Cinéma / TONNERRE de Guillaume Brac

TONNERRE de Guillaume Brac.

C’est dans la petite ville Bourguignonne de Tonnerre et sa campagne environnante qui  sert de cadre à une romance,  remplie des battements de cœurs inattendus que le cinéaste embrase au rythme des genres dont, subtilement, il explore les à-côtés révélateurs des blessures des des âmes , des rapports familiaux et de la violence. Le premier long métrage du producteur-réalisateur qui révèle un regard sur les individus, plein de délicatesse et de sensibilité…

l'Affiche  du  Film
l’Affiche du Film

On commencera par le « pitch » du film que le cinéaste a lui-même écrit «  Un Rocker trop sentimental, une jeune femme indécise, un vieux père fantasque. Dans la petite ville de Tonnerre les joies de l’amour ne durent qu’un temps . Une disparition aussi soudaine qu’inexpliquée , et voici que la passion cède place à l’obsession .. »  C’est donc dans cette bonne ville de Tonnerre que son héros le Rocker sentimental , Maxime ( Vincent Macaigne, épatant ) vient se « régénérer » , fuyant l’agitation Parisienne pour y travailler son nouvel Album , dont l’Univers Musical est porté par une belle bande-son signée par le compositeur- interprète, Rover. Maxime, accueilli dans la vieille bâtisse de son père ( Bernard    Menez ) un bon vivant qui cultive son jardin et maintient, aussi bien, sa forme physique en faisant du vélo, que sentimentale en vieux badin qui ne rechigne pas à conter fleurette et à faire perdurer le rythme de conquêtes qui a jalonné sa vie. Pour Maxime , qui en cette période de retrait studieux n’est pas forcément porté sur le sujet , c’est la notoriété dont il est l’objet qui la fera entrer dans sa vie à l’occasion d’un entretien pour le journal local sollicité par une jeune journaliste, Mélodie ( Solène Rigot ). Et voilà que cette autre mélodie à la musicalité sentimentale, s’empare insensiblement du cœur de notre Rocker pour l’embraser de passion.

Solène  Rigot  et  Vincent  Macaigne
Solène Rigot et Vincent Macaigne

C’est cette passion dont le cinéaste nous invite à suive les méandres d’un cheminement qui va basculer à cette « obsession », dont il  a fait le sujet central de son récit pour nous en livrer une exploration dont la rupture emblématique de la disparition soudaine de Mélodie va se faire le miroir des ruptures de tons des genres dans lesquels il l’entraîne volontairement pour s’en éloigner et construire , au fil des événements , un conte de cinéma au cœur duquel la poésie et de la dérision, apportent la distance voulue . «  Avec cette comédie sentimentale qui glisse vers le drame et le film noir , j’ai eu le sentiment d’inventer mon propre territoire de cinéma , de tenter quelque chose de risqué mais qui m’appartient totalement . Maintenir cet équilibre instable entre gravité et légèreté , entre insouciance et violence jusqu’à brouiller les repères émotionnels du spectateur , ça a été le grand enjeu de ce film , a l’écriture , au tournage, au montage » , explique le réalisateur dans le dossier de presse du film . Pari réussi à la vision des événements dans lesquels le cinéaste nous entraîne …

Bernard  Menez  et Vincent  Macaigne
Bernard Menez et Vincent Macaigne

En effet ,entre le Rocker et la jolie et jeune mélodie dont la différence d’âge fait jaser certains, pourrait, sur via ce texto « vengeur » de son ex- petit ami ( Jonas Bloquet ) se transformer en mélodrame que la passion et la jalousie feraient basculer vers le drame . Offrant en filigrane les éléments d’enquête d’un Polar lorsque la disparition , sans explications , de Mélodie , et le rejet dans lequel maxime est relégué le fait basculer vers des pulsions de violence. Ce sont ces pulsions que le cinéaste explore et organise comme moteur de son récit . Un choix habile qui permet de mettre à nu ses personnages par le biais de leurs failles et de la capacité qu’ils ont ( ou pas ) de les maîtriser. C’est au bout du compte ( et du conte , qui en découle ) la capacité d’y faire face, et de mettre à l’épreuve sa propre humanité dans les situations extrêmes, que le cinéaste traque .

Maxime  ( Vincent  Macaigne)   dans la salle de  bain en compagnie du chien de  son père
Maxime ( Vincent Macaigne) dans la salle de bain en compagnie du chien de son père

Cette humanité dans laquelle il nous immerge dès le début avec la découverte de cette région , de ses paysages ( la séquence dans la montagne enneigée , et celle de la promenade en barque sur le lac) , et des gens qui l’habitent avec les petites « notations » sur les habitudes : le vin qu’on y fait déguster ( le chablis), la chaleur des habitants ( l’invitation à dîner d’un admirateur qui confie ses idées noires à Maxime ). Une humanité dont il met à nu les souffrance en n’hésitant pas à utiliser une certaine impudeur pour la révéler à l’image de la magnifique scène où maxime explose littéralement en pleurs, en cris, en gémissements lorsqu’il mesure la perte de Mélodie . De la même manière qu’il fait sourdre l’émotion autour d’un poème récité par une petite fille sous les yeux de la tablée transportée à l’image de la Grand-mère qui mesure , avec les souvenirs qu’il fait remonter, le poids de la transmission … ce sont de moments superbes.

Maxime (  Vincent  macaigne )  et mélodie  en  promenade au bord  du lac
Maxime ( Vincent Macaigne ) et mélodie (Solène  Rigot )   en promenade au bord du lac

Comme il fait revendiquer par le père de Maxime ce « jardin secret » qui lui a permis de faire face à la maladie qui a emporté sa femme jadis . Et il y a cette scène magnifique où ce dernier qui a fait de son chien un compagnon d’infortune  « il a vécu le drame de l’abandon, c’est pas rien »  et qu’il tire de sa mélancolie en lui récitant un poème de Musset . Irrésistible !…et puis , il y a ce relationnel père-fils qui traverse le film saupoudré au fil des jours et du quotidien de la cohabitation, d’une forme d’approche et de reconquête de l’un et de l’autre qui passe par les non-dits qui se libèrent, à la fois dans ces reproches d’une souffrance gardée au fond de soi , puis, dans une complicité trop longtemps retenue qui se libère, en même temps que les mots qu’on n’osait pas dire . Cette mise à nu des blessures qui se joue sur le tempo des sentiments , est servie par des interprètes complices dont en premier lieu , Vincent Macaigne par ailleurs aussi metteur en scène de Théâtre et comédien fétiche du cinéaste depuis Le Naufragé ( Court métrage / 2009), Un monde sans femmes  ( Moyen métrage / 2011) et ce premier long métrage. Sans oublier la jeune et prometteuse Solène Rigot   ( Mélodie ) et Jonas Bloquet ( son ex , déjà remarqué dans Elève Libre de Joachim Lafosse / 2009 ) , sans oublier bien sûr Bernard Menez employé habilement dans un registre qui tout en gardant le « bagou » du comédien , l’entraîne vers des horizons plus subtils …
(Etienne Ballérini ),

TONNERRE   de  Guillaumle  Brac – 2013-                                                                                                  Avec: Vincent  Macaigne , Solène  Rigot , Bernard  Menez , Jonas  Bloquet Hervé  Dampart , Marie-Anne  Guérin .                                                                                                                                   Musique :  Rover

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