La pièce dont je vais vous parler a deux points communs avec la précédente, Dans la solitude… : C’est la même compagnie, le Théâtre de Paille et l’un des acteurs s’y retrouve, Christophe Lappara

Spiro Scimone est l’un des meilleurs auteurs siciliens d’aujourd’hui. Il a commencé par écrire en dialecte sicilien (Nunzio, Bar) puis, dans ses œuvres plus récentes, il a choisi d’expérimenter une mélodie différente en optant pour l’italien.
Nunzio parle de la Sicile actuelle où plane l’ombre de la mafia, sans que jamais on ne la nomme, à travers l’histoire de deux amis qui partagent un appartement. Nunzio, de santé fragile, attend le retour de Pino, qui s’absente souvent, sans jamais rien lui demander. Où et comment gagne-t-il tant d’argent ? Quel travail fait-il? Mystère…
Nunzio, est employé dans une usine chimique. Les deux partagent un modeste logement et veillent l’un sur l’autre. Entre deux avions, Pino rentre à la maison où Nunzio traîne en pyjama, sérieusement malade.
L’écriture de Scimone est celle d’un acteur qui entend écrire pour les acteurs : Mon écriture est une écriture d’acteur. D’acteur, parce que je suis un acteur et que l’acteur – l’humain – est l’essence du théâtre. Les mots sont réalistes mais l’écriture, par des répétitivités, des fantaisies, nous arrachent d’hun hyperréalisme : nous sommes bien au théâtre, c’est-à-dire à un lieu où la parole nous sort défintivement du quotidiannisme (je sais, c’est un barbarisme, mais pouvez-vous vous attendre à quelque chose d’autre de la part de quelqu’un s’appelant Barbarin ?)
Il y a du Beckett dans ces deux petits personnages là : ils n’attendent pas Godot mais « quelque chose » dans laquelle ils ont désespèrement foi et dans cette désepérance ils sont touchants. Chacun veut amener l’autre dans son rêve même si chacun sait, à sa manère, que c’est foutu.
Christophe Laparra, dans son rôle de « dur » essaie de masquer la compassion qu’il a pour son compagnon, Marc Maugin est un Nunzio déjà ailleurs. La scène où, autour d’un plat, ils portent un nombre infini de toasts, est emplie, entre autre par le jeu des acteurs, d’une fraternité que j’ai rarement vue au théâtre.
Ce spectacle a été joué dans des théâtre, mais aussi en milieu rural, en appartements et dans des milieux urbains défavorisés, bref, là où le théâtre a du mal à faire entendre sa voix. Nunzio est une œuvre riche, sincère, authentique et riche.
Jacques Barbarin
Nunzio, mise en scène Christophe Lappara, Présence Pasteur, 13, rue du Pont Trouca, Avignon, 04 32 74 18 54 jusqu’au 31 juillet, 15h30