Cinéma / UN BEAU DIMANCHE de Nicole Garcia

UN BEAU DIMANCHE de Nicole Garcia.

Le nouveau film de la réalisatrice d’ Un Balcon sur la Mer,  offre  au travers des destinées et des failles de ses personnages un superbe récit aux élans romanesques au cœur desquels s’inscrit la fable sociale et les secrets porteurs des brisures affectives. C’est  en affrontant ces secrets enfouis au plus profond  que  les  êtres  qui en  souffrent,  pourront briser la spirale de la fuite en avant qui les entraîne et  conquérir la sérénité nécessaire à un nouveau départ . Un beau  et sensible voyage au coeur des sentiments…

l' Affiche  du Film
l’ Affiche du Film

Baptiste ( Pierre Rochefort , le  fils de  la cinéaste et  belle révélation) est « instit » remplaçant et ne veut être que ça , car il veut rester libre et dégagé de tous liens qui pourraient l’enfermer dans un cadre étouffant . Sandra ( Louise Bourgoin ) est une jeune femme qui travaille dans comme « saisonnière » sur une plage du Sud de la France du côté de Montpellier . Deux êtres qui semblent porter le mystère de destinées et dont les attaches rompues avec le passé reflètent le comportement solitaire dont la douleur s’évacue au cœur de ces espaces libérateurs. Etaient-ils faits pour se rencontrer ? , La cinéaste ( et son co-scénariste Jacques Fieschi ) qui aime bien explorer les zones d’ombres qui président aux destinées des personnages, comme c’était le cas dans Le fils préféré ( 1994 ), dont elle est devenue une spécialiste sensible, aime bien en approfondir le mystère comme elle le précise dans le dossier de presse du film « C’est parfois la part d’ombres des personnages qui donne l’envie de continuer, d’aller à leur poursuite, de savoir qui ils sont(…) j’avais le pressentiment qu’en allant à la recherche de Baptiste, à questionner cette solitude étrange pour quelqu’un de son âge , je tomberai sur une histoire qui me concerne intimement : le gisement qui existe dans un être, une eau qui dort…et qui peut surgir comme un élan , une libération », dit-elle joliment .

Louise  Bourgoin  ( Sandra)  travaileuse  saisonnière sur la plage
Louise Bourgoin ( Sandra) travailleuse saisonnière sur la plage

Et le déclic qui va faire bouger les choses et permettre de percer le mystère, c’est cet enfant , Mathias, ( Mathias  Brezot ) , élève de Baptiste . En ce vendredi de  fin de semaine scolaire, que personne ne vient chercher à la sortie de l’école. Mathias qui sera le révélateur d’une situation difficile  d’enfant balloté dont les parents son séparés et qui semble encombrer tout le monde, à l’image de ce père accaparé par son travail et sa nouvelle maîtresse ,et qui va le confier à… Baptiste !. Mathias, dont  la mère, Sandra, issue de milieu modeste qui s’est engagée dans des projets ambitieux pour tenter de se sortir du trou et qui , aujourd’hui l’échec au bout, se retrouve avec bien des soucis traquée par ses anciens collaborateurs , contrainte de travailler comme saisonnière pour remonter la pente et n’ayant pas le temps de s’occuper de lui. Le voilà donc, ce fil ténu d’un mystère affectif qui entoure des personnages dont la rencontre provoquée par un fait de vie,  va permettre de creuser les destinées.
Et Nicole Garcia joue la partition d’un suspense des sentiments pour nous entraîner au cœur de ces secrets dont les nuisances ont tant pesé sur leurs vies. Et dont le contraste,  est saisissant,  dans cette lumière Méditerranéenne ,  si  propice  a une certaine joie de  vivre,   et  superbement captée par la cinéaste et son opérateur Pierre Millon. Ces nuisances qui ont entraîné chez eux cette fuite en avant que symbolise  magnifiquement Sandra,  toujours en mouvement à l’image de ce tatouage reptilien qui orne son cou . Insaisissable, instable, imprévisible… à l’opposé de Baptiste qui a limité sa fuite à ces remplacements « jamais plus d’un trimestre au même poste » et à un retrait sur soi , son « carré de vie » protecteur,  en forme de rejet d’un monde dont il a souffert de l’exclusion .

