Depuis onze ans, Fairplaylist promeut une musique éthique et solidaire. Depuis quelques mois, elle a lancé dans les Alpes Maritimes, un label FaceB « certifiant une musique représentative de la diversité culturelle et des moyens équitables de la produire et de la diffuser : transparence économique, pédagogie auprès du public, répartition plus juste des revenus, respect de l’autonomie de l’artiste, etc. » Nous en avions déjà parlé sur le blog (lire l’article ici). Les évènements de Face B s’organisent en trois temps dans trois endroits autour d’un artiste : deux concerts à la Zonmé à Nice et à la MJC Altitude 500 à Grasse et une session/rencontre à la médiathèque de Mouans Sartoux où les professionnels se réunissent. (voir le programme ci-dessous)

Du 15 au 17 mai, ce sera la chanteuse Clarika qui viendra sur la Côte. Cette artiste compose depuis presque 20 ans une pop acidulée et engagée. Ses compositions à la fois délicates et pleines de caractères pourraient très bien se retrouver dans le circuit commercial mais voilà, ce n’est pas vraiment le cas. Sa musique n’est pas assez soumise et au travers d’un genre assez populaire, distille une originalité qui attire autant qu’elle dérange les chiens de garde de ce qu’il faut écouter. C’est alors toujours un ravissement que de l’entendre en concert où elle dégage donc une énergie rare, remplie de partage. En première partie, il y aura la jeune Clarcen, un jeune talent prometteur et originaire d’ici.
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Pour mieux vous présenter Fairplaylist et Face B, entretien avec Gilles Mordant, son fondateur.
Comment est venue l’envie de monter Fairplaylist ? Il y avait vraiment ce besoin d’amener ce « commerce équitable » dans l’univers de la musique ?
L’envie de monter Fairplaylist remonte à 2003, après les grandes grèves intermittentes. C’est aussi la suite de longues discussions avec des amis qui ne travaillaient pas forcément dans le domaine de la musique mais dans celui de l’éducation et du développement. C’est aussi la crise du secteur de la musique des années 2000, la globalisation de l’économie, les empires qui se montaient (Sony, Universal). Il y avait donc une perte de la diversité ou au moins de sa visibilité. On assistait au début du commerce équitable. Alors, je me suis dis qu’il pourrait y avoir là, une solution pour soutenir la diversité culturelle, de soutenir ces musiciens qui n’ont pas envie d’être formatés. Car il y avait beaucoup de musiciens qui s’autoformataient. Cette idée d’avoir une musique « équitable », un labellisation qui reconnaisse une certaine pratique musicale, a fait naitre Fairplaylist avec une approche filière, une idée de transparence, de développement durable, d’équité. C’était il y a 11 ans.
Ce ne fut pas difficile à mettre en place ? Avoir une réflexion sur une pratique artistique n’est pas quelque chose forcément facile à faire. Même si dans une discussion cela paraît simple, quand on rentre dans l’action, c’est complexe. Mettre en place cette musique éthique et solidaire est donc un long chemin. On a célébré les 50 ans de Nature et progrès – qui ont créé le label bio. Ils ont mis 30 ans pour que ce label voit le jour. J’en suis à 11.
Venir voir un concert labellisé Fairplaylist est donc un acte militant ? Soutenir la diversité, le choix d’une certaine idée de la musique et de sa pratique, c’est aussi soutenir une éducation à la musique, l’éducation populaire. C’est donc de la politique car engage une certaine forme de pratique d’échange de connaissances. Et c’est aussi bien évidemment faire des choix économiques. C’est un acte militant.

Quelles sont les raisons de votre installation dans les Alpes Maritimes ? La Côte d’Azur est malheureusement moins connu de nos jours par son côté culturel. Pourtant, il y a des années, tous les grands artistes y venaient. Il y a une vraie richesse, une identité culturelle, une langue que l’on peut entendre au travers de la musique occitane. Et puis il y a énormément de labels et d’acteurs de la musique. Or avec FaceB, On essaye de s’implanter dans différentes régions mais on s’aperçoit que suivant les régions, il y a de grandes disparités. C’est rare de voir les régions où il ne manque rien (distributeurs, musiciens, labels…).
Comment se sont déroulés les premiers concerts ? Les premiers concerts de FaceB, le label de Fairplaylist, ont été très positifs même si c’est difficile de faire sortir les gens surtout pour des choses atypiques. Ils sortent pour des choses très chères qu’il ne faut pas manquer et qu’ils connaissent sur le bout des doigts. Pour, les choses rares et surprenantes, ils hésitent. A la Zonmé à Nice, il y a eu énormément de monde avec Melissa Laveaux, notre premier concert. Ce fut plus difficile à Grasse mais cela représente aussi l’état général des lieux de la culture, des salles et du pouvoir d’achat des gens. Il y a beaucoup de critères et c’est assez difficile de travailler dans l’économie de la musique. Nous avons un bon retour du public de la billetterie mise à nu. Il y a encore quelques années quand on faisait une entrée payante à 10, 12 ou 15 euros, les gens nous demandaient pourquoi c’était si cher, pourquoi ce n’était pas gratuit. Depuis la billetterie mise à nu, plus personne ne me dit quoi que ce soit. Ils savent où va l’argent et à quoi il sert. Cela revient à la notion de militantisme et de politique. On est toujours considéré comme des consommateurs mais l’idée c’est de devenir un « consomacteurs ».

Comment sont choisis les artistes ? On a de la chance à Fairplaylist d’avoir des musiciens relativement connus qui veuillent bien venir se prêter au jeu de sessions équitables et de billetterie mise à nue. Le choix des artistes se fait souvent au fil des rencontres. Etant moi-même musicien, j’en rencontre beaucoup et je vais les voir pour leur présenter le projet. Il y a aussi ceux qui me contactent. Cependant, travailler ensemble ne se décide pas juste sur j’aime ou j’aime pas ou si un musicien en fait la demande. Il faut faire connaissance, c’est tout un processus.
Quelques mots sur Clarika qui vient les 15, 16 et 16 mai sur la Côte d’Azur ? Clarika est quelqu’un qui a un talent d’écriture extraordinaire. Elle s’est baladée sur cette pop à elle depuis 20 ans et a influencé plein d’artistes d’aujourd’hui. C’est aussi une vraie personnalité, un vrai caractère avec beaucoup d’esprit. Elle a beaucoup de chose à dire.
Entretien réalisé par Julien Camy
Le programme de Clarika
Jeudi 15 mai – Grasse Une super soirée avec repas, DJ et concert (avec Clarcen en première partie) à partir de 19h30. Dans la superbe salle d’ECA 500 à Grasse (57 avenue Honoré Lions) Concert+repas : 20 € (22 € sur place) Concert seul : 13 € (15 € sur place)
Vendredi 16 mai – Mouans-Sartoux 14 h : Rencontre professionnelle pour la création d’un label éthique et solidaire en musique (en présence de Clarika) à la médiathèque 20 h : Concert – rencontre dans le Parc du château.
Samedi 17 mai – Nice 20h30 : Concert intimiste à la Zonmé (7bis rue des combattants enAfrique du Nord 06000 Nice) Plus d’infos : www.fairplaylist.org/