ANA ARABIA d’Amos Gitaï
Le réalisateur de Kadosh et Terre Promise, propose dans son nouveau film la captation en un seul plan- séquence de la vie quotidenne d’une petite communauté de réprouvés juifs et arabes, co-habitant dans une enclave entre Jaffa et Bat Yan en Israël . La coexistence possible en forme d’espoir , en un film en forme de une métaphore universelle sur une paix toujours mise en danger. Tourné en 2013 , il offre un écho aux événements tragiques qui se déroulent aujourd’hui dans cette partie du monde. Un film admirable à ne pas manquer…

La jeune journaliste Yaël ( Yuval Scharf) se rend dans cette enclave en forme de bidonville située près de Tel Aviv pour s’entretenir avec ceux, juifs et arabes , qui y vivent en communauté , afin de connaître la réalité de leur quotidien . Quels sont leurs rêves ? , leurs espoirs , et leurs désillusions dans un contexte politique de tensions raciales qui ne les facilité pasuvre, sur la manière d’explorer les récits et histoires s’incrivant dans un contexte de conflits et de préjugés.
L’idée lui en est venue , comme il l’explique dans le dossier de presse du film sur une réflexion faite de l’accumulation de plusieurs sources , récits et témoignages ( les documentaires sur la région de wadi au Nord d’Israël ) qui font état de comportments de transgréssion face à la haine communautaire et les conflits qu’elle engendre . Et c’est notamment un récit lié à l’actualité qui a fini par le persuader, celui de la destinée d’une femme d’un village du Nord d’Israël qui y a vécu auprès d’un mari Musulman et avoua son origine juive et sa naissance en camp à Auschwitz « cette histoire est une des rares preuves d’amour et d’amitié – surtout dans cette région remplie de haine et de conflits,entre une femme juive et son mari musulman. On dit qu’ils ont eu 5 enfants et 25 petits enfants . Celà a été le début de ma réflexion sur la manière de raconter cette hsitoire qui dépasse les limites des préjugés et des hostilités » , dit-il .

Yaël la jeune journaliste va donc, ici , chercher à savoir comment est ressenti le quotidien par les arabes et juifs qui vivent dans cette enclave près de Tel Aviv, enclave en forme de bidonville soumisse à la fois à la préssion immobilière et aux tensions du contexte politique . Une zone de laquelle on cherche , par exemple , à mettre dehors les Palestiniens d ‘origine. Mais encore ( et jusqu’à quand ) restée un lieu de préservation d’un mode de vie qui tient presque du miracle « il y a une certaine beauté qui se dégage de ce Bidonville , car il met en lumière la capacité des individus à façonner leur propre environnement . Ainsi vous pourrez voir à l’entrée quelques vieux arbres que personne ne veut couper , puis quelques maisons rafistollées avec des câbles sortants , des réparations éffectéues à la va vite , et pour compléter le tout des petits jardins avec un verger . Il y a aussi un garage improvisé où les gens vivent là et réparent les quelques voitures qui passent ... » , reléve le cinéaste . Et, c’est cette vie là que découvre , subjuguée, la jeune journaliste qui ne peut plus se détacher de ces personnes qui lui racontent leur vie et se confient avec un naturel confondant « c’est une mine d’or , j’ai de quoi écrire plusieurs histoires … » dit -elle au téléphone, à sa rédaction . Yaël qui a vécu sa jeunesse au cœur des tensions, n’imaginait jamais découvir,dans cette enclave, des hommes et des femmes qui n’ont ni dans la bouche ni dans leur cœurs , les mots de cette haine dont dans leurs situations respectives ( la femme juive de celui-ci , le mari musulman de celle- là ), car des liens noués, ils ont eu à sadapter et supporter les conséquences d’un regard extérieur qui en condamne les ( leurs ) choix .

Yaël , qui écoute et qui suscite les condidences au fil des rencontres dans le sillage de son contact, Yusuff ( Yussuff Abu Warda ) qui va permettre la connecion et faire s’installer la confiance avec ses proches mais aussi les voisins ou voisines:Miriam ( Sarah Adler ), Sarah ( Assi Levy) , Hassan ( Uri Gavriel ), Norman ( Mrman Issa ), ou encore Walid ( Shadu Srur ). Chacun s’ouvre à l’étrangère , comme il s’était ouvert jadis à l’autre et à l’acceptation de sa différence. Au cœur des rencontres de Yaël c’est le même processus de réception et d’accueil de l’autre qui se perpétue. Le récit et la mise en scène s’inscrivent au cœur même de ce processus et premettent de mieux comprendre la logique de ce que fut l’engagement de ces hommes et de ces femmes . Engagement d’un passé dont la portée va influer sur le présent et s’incrire comme une nécéssité qui va revêtir la dimension de la métaphore Universelle dont le cinéate, qui l’a voulue , mesure et souligne, ce qu’ elle représente comme « lien » nécéssaire à prendre en compte pour une co-habitation pacifique qui dépasserait les limités de l’enclave « ils sont liés et doivent trouver des solutions pacifiques pour coexister , trouver des manières pour que chacun vive sa vie, pour qu’ils se nourrissent et se stimulent les uns les autres et non pas , uniquement par des conflits perpétuels » , explique Amos Gitaï.

Et il inscirt cette logique dans la conduite d’un récit et d’une mis en scène qui lui offre par ses choix la dimension unique de s’y développer au cœur d’ un plan-séquence ( superbe performance !) de 80 Minutes réalisé en continuité et sans aucune montage ni coupure , restituant la rencontre de Yaël avec les habitants de cette enclave, avec un naturel époustouflant . A la fois dans la manière de vivre cette approche comme dans la restitition du naturel des confidences qui s’y inscrivent . Mais également par le biais de cette prouesse technique qui permet d’en restituer, la dramaturgie ( et son rythme s’incrivant dans l’espace et la continuité du temps, de sa lumière ) qui permet de relier les personnages et les fragments de leurs confidences dans une sorte d’osmose dont l’enjeu voulu par le cinéaste était , d’y offrir la nécéssaire dimension politique : » la continuité et le rythme englobent ces fragments et ces personnages .C’est aussi en un sens une revendiqcation politique où j’affirme que la destinée des juifs et des arabes sur cette terre ne sera pas séparé » exlique-t-il.
Le cinéaste dans sa longue filmographie ( 80 films à ce jour ) a , en effet , toujours cherché à analyser y compris au travers de ses expériences personnelles ( son film Kippour / 2000 , se faisant par exemple l’écho de sa participation en tant que jeune soldat à cette guerre de 1973 ) , pour décrypter par ses recherches artistiques et stylistiques, les éléments et les contradictions révélatrices d’un réalité du monde contemporain. En ces temps sombres de haine attisée et de conflits, le message de paix d’ANA ARABIA est une leçon de vie et de cinéma , que nous offre ce grand cinéaste . Merci Monsieur Gitaï …
(Etienne Ballérini )
ANA ARABIA – 2013- Sélection mostra de Venise –
Avec : Yuval Sharf, Yussuf Abu Warda,Srah Adler, Assi Levy, Uri Gavriel, Norman Issa,
Shady Srur ….