image Cinéma / Frances HA de Noah Baumbach.

Elle ne sait pas quoi faire de sa vie. Indécise, en quête de stabilité, de travail, de logis et d’amour. Portrait sensible d’une douce rêveuse indépendante à l’approche de la trentaineImage

Noah Braumbach est le jeune réalisateur américain qui monte…il s’est fait une réputation en trois films en forme de chroniques quotidiennes sur des personnages qui se retrouvent sur le fil du rasoir dans une société faite de contraintes et de compromis. Dans Les Berkman se séparent (2006), c’était le couple et la famille qui basculaient dans le cauchemar consécutif au divorce, tandis que la crise de la quarantaine faisait littéralement disjoncter le héros de Greenberg (2010) en Don Quichotte contre la société de consommation et l’hypocrisie ambiante. Mal à l’aise dans ses baskets à l’approche de la trentaine, ici, Frances (Greta Gerwig, également co-scénariste) qui traîne côté cœur une réputation « d’incasable », et côté travail, rêve de devenir chorégraphe, mais végète comme apprentie dans une compagnie de danse contemporaine.

Le problème de Francès, en quête d’absolu c’est qu’elle se laisse parfois bercer entre deux eaux sans vraiment se décider se laissant emporter par le courant. Et parfois ça secoue grave… virée de son boulot et lâchée par sa copine avec qui elle habitait et a entretenu depuis l’université une amitié fusionnelle. La gaffeuse, l’inachevée, l’insouciante… dérive et traverse son chemin de solitude en s’immergeant au fil des rencontres au cœur de l’effervescence du milieu artistique New-Yorkais. La perte de ces deux liens sociaux et points de repères qui la précipite dans la rue, va finir au fil des rencontres, par servir de détonateur

De ce « choc » des rencontres et de la fragilité presque destructrice de Francès, va sourdre cette sorte énergie du désespoir que viendra en quelque sorte canaliser, le beau personnage de Benji l’artiste bohème qui se mue chevalier amical-amoureux, lui renvoie le miroir d’un « double » solitaire qui -comme elle – cherche sa voie. Au cœur de cette communauté mouvante qui se croise, s’apprivoise et se défie parfois, s’inscrivent les notes d’une partition faite des portraits et des petites notations sociologiques qui dessinent la chronique d’une génération.

Une chronique douce-amère appuyée par le choix d’une image en noir et blanc qui traduit merveilleusement cet entre-deux, cette immaturité des personnages et d’une génération qui prolonge l’enfance de l’art hésitant à revêtir ses habits d’adultes. La mise en scène cherche – et arrive – à épouser, par ses envolées et références clins-d’œil cinématographiques (au Manhattan de Woody Allen, à la nouvelle vague,…) et ses digressions de comédie, la dimension enchevêtrée du réalisme et du poème lunaire refusant les schémas du mélodrame attendu, et de la comédie romantique espérée.

Noah Braumbach inscrit une sorte d’état d’apesanteur et de gravité mêlés dans lequel baigne son héroïne en forme d’ébauche et d’esquisse dont les traits s’affinent devant nos yeux. Et nous offre avant tout de belles rencontres, des histoires de solitudes et d’amitié à l’épreuve du temps. Des corps en vie et en mouvement, parfois nonchalants, en perdition ou en déséquilibre ; mais qu’une force, un élan, une énergie secrète réanime (le beau final) pour faire face à la vie, et y trouver sa place. Frances Ha, est aussi en ce sens, un beau film sur la quête de l’autre, la découverte et l’affirmation de soi…

Etienne Ballérini

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