La tragédie de l’Afghanistan sous le régime des Talibans vécue au quotidien par une fillette de 11 ans. Le nouveau film d’animation de la cinéaste Irlandaise de Brendan et le secret de Kells ( 2009) est une Magnifique et bouleversante fable poético-réaliste de résistance à l’oppression. Sélection Officielle Festival d’Annecy 2018 ( Prix du Jury et du Public ) et Nomination à l’Oscar du meilleur film d’Animation .
Adapté du roman best-seller de Deborah Ellis, le film nous immerge d’emblée au cœur de la ville de Kaboul ravagée par la guerre et sous le joug des Talibans . Il nous plonge au cœur d’une famille portant le poids du passé et du présent . Le père qui fut professeur et a lutté contre l’invasion Russe durant les années 1979-88 dont il porte les séquelles ( une jambe en partie sectionnée ) , a vécu ensuite le gouvernement communiste et la guerre civile , puis l’arrivé des Talibans instaurant l’Islamisme radical, en Septembre 1996 . Il est désormais devenu vendeur à la sauvette, lecteur et écrivain Public . La petite Parvana, l’accompagne son travail quotidien, et aime bien écouter les histoires que lui raconte ce dernier qui se fait d’une certaine manière le « passeur » d’une mémoire et d’une culture que les Talibans cherchent à effacer des esprits d’une Population soumise à leur « loi ». Un jour comme tant d’autres , alors que Parvana, est assise dans la rue aux côtés de son père et de son appareillage, un groupe de jeunes Talibans qui l’a entendue faire une réflexion s’approche et demande des comptes à son père . Parvana comme toute jeune fille ou femme Afghane , n’est tolérée dans la rue qu’accompagnée d’une homme, et doit « bien se tenir ! ». Les quelques mots prononcés par Parvana sont considérés comme une infraction , et le père sermonné :« tu ferais mieux de tenir ta fille à la maison ! » qui tente d’expliquer son handicap et les raisons de la présence de sa fille à ses côtés … le ton monte , et le voilà emmené sans ménagement en prison !. C’est la catastrophe pour la famille de la petite fille dont les seuls , et maigres revenus leur permettant de vivre difficilement , étaient ceux apportés par le père, aidé par celle-ci …

Aucun autre homme à la maison pouvant l’accompagner pour sortir, comment faire les courses et tenter de gagner désormais un peu d’argent pour que la famille survive ? …Parvana qui ne veut pas lâcher l’affaire va provoquer le destin et la « loi », décide de se couper les cheveux et se travestir en petit garçon !. Elle sait qu’elle risque à tout moment d’être démasquée , le récit étayé par les nombreux témoignages sur des faits similaires recueillis sur place , est dès lors empreint de cette force dont les magnifiques et nombreuses séquences illustrent la tension qui règne , et le traitement dont sont victimes les femmes qui « osent » sortir seules dans une ville dévastée par la guerre, s’y retrouvant traquées , punies et battues sans ménagement par les défenseurs de l’ordre moral . Oser les défier peut devenir une question…de vie ou de mort !. Mais, dans des conditions extrêmes, le courage comme arme de survie est une réponse naturelle en forme de résistance. A celle de Parvana décidée et prête à tout pour sauver son père et tenter de le sortir de cette prison où il a été« injustement » enfermé , répondent les silhouettes de femmes solidaires , enveloppées dans leur burqa , se faufilant dans les rues fuyant les regards inquisiteurs , ou se fondant dans l’obscurité de la nuit pour tenter de survivre à l’enfer. La cinéaste a voulu en faire un « conte merveilleux sur l’émancipation des femmes et l’imagination face à l’oppression » . La grande force du récit et de la mise en scène est d’envelopper la dimension tragique du quotidien par les éléments culturels liés à la transmission aux enfants , via les élements de la légende , du conte ou du rêve . Et celle-ci est justement de s’appuyer sur ce passé du pays , dont la richesse accumulée au fil de son histoire et de sa position stratégique (point capital de la Route de la soie ) , qui en a fait un carrefour culturel , plaque tournante riche de ses influences ( Turques , Perses , indiennes , Mongoles , Grecques…) , mais un pays , devenu aussi la proie des conquérants puis de la colonisation Britannique …

