Cinéma / Une Journée à Rome de Francesca Comencini

On les croirait sortis de chez Pasolini . Deux jeunes gens , un garçon et une fille, de la banlieue en quête de travail découvrent l’autre côté de la ville éternelle. Entre conte social et comédie romantique, la tendre ballade de deux adolescents qui découvrent la -dure – réalité de la vie et de leur pays, sous anesthésie Berlusconienne…

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Giulia Valentin  et Filippo Scicchitano

C’est donc au début de la matinée dans la banlieue Romaine que débute le récit de cette journée, et l’on voit Gina et Marco se préparer pour franchir le pas de la porte d’entrée dans le monde du Travail. Le chemin du travail , c’est aussi celui qui mène au cœur de la ville éternelle où les jeunes gens venus des quartiers périphériques se rendent rarement . Comme un autre monde, celui de la bourgeoisie et des grands magasins de luxe, celui aussi, du centre historique qui attire les touristes du monde entier. Marco et Gina ont cette fougue de la jeunesse qui les pousse a franchir les obstacles et à vouloir concrétiser leur rêves.

Gina ( Giulia Valentini) poursuit celui de rentrer dans le monde du spectacle et notamment de la télévision pour lequel un député lui a promis son appui . La « Mama » qui veille sur sa progéniture , s’est mise en quatre afin de l’apprêter et l’habiller pour la circonstance. Elle lui a même trouvé un chauffeur, fils d’un ami, pour l’amener au rendez-vous. C’est Marco ( Filippo Scicchitano ) qu’elle retrouve au volant d’une Berline noir et qui , lui aussi, se rend en ville pour son premier jour de travail pour une société de transport de luxe.Image

Tous les deux , fils d’ouvriers romains, en quête d’ascenseur social vont apprendre l’espace d’une journée, a devoir contourner les obstacles et le chemin qui leur reste à faire dans une ville symbole et dans une société Italienne qui a du mal à s’ouvrir aux enfants des classes populaires .

La belle idée du film c’est la manière dont le récit et la mise en scène épousent, avec leur héros, cet itinéraire banlieue / centre Ville dont la forme emblématique ouvre la porte par petites touches, aux espaces et aux individus avec une rythmique au cœur de laquelle s’installent -selon les circonstances- les notes de la légèreté et de la gravité, magnifiquement servies par les deux jeunes comédiens belles figures de la jeune génération montante Italienne qui s’engage souvent dans des films d’auteur. Marco et Gina qui ne se connaissaient pas, finissent par s’apprivoiser , se découvrir et se confier, en même temps qu’ils découvrent la ville et ses pièges de la vie facile qui peuvent se révéler destructeurs. Habilement, Francesca Comencini , laisse sourdre au cœur de la transgression ( le vol dans le magasin de luxe ) que s’offrent nos tourtereaux , la mélancolique angoisse des lendemains qui déchantent.

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Car le rêve que poursuit Gina , dont le compromis qu’il suggère au travers du rendez-vous habilement retardé, est un mirage tendu qui fait écho à la normalisation du poids des influences politiques et ses dérives au cours des années Berlusconi. Gina, belle héroïne féminine n’est pas dupe de cette situation de chantage imposé dans laquelle elle s’est laissée entraîner. De la même manière que Marco ne peut que subir les humiliations des clients huppés peu reconnaissants du service rendu !. Alors, comme en miroir au constat navrant et à ce mépris affiché, entre un Marco quelque peu immature et une Gina plus combative, la romance qui s’installe est un peu la ( leur) réponse individuelle à une solidarité de classe en sommeil que révèle , en filigrane habilement par leurs subtilités linguistiques et accents, les dialogues qui définissent une sorte de frontière entre ceux qui vivent dans les faubourgs et ceux en sont partis . Ce qui ne manque pas de donner des armes à ceux qui n’hésitent pas a en profiter , notamment dans le rapport du chantage au travail qui est devenu , aujourd’hui en ces temps de crise, une question de survie.

Etienne Ballérini

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