous êtes plongés dans un monde d’adultes où l’on vous juge, où l’on attend de vous, que vous comportiez d’une certaine façon »,  dit-il expliquant qu’il s’est inspiré de sa fille ( elle était la voix D’Ellie dans Là Haut ) «  une gamine bourrée d’énergie et d’enthousiasme comme le personnage d’Ellie . Au moment du tournage de Vice Versa elle venait d’avoir 11 ans , et j’ai remarqué qu’elle était devenue moins remuante , plus silencieuse et renfermée . Je me suis demandé alors ce qui se passait dans son esprit et pourquoi elle était en train de changer » , explique-t-il . Dès lors, l’idée et le film se concrétise tenant compte aussi des études scientifiques et des spécialistes ( dont le Docteur Dache Keltner professeur à l’université de Californie à Berkeley ) avec lesquels son équipe a travaillé… pour en sélectionner les émotions principales qui donneraient vie aux personnages « cartoonesques » représentatifs . Et voilà donc , comment sont nés ceux qui se retrouvent aux commandes du quartier général du cerveau de Riley  avec à leur tête : Joie , débordante d’optimisme qui veille au bonheur de Riley et qui doit tenir en laisse Tristesse la gaffeuse défaitiste qui se traîne malgré sa bonne volonté .Il y a aussi , Dégoût sorte de pin -up verte qui veille a ce que Riley ne se laisse pas déborder et empoisonner la vie ; il y a Colère un nain rouge ( de colère!) qui va tout faire pour que dans cette tour de contrôle la justice règne pour Riley, et enfin , il y a Peur la névrotique(?) chargée de la sécurité pour Riley . Au côté de ces émotions principales, viennent se joindre de nombreux personnages qui peuplent les autres régions de l’esprit et accompagnent chaque étape du récit du parcours émotif de Riley qui doit s’adapter à sa nouvelle vie …et découvrir d’autres sensations , perdre un peu de son enfance , et d’inventer d’autres émotions.

Joie et Tristesse
Joie et Tristesse

Le voyage en compagnie de l’inventivité créative , de l’équipe de Pete Docter et des studios Pixar, est tout simplement extraordinaire et on reste les yeux ébahis ( comme des enfants ) devant cette énergie qui fait feu de tout bois et vous laisse scotchés à l’écran . La réussite est d’autant plus spectaculaire que le divertissement et les gags qui en sont le fil rouge se construisent sur cet autre fil d’ariane de la crise d’adolescence, dont les auteurs nous proposent de suivre l’aventure dans les tréfonds labyrinthiques de l’inconscient , des souvenirs , des rêves et de la pensée qui vagabonde en quête d’un équilibre à trouver . Magnifiques scènes de « panique » illustrant les « pertes » momentanées (?) de quelque-unes de ces îles-refuge de la personnalité et de l’équilibre : l’île de l’amitié, l’île des bêtises , l’île de la famille, l’île de l’honnêteté …dans lesquelles ( superbes scènes ) le train tout-terrain peut se rendre , si les rails ne sont pas entravés ou la voie coupée par la pensée dépressive . Laissant la place à ces coins reculés dont la crise d’angoisse provoque les remous incontrôlés et les risques définitifs de perte des souvenirs . Autre magnifique séquence avec le personnage du vieil ami et compagnon de la petite enfance , Bing Bong , dont le corps est composé de barbe- à- papa autour d’un cœur en nougat ( il est mi-chat , mi – éléphant et même mi-dauphin selon lui..), qui a été relégué aux oubliettes depuis que Riley a eu quatre ans , et qui erre comme une âme en peine tentant désespérément de garder les objets-souvenirs des moments vécus avec Riley qu’il espère , ne l’a pas oublié . Alors , lorsque Joie et Tristesse qui finissent par « s’allier » pour aider Riley à surmonter sa crise d’adolescence, et que , perdues dans le labyrinthe des profondeurs où règnent les Oublieurs chargés de faire le « tri » et éliminer les souvenirs …vous ne serez pas surpris que Bing Bong se mette à leur service pour les aider, et donc,  aider celle qu’il n’a jamais oubliée . Quitte a en passer par les épreuves de la dangereuse zone de la pensée abstraite où l’on peut y perdre son identité … se démenant comme un beau diable , il les aidera a retrouver le chemin , à remettre les « boules » multicolores dans l’ordre et dans les bonnes cases pour que leur protégée redevienne , une joyeuse jeune fille qu’ils auront aidé à grandir …

Les îles- refuges
Les îles- refuges

On l’a dit, l’inventivité des créateurs dans le graphisme et dans la conduite du récit est absolument foisonnante , et elle est sublimée par les personnages que les auteurs ont su rendre attachants , même les plus improbables qui finissent par « dévier » de leur attributions … perdant parfois, eux aussi , leur équilibre. Toutes les cinq « émoticônes » sont épatantes , et Peur est impayable avec son nœud « pap » et ses transformations de coiffure et de silhouette, et Ping Pong qui a peur de perdre son identité et de finir dans les oubliettes, est touchant . Mais bien sûr , Joie et Tristesse qui ont la lourde tâche de représenter les deux émotions dominantes et  contraires de Riley , joueront un rôle déterminant . Les auteurs on su habilement glisser chez l’une comme chez l’autre, les failles de leur propres émotions contre lesquelles elle luttent ( surtout Tristesse) , pour ne pas compromettre la bonne marche de Riley dans la quête de son nouvel équilibre d’adolescente . Quant’aux parents ils ont aussi leurs propres émotions …d’adultes responsables . Dévouée comme la mère soucieuse de son foyer mais aussi rêveuse et anti-conformiste. ou passionné de sport et distrait comme le père, mais père aimant de sa famille et sachant prendre les responsabilités pour qu’elle soit à l’abri , comme ce déménagement nécessaire à sa carrière dans cette période de crise. Le film nous offre aussi quelques belles scènes de leur vie quotidienne, d’hier ( les flashs-backs , souvenirs ) , et dans leur nouveau domicile …

Colère.
Colère.

Dès lors, vous l’aurez compris il est difficile de résister au plaisir de cette plongée dans les émotions dans laquelle nous convie Pete Docter associé à Ronaldo Del Carmen. Lorsque le cinéma de divertissement allie la créativité et le sens du récit pour élever le cartoon à la dimension du mélodrame des émotions, et que le pari (risqué…) sur un sujet ambitieux est tenu au delà de toutes les attentes , alors on ne peut qu’applaudir .

(Etienne Ballérini)

VICE VERSA de Pete Docter et Ronaldo Del Carmen-2015-
Scénario ; Pete Docter, Meg LeFauve et Josh Cooley.
Producteurs : John Lasseter, Andrew Staton.
Chefs animateurs des personnages:Victor Navone , Shawn Krause.
Directeur de la Photographie : Patrick Lin .

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