C’est de cet héritage exposé superbement en introduction historique au début du film , auquel s’ajoute les récits du père de Parvana que le récit va trouver dès lors , le contrepoint de la poésie et de l’évasion , venant illuminer d’espoir le douloureux quotidien de Parvana., et des habitants de la ville . Il y a également les rencontres solidaires que la petite fille provoque par sa manière d’être, de vivre et de se battre . Comme celle avec le beau personnage du petit garçon de la rue , avec qui une amitié teintée de partage d’aventures communes et de rêveries , va naître. A celui-ci ,elle confiera la douleur de la perte du grand frère, dont la mère refuse (« elle n’en parle pas !» ) d’évoquer les raisons . Cette belle rencontre fait penser à celle, tout aussi bouleversante du petit garçon et de la petite fille Japonais, héros du film Le tombeau des lucioles (1988) de d’Isao Takahata , cherchant à survivre dans la ville de Seiko en ruine , sous les bombardements alliés en 1945.
Et puis , il y a aussi , ce vieil homme qui un jour sollicite Parvana pour la lecture et l’écriture de la réponse à une lettre importante qu’il a reçue …et qui la remerciera en lui permettant ,via une relation , de prendre contact avec son père emprisonné . Ce quotidien que Parvana tente d’enjoliver en racontant à son petite frère la légende du prince et de l’éléphant cruel . Puisant dans ces évocations des « défis » à relever pour les héros de contes, la force nécessaire : « c’est sa façon à elle de se « connecter » avec un être aimé disparu et sa «manière d’interpréter et de transmettre avec douceur une tragédie vécue » , explique la cinéaste. Son film est riche de toutes ces possibilités ouvertes comme rempart à la douleur et à la détresse incommensurable …

La puissance de la fable porteuse d’espoir trouve son écho, également dans la bande sonore dont les chants du choeur des femmes Afghanes qui accompagnent les scènes porteuses d’espoir et constituent dit la cinéaste : « Un appel à étudier , et se battre pour exister ». De la même manière que l’aspect documentaire dont les témoignages recueillis sur place pour traduire fidèlement le « vécu » quotidien , trouvent leur représentation dans le choix d’une mise en image dont l’écran large ( cinémascope ) offre une possibilité d’espace et d’ouverture à l’enfermement de la tragédie de l’oppression vécue. De la même manière, le travail sur les décors , fruit d’une même recherche documentée détaillée sur la ville de Kaboul à la fin des années 1990, traduit la volonté réaliste et authentique de la représentation . Comme l’est celle des dessins dont la naïveté du trait , reflète le point de vue de Parvana , son imaginaire et de sa perception du réel . Le fond et la forme en adéquation , que prolonge le final refusant le « happy-end » jugé impossible par la cinéaste au regard de la tragédie vécue et du « respect » dû aux victimes. Le film dont l’interprétation reste « ouverte » au spectateur , se clôt sur le visage de Parvana . Ode à l’espoir , à l’imaginaire consolateur , cri sublime , témoignage émouvant . Petits et grands , ne manquez pas ce grand film d’animation , vous les regretteriez …
(Etienne Ballérini )
PARVANA, Une enfance en Afghanistan – de Nora Twomey – Durée : 1h 33 .
AVEC : Golshifteh Farahani , Mina Khosravani, Behi Djanati Ataï, Hamidreza Djavdan, Zar AmirEbrahimi, Payam Madjlessi, Alexandre Adibzadeh ( Tous les personnages du film ,sont doublés par des comédiens Iraniens et Afghans vivant en exil en Fran ce )
LIEN : Bande- Annonce du Film : Parvana , une enfance Afghane de Nora Twomey.
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