Cela fait déjà deux semaines que Neuf mois ferme d’Albert Dupontel est sorti sur les écrans. Pourtant, nous ne l’avions pas chroniqué sur ciaovivalaculture. Honte à nous ! Surtout qu’il connait un joli succès mérité .
Cela confirme que le rapport qualité/prix de Dupontel (si tant que l’on puisse parler comme cela d’un objet culturel, mais c’est aussi une industrie) est bien plus grand que celui d’un Dany Boon, qui avec son Eyjafakupffrtejhbkhdfqdsc fait un peu flop. Pourtant si Dany Boon fait flop avec tous ses films depuis les Ch’tis, il continue d’être payé des millions. Allez comprendre cette logique. Quant à Dupontel, lui, il continue à son échelle, de réaliser de franc succès publics et populaires avec toujours son univers si personnel, complément barré et déjanté, son humour trash et gore. Neuf mois fermes est bien dans la même lignée. Ce n’est pas un homme à compromission.
Ariane Felder est une juge célibataire, n’aimant pas s’amuser préférant se concentrer sur ses dossiers. Son sérieux va pourtant se trouver perverti un soir de réveillon dont elle ne se souvient plus. Quelques mois plus tard, on lui apprend qu’elle est enceinte. Utilisant les moyens de la justice pour connaitre le père, elle s’aperçoit que celui-ci est un dangereux criminel déjà fiché, Bob Nolan, arrêté pour avoir découpé et mangé les yeux d’un vieillard.
Le film commence par un scène de réveillon dans le hall du palais de justice, suintant le malsain. Dupontel sait tout de suite comment installer ce style d’ambiance mais en en faisant trop, toujours beaucoup trop pour que ce malsain ou gore en devienne hilarant, burlesque. Parce que tout le film est ainsi, too much, de la scène d’avortement à celle de l’autopsie en passant par les différentes versions imaginées du meurtre. Cela louche – comme le légiste, un Philippe Duquesne, excellent ! vers la bande dessinée par cette surabondance de personnages caricaturaux et d’invraisemblances. Dupontel est un fan des Monthy Python et cela se voit.

Depuis que Bernie son premier film, qui l’avait propulsé sur le devant de la scène cinématographique, Dupontel ne change pas d’un iota. Tous ses films dézinguent à tout va. Une caméra rempli d’une énergie débordante, une jubilation sincère de faire du cinéma, un sens de l’effet et du grotesque. Voilà les forces du cinéma de Dupontel. Mais surtout, il a cette capacité à donner du corps et de l’âme à ses personnages. C’est cela un des points les plus importants pour réussir une telle comédie. C’est très difficile ce genre d’entreprise. Les personnages du criminel interprété par Dupontel ou de la juge interprétée par Sandrine Kiberlain sont attachants immédiatement. Surtout, on y croit malgré leur exagération,et leurs stéréotypes. Kiberlain comme Dupontel jouent très souvent sur ces fissures qui humanisent leurs personnages. Ils aiment marcher sur cette corde où le juste équilibre est délicat. Soulignons quand même que Kiberlain s’affirme de plus en plus comme une actrice extrêmement drôle depuis quelques films (Tip Top, Les Gamins, Pauline Détective…). Après avoir été cantonée très longtemps aux drames, elle explose aujourd’hui dans un autre genre, prenant un plaisir non dissimulé à l’écran pour ces rôles de déjantées.
On vous dirait bien d’avoir le coeur accroché pour Neuf mois ferme car des bras sont coupés, des yeux mangés mais en fait ce n’est pas la peine. Le dixième degré d’humour bat son plein et fonctionne à merveille. Il est rare de rire d’une énucléation ou d’une amputation. Dupontel y arrive. C’est bien un des seuls.
Julien Camy
PS: quelques petites apparitions savoureuses sont à chercher dans le film notamment le Monthy Python Terry Gilliam (déjà vu dans son précédent Enfermé dehors), Jean Dujardin, Ray Cooder, mais aussi les réalisateurs Gaspard Noé et Jan Kounen.