Pierre  Rochefort  et  Louise  Bourgoin
Pierre Rochefort et Louise Bourgoin

Le lien tissé par Mathias va servir de révélateur et contribuer à réveiller cette « eau qui dort », évoquée par la cinéaste l’entraînant dès lors à pénétrer cette intimité des personnages dont les liens ainsi noués semblaient à l’évidence avoir étés destinés à se trouver afin de pouvoir faire sourdre et  permettre de  mettre à plat les blessures intimes et assassines qui les paralysaient , pour leur donner – enfin- la force d’affronter leur passé . Celui d’une jeune femme qui en cherchant à se sortir de son milieu social s’est laissée entraîner dans des compromissions qui n’ont eu d’autre conséquence,  qu’à l’asservir encore un peu plus et la faire sombrer dans une dépendance dont la violence qui la poursuit , va finir par lui faire trouver par la force d’un amour et d’un soutien nécessaire à cette énergie qu’elle n’avait jamais perdue,  mais dont elle se dispersait,  en illusions . A l’image de ces rencontres d’hommes attirés par son charme qui lui promettaient monts et merveilles comme le père son enfant , et auxquels elle cédait , trop confiante … ne décelant pas derrière leur assurance frimeuse leur vraie nature violente. La rencontre de Baptiste avec sa fragilité et cette souffrance qu’il traîne comme un poids, dont elle connaît aussi les douleurs, va  réveiller  ses  espoirs … .

Sandra (Louise  Bourgoin) et  son fils  mathias ( Mathias  Brezot )
Sandra (Louise Bourgoin) et son fils mathias ( Mathias Brezot ))

Cette rencontre venue à l’improviste suscitée  involontairement par Mathias, est comme une délivrance pour Sandra . Elle l’est aussi par Nicole Garcia qui en fait l’enjeu de son film. En un plan furtif  au début  du film , mais magnifique car rempli de signification on y voit Baptiste qui a revêtu la casquette de Mathias . Baptiste dont on devine qu’il se retrouve dans ce petit enfant qui est entré dans sa vie . Dès lors le destin du Trio est aussi devenu celui d’une nouvelle famille  possible  et  qui va  qui  adopter. C’est la belle idée du film qui va permettre à chacun d’affronter son passé. Désormais la fuite de Sandra et de Baptiste sera celle d’un nouveau départ . Celui qui permettra à Sandra de se glisser dans une autre vie et ne plus avoir à se compromettre dans des combines et avec des individus qui n’en sont pas dignes. «  j’ai rencontré un mec, j’ai passé un beau Dimanche » , dira-t-elle ,  à son retour du week-end en compagne de son enfant , et de Baptiste avec lequel elle est allée à la rencontre de la famille de ce dernier .

Dominique  Sanda (  Liliane)
Dominique Sanda ( Liliane)

C’est la partie qui clôt la confrontation nécessaire avec les secrets et ce passé qui tourmente Baptiste , on vous laissera la découverte des détails dont le secret est offert  en partage aux  spectateurs par la cinéaste . C’est aussi cette sensibilité de récit qui en fait le prix, celui d’une sorte de confession intime que l’on délivre comme un autre secret dont les éléments de réflexion ont été depuis sa première réalisation ( un Week-End sur Deux / 1990) toujours au cœur des films de la cinéaste : celui des conflits de classes et des ruptures ( fuites ) avec les carcans sociaux . Au cœur desquels , ici, Baptiste issu d’une famille Bourgeoise  a été l’enjeu d’un affaire de « poids de l’héritage » qui a fait ses dégâts. Et dont le dénouement va avoir lieu dans la magnifique et luxueuse villa familiale que la cinéaste traduit en un autre plan magnifique de Baptiste sortant souriant et ruisselant d’eau de la piscine, comme lavé et libéré . On ne peut pas oublier au cœur de cette visite ,  la révélation de l’autre secret , celui d’une mère  sacrifiée, Liliane ( Dominique Sanda, ) bouleversée et les yeux remplis de larmes de revoir ce fils tant aimé et dont elle s’était faite à l’idée de ne plus le revoir « un jour je me suis dit : il est mort », comme elle le confiera à Sandra . Magnifique Dominique Sanda que l’on aimerait revoir plus souvent à l’écran . Et qui est ici au service d’un récit porté par les comédiens ( Louise Bourgoin très juste et Pierre Rochefort ) dont Nicole Garcia , qui les dirige avec amour, capte avec une caméra qui les suit                  ( cadrages , mouvements ) le plus souvent au plus près, les battements du cœur de leurs personnages .
(Etienne Ballérini)

UN BEAU DIMANCHE de Nicole Garcia -2013-
Avec : Louise Bourgoin, Pierre Rochefort, Dominique Sanda, Mathias Brezot, Deborah
François, Eric Ruf, Benjamin laverhne, Jean Pierre Martins, Olivier Loustau.